Des tests psychologiques pour les apprentis magistrats

Bordeaux (Gironde)  

Des tests psychologiques pour les apprentis magistrats

    Pour la première fois depuis la naissance de l'institution, des tests psychologiques ont été mis en place cette année lors de la sélection d'entrée à l'Ecole nationale de la magistrature (ENM) à Bordeaux. Selon la direction de l'établissement, ces épreuves sont destinées à « écarter des candidats inaptes à exercer la fonction de magistrat ». Instaurés en 2008 dans le cadre de la réforme du concours d'entrée à l'ENM, au lendemain de l'affaire d'Outreau, elles ont pour objet de mesurer la personnalité des candidats et d'évaluer la capacité des prétendants aux postes de magistrats « à s'adapter aux circonstances ou à prendre une décision empreinte de bon sens ». Ces tests ont déclenché un véritable tollé chez les syndicats de magistrats qui ont saisi le Conseil d'Etat et demandent carrément la suppression de ces tests.

    « Vous sentez-vous supérieur ? »

    Dans le détail, ces épreuves d'un genre nouveau ont commencé le 5 novembre. « Nous avons été interrogées sur notre stress, nos émotions, notre imagination, nos rêves », racontent deux étudiantes. Quelques jours plus tard un entretien est organisé avec un autre psychologue épaulé d'un magistrat. Parmi les questions posées aux candidats à la magistrature : « Vous sentez-vous supérieur ? Etes-vous un maniaque du rangement ? » Des interrogations qui ont suscité la colère aussi bien parmi les candidats que chez les magistrats de l'ENM.

    Vice-président du Syndicat de la magistrature, Olivier Joulin s'inquiète, entre autres, de « l'influence des psychologues » sur le jury. « Ces tests, dit-il, ont été imaginés à partir d'une méthode mise en place il y a trente ans par un cabinet de recrutement américain. Nous ne sommes pas contre la vérification d'un problème, mais il ne s'agit pas là d'une réelle évaluation médicale. En cherchant à affiner les personnalités des candidats, que cherche-t-on ? Une neutralité de caractère ? »

    Jean-François Thony, le directeur de l'école, tempère : « Ces tests ne sont pas une épreuve. Le psychologue émet un avis qui est une information à destination du jury. Je rappelle que ce dispositif est appliqué dans d'autres écoles de la magistrature en Europe comme aux Pays-Bas ou au Portugal. » Un argument repris par le porte-parole du ministère de la Justice, Guillaume Didier : « Pour juger, il ne suffit pas de connaître son droit. Au même titre que les commissaires de police, les futurs magistrats doivent être aptes à exercer leurs fonctions ! »

    Il appartient désormais au Conseil d'Etat de juger de la validité de ces tests.