C'est ici qu'ils traquent le virus

Genève (Suisse)

C'est ici qu'ils traquent le virus

    C'est sans doute le site le plus stratégique du moment. Le plus protégé de l'Organisation mondiale de la santé (OMS). Ici, nul ne pénètre sans montrer patte blanche ou plutôt sans être identifié par un système informatique de très haute sécurité limitant l'accès aux seules personnes autorisées. Cette salle de gestion de crise est le centre névralgique de la lutte contre la pandémie de grippe A où, chaque jour, les spécialistes se réunissent pour faire le point sur l'avancée de la maladie dans le monde grâce à un système de communication ultrasophistiqué. Situé sur deux niveaux, à l'entresol et au sous-sol de l'immense immeuble de verre, ce site ressemble à s'y méprendre à un centre de commandement militaire. Les uniformes en moins.

    Au premier niveau, avec pour seul décor le portrait académique de l'ancien directeur général de l'OMS, le docteur Lee, une salle de réunion aveugle équipée au centre d'une grande table triangulaire d'où émergent des micros. Sur l'un des murs, des écrans digitaux affichent en chiffres rouges les heures de toutes les capitales du monde, de Moscou à Pékin, en passant par New Delhi et Le Caire, chiffres qui défilent inlassablement. Deux autres écrans géants permettent la tenue, deux fois par jour le matin à 8 h 30, le soir à 18 heures , de communications en visioconférence avec les responsables des différents bureaux de l'organisation sanitaire à travers le monde. L'occasion de faire le point le plus précis possible pour les médecins.

    Responsables des réseaux d'alerte, économistes, médecins...

    Sur le côté de cette pièce, une immense baie vitrée ouvre sur un balcon de verre qui surplombe une seconde salle ultramoderne, à l'étage en dessous, très largement éclairée. Autour d'une table en U, quinze sièges noirs font face à autant de téléphones dernier cri et d'écrans d'ordinateurs rétractables que le simple basculement d'une tablette suffit à faire surgir. C'est ici que prennent place les plus hauts cadres de l'OMS. Les spécialistes de la logistique, les planificateurs, les responsables des réseaux d'alerte, les économistes, les techniciens de la communication et les médecins ont chacun leur place désignée dans cette arène à l'ambiance high-tech et très sereine à la fois. Tous sont ici chargés de prendre les ultimes décisions lors des grandes crises sanitaires : le tremblement de terre en Chine en mai 2008, l'épidémie de choléra au Zimbabwe en janvier dernier, les résurgences de la fièvre Ebola au Congo et aux Philippines en début d'année.

    Des écrans plats géants tapissent les murs, le plus grand affiche sur une carte du monde la progression de la grippe A pays par pays : le nombre de cas recensés et le nombre de morts. En bas à droite, un autre écran plus réduit diffuse pour l'instant CNN, la chaîne américaine d'information en continu. Toutes les données venant des bureaux de l'OMS dans le monde mais aussi des réseaux sentinelles des hôpitaux, des différents laboratoires agréés par l'organisation, des ministères de la Santé de tous les Etats membres convergent dans ce lieu et y sont décryptées avant d'être analysées. Au plus fort de la crise de la grippe A, en mai, les réunions se tenaient ici vingt-quatre heures sur vingt-quatre. A tout moment, elles peuvent reprendre à ce rythme en cas de nouvelles alertes sanitaires. La veille est permanente.