Incendies en série : plus de 20 feux pour que sa douleur parte en fumée

  • Plus de 20 hectares avaient brûlé.
    Plus de 20 hectares avaient brûlé. DDM - MARC SALVET
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l'essentiel Pour se décharger de sa colère et de sa peine, ce jeune Figeacois a provoqué une vingtaine de feux en juin 2022 dans les communes où son job de livreur le conduisait.

Pour éteindre sa douleur, il embrase la nature. Pour qu’avec elle, ce déchirement qui l’étreint parte en fumée. Le jeune homme qui se présente à la barre du tribunal de Cahors, ce jeudi 19 septembre, doit répondre d’un nombre impressionnant de faits. 20 au total qui comprennent tous le même et unique chef d’inculpation : incendie de végétations ou de massifs forestiers. Pull et jean bleu, visage encore juvénile mais aux traits serrés, rien ne laisse transparaître pour l’instant les sentiments de Guillaume*, 22 ans aujourd’hui. Seules le trahissent ses deux mains qu’il n’a de cesse, au cours de l’audience, de frotter machinalement et où l’on aperçoit sur l’une d’entre elles une fleur de lys, le symbole des rois de France.

« J’avais besoin d’extérioriser ma colère »

Mais Guillaume n’a rien à voir avec Louis XIV, le Roi-Soleil. Pourtant comme un astre, il s’est bien consumé à petit feu au point d’allumer ces feux qui avaient, à l’époque, provoqué l’émoi des villages, et l’agitation des forces de l’ordre et de secours.
Revenons en arrière. Du 14 juin 2022 au 21 juin 2022, une vingtaine de feux sont déclenchés sur plusieurs communes plus ou moins proches du Lot. La liste détonne par sa longueur : Cénevières, Cajarc, Marcilhac-sur-Célé, Sauliac-sur-Célé, Bellefont-La-Rauze, Arcambal, Berganty, Gréalou, Esclauzels, Saint-Martin-Labouval, Calvignac.

Les faits sont reconnus par Guillaume. Et pour cause, c’est lui qui appelle les gendarmes pour se dénoncer suite à une longue discussion avec sa compagne. La question qui taraude le tribunal n’est donc pas celle des faits. Mais pourquoi ?
« J’avais besoin d’extérioriser ma colère », raconte le jeune homme. Abandonné par ses parents, il a été placé en famille d’accueil alors très jeune. Même chose pour ses trois autres frères, désormais sa seule famille. C’est le récit de cette enfance chaotique qui vient troubler le visage du jeune homme, jusque-là impassible, où des larmes viennent régulièrement remplir ses yeux. Il le confesse, ce n’était pas la bonne solution, mais c’était presque le résultat logique d’une accumulation de peines et de souffrances : « Je ne suis pas quelqu’un qui parle. Je n’arrive pas à mettre des mots sur ce que je ressens. À un moment donné, il fallait que ça sorte. »

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134 000 € de frais pour les pompiers

« Il y a beaucoup d’enfants qui grandissent dans un environnement difficile. Mais tous ne mettent pas le feu. Pourquoi ce choix ? », demande le président du tribunal. « J’avais l’impression que mes problèmes partaient en fumée », analyse Guillaume pour qui l’élément déclencheur était une voiture qui, ce 14 juin, a manqué de lui rentrer dedans.
Cette voiture, c’est l’étincelle qui embrase Guillaume et culmine le 21 juin où il allume 11 feux. Un cheminement destructeur permis par son job de livreur : « Dès que je me sentais mal, je descendais pour allumer un feu. »
Grâce à l’intervention rapide du SDIS 46, ni maisons, ni personnes n’ont été touchées. Mais les pompiers chiffrent le coût élevé de leur intervention pour répondre à l’épisode dépressif de Guillaume : 134 000 €. À elle seule, l’utilisation de deux bombardiers d’eau s’élève à presque 10 000 €. « Je me rends compte que je n’étais pas conscient des risques. Je demande pardon à ceux à qui j’ai causé préjudice », souffle en pleurant le jeune homme qui désormais « baisse la tête lorsque je traverse le secteur. » Le poids de la honte.

« Ce n’est pas un pyromane »

« L’expert le dit bien, il n’est pas un pyromane, il n’a pas la fascination du feu. Pour autant, que se passera-t-il lorsqu’il connaîtra à nouveau un moment difficile ? », s’inquiète le parquet qui a requis quatre ans de prison dont trois assortis d’un sursis probatoire. Un moment passager, pour la défense de Guillaume : « On a tous en nous cet instinct de destruction, cette souffrance qui nous détruit et dont on doit se décharger », plaide Me Christophe Bernabeu qui décrit cet épisode comme « l’acmé de sa douleur. Et une réponse à cette question : "Pourquoi mon père et ma mère m’ont abandonné ?" C’est un jeune qui encaisse, et a craqué. » La robe noire conclut en demandant d’atténuer les sommes demandées par le parquet et les parties civiles. « Il ne gagne que 1 300 € et a toute sa vie devant lui. »
Une question épineuse, trop complexe pour être résolue en l’espace d’une suspension de séance. Le délibéré a été renvoyé au jeudi 26 septembre.

*Le prénom a été modifié
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Les commentaires (1)
Java31 Il y a 37 minutes Le 20/09/2024 à 11:49

Les incendies ne seraient pas tous causés par le réchauffement climatique, on nous aurait menti ???