Au sol, des douilles de fusils-mitrailleurs

Au sol, des douilles de fusils-mitrailleurs

    Comment trois arrestations, presque anodines pour la Seine-Saint-Denis, ont-elles pu virer à une attaque digne du grand banditisme ? C'est à la police judiciaire d'élucider cette affaire. L'agression a été qualifiée par le parquet de Bobigny de « tentative de meurtre en bande organisée » et « tentative d'évasion en bande organisée », crimes passibles de la perpétuité.

    Vers 20 h 30 samedi, en passant par les 4 000 à La Courneuve pour prêter main-forte à des policiers caillassés ailleurs, une patrouille de la compagnie d'intervention a entendu une détonation avant de découvrir des impacts sur son véhicule, laissant penser à des tirs de pistolet à grenaille. Les policiers pensent localiser l'origine du tir lorsqu'ils voient sortir d'un hall un jeune homme « très corpulent », qui rejoint deux jeunes gens en voiture. Les trois sont placés en garde à vue pour savoir, sur la foi d'analyses de poudre notamment, s'ils sont à l'origine des tirs. Dans la soirée, deux des suspects réclament un médecin.

    Un suspect tente de s'enfuir

    Il est plus de 2 h 30 et, à cette heure-là, il faut aller à à l'hôpital de Bondy , à l'unité médico-judiciaire habilitée. Dans le fourgon policier montent deux suspects et quatre fonctionnaires. En quittant le commissariat, deux voitures, feux éteints, rattrapent le fourgon qui n'a pas le temps de rejoindre l'A 86. Sur la bretelle d'accès, la Citroën C4 blanche percute et bloque le fourgon.

    La suite, ce sont les policiers qui la racontent aux enquêteurs : un homme sort, le visage dissimulé, une arme à la main, qui ressemble à un fusil-mitrailleur de type AK-47. Les douilles retrouvées témoignent d'un calibre de guerre : du 7,62. Le tireur décharge plusieurs rafales sur le fourgon de police. Un policier riposte. Un de ses collègues, à l'arrière avec les deux suspects, ouvre la porte latérale du fourgon, peut-être pour tirer. Le suspect de forte corpulence l'aurait bousculé pour s'enfuir, mains menottées dans le dos. Deux policiers le poursuivent et le rattrapent pendant que le tireur de la C4 tire encore, mais l'arme semble s'enrayer. Il réussit à s'enfuir. La C4 volée et faussement immatriculée est retrouvée une heure plus tard. Les deux suspects ont été replacés en garde à vue. « Des événements d'une extrême gravité, déplore le maire PC de La Courneuve, Gilles Poux. Cela marque un seuil dans l'escalade de la violence et d'une organisation mafieuse, et montre l'urgence à disposer de moyens policiers conséquents. »

    Qu'est-ce qui pouvait motiver pareille expédition ? Le suspect de 22 ans est connu de la police, soupçonné d'être lié au trafic de drogue et au Bouledogue, surnom d'un des halls réputés pour le deal. Décrit comme « intelligent », il doit être jugé prochainement pour des jets de projectiles sur des policiers, récemment dans le quartier des 4 000. Un quartier où la rénovation urbaine est ralentie par la violence. Les ouvriers ne viennent plus murer les appartements vidés que sous escorte policière depuis qu'ils ont été menacés avec des armes. Fin mars, des policiers qui les assistaient ont été gazés et visés à coups de flash-ball. Après, un tag fleurissait sur les murs, promettant que la prochaine fois il ne s'agirait pas de balles en caoutchouc.