Dans l’Eure, les salariés de Manoir Industries, fleuron de la métallurgie, suspendus à l’espoir d’une reprise

Leader dans les pièces en aciers spéciaux, Manoir Industries est en redressement judiciaire. Les syndicats et les salariés se mobilisent pour son avenir.

A Pitres (Eure), Manoir Industries est en redressement judiciaire et attend un repreneur. #PRESSE30
A Pitres (Eure), Manoir Industries est en redressement judiciaire et attend un repreneur. #PRESSE30

    C’est le fleuron industriel de la vallée de l’Andelle. A Pîtres (Eure), depuis 1917, Manoir Industries conçoit et réalise des pièces en aciers spéciaux dans les secteurs de la pétrochimie, du nucléaire, de l’armement et du ferroviaire. L’entreprise appartient pour le moment à un fonds d’investissement hongkongais. Son carnet de commandes est plein, mais sa trésorerie exsangue. L’usine euroise a donc été mise en redressement judiciaire le 25 février dernier. Depuis, les 439 salariés attendent pour connaître leur avenir.

    Dans le bureau du Comité Social et Économique (CSE), c’est le branle-bas de combat. Tous les syndicats se sont unis (CGT, CFDT, FO et CGC), « car cette situation n’est pas liée qu’à la crise sanitaire. Nous étions déjà en difficulté avant. Elle n’aide pas, mais elle n’est pas la seule responsable. Aujourd’hui, nos clients nous font confiance, notamment dans la pétrochimie où l’activité est soutenue. Alors, nous prenons contact auprès des différents élus locaux, des ministères et de la préfecture », détaille Éric Lafon le délégué syndical FO.

    Une mobilisation qui porte ses fruits, car « tous réagissent. Nous avons eu une réunion avec le président de la région Normandie, Hervé Morin, le Préfet est très attentif et une équipe spécialisée du ministère de l’Économie nous suit, complète Aurélie Wuilke de la CGT. Ils sont tous très réceptifs et on aura de l’aide. Il faut savoir que nous sommes le plus gros site de la vallée et une disparition aurait un impact sur l’économie locale. Un emploi ici, c’est aussi un emploi en sous-traitance. De plus, le groupe, c’est plus de 1000 emplois en France dont 850 en Normandie ».

    Dans l’attente du 22 mars…

    Actuellement, l’état d’esprit sur le site est à l’anxiété, selon Éric Lafon de FO : « Et au questionnement ! On continue à travailler. Nous attendons avec impatience la date de clôture du dépôt des offres des éventuels repreneurs, le 22 mars. Pendant ce temps, la Direction doit être transparente avec nous et les salariés. » Des marques d’intérêt se sont déjà fait connaître, « mais pour combien de secteurs d’activité ? s’interroge Éric Lafon. Aujourd’hui, pour l’usine de Pitres, la proportion est de 70 % pour la pétrochimie avec de gros projets et 30 % pour le nucléaire où on travaille beaucoup pour EDF sur du matériel de l’après-Fukushima. Ici, il y a un savoir-faire pour le monde entier ! » Alors, l’intersyndicale est prête à répondre dès le 23 mars et prévoit déjà des actions de soutien. « Il faudra tenir jusqu’à fin avril pour connaître la décision finale. Après, notre trésorerie ne fera plus face », affirme Grégory Chevalier, le délégué syndical CGC.

    LIRE AUSSI > A Evreux, des dizaines de familles allemandes s’installent autour de la base militaire

    Comme pour tous les redressements judiciaires, les salaires ne sont pas garantis à la date convenue. Alors, immédiatement, l’intersyndicale s’est aussi mobilisée. Contact a été pris avec les commerçants locaux « qui ont réagi efficacement, indique Aurélie Wuilke. Ils nous ont fait des prix sur des produits et en ont offert d’autres. Nous avons donc pu remettre 260 colis sans aucune distinction. En plus, une cagnotte en ligne est ouverte et une urne à disposition au CSE pour anticiper la suite au cas où… » Tous les salariés rêvent à un avenir industriel. « On espère que le repreneur ne sera pas un financier pour deux ans », conclut la syndicaliste CGT.