Poitiers : les «antimosquées» de Génération identitaire devant le tribunal

Cinq anciens militants du mouvement d'extrême droite Génération identitaire sont jugés ce vendredi à Poitiers (Vienne). Ils avaient occupé le chantier de la mosquée de Poitiers en octobre 2012.

Poitiers (Vienne), le 20 octobre 2012. Le mouvement d’extrême droite Génération identitaire avait envahi illégalement le chantier de la mosquée.
Poitiers (Vienne), le 20 octobre 2012. Le mouvement d’extrême droite Génération identitaire avait envahi illégalement le chantier de la mosquée. AFP

    Soixante-dix militants, une échelle et des slogans tels que «732, souviens-toi de Charles Martel» : le 20 octobre 2012, aux aurores, le mouvement d'extrême droite Génération identitaire investit bruyamment le toit de la mosquée de Poitiers. L'édifice en chantier et le terrain appartiennent à l'Union des organisations islamiques de France (UOIF, renommée depuis février Musulmans de France). Les identitaires réclament, eux, un référendum sur la construction de mosquées en France et sur l'immigration. Ils convoquent «un héros», Charles Martel, «celui qui a stoppé les Sarrasins». L'opération, très médiatisée, contribue à lancer le groupuscule fondé un mois plus tôt et s'achève après huit heures de négociations avec les forces de l'ordre.

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    Aujourd'hui, cinq ans plus tard jour pour jour, Génération identitaire et cinq de ses anciens militants sont appelés à comparaître devant le tribunal correctionnel de Poitiers pour provocation à la discrimination nationale, raciale et religieuse et pour dégradation et détérioration du bien d'autrui. Parmi eux, Damien Rieu — né Lefèvre —, alors porte-parole du mouvement. Lui « assume » et « ne regrette rien ». Encarté au Front national, Damien Rieu a un temps secondé Marion Maréchal-Le Pen. Désormais, il officie notamment à la communication de la commune de Beaucaire (Gard), tenue par un autre frontiste, Julien Sanchez. Damien Rieu vise la relaxe autant qu'un nouveau coup médiatique. « La justice est coincée. Si elle nous condamne, elle donne raison à l'UOIF. Cela sera alors une victoire pour les islamistes », juge-t-il en insistant sur les « liens » entre l'UOIF et les Frères musulmans, l'une des cibles privilégiées de la mouvance identitaire.

    Des Fichés S pour activisme d'extrême droite et hooliganisme

    Boubaker El Hadj Amor, l'imam de Poitiers et délégué de l'UOIF, constituée partie civile, refuse de « répondre à ces gens peu respectueux ». « La République protège tous ses citoyens. Nous en faisons partie ! » avance-t-il en rappelant les dégradations commises : des trous percés dans le béton afin de fixer les banderoles, des piques antipigeons brisées et des tapis de prière déplacés. « Certains ont uriné sur la toiture... » Le Collectif contre l'islamophobie en France (CCIF), aussi partie civile, dénonce « le message haineux visant la société française » et « les idées racistes, xénophobes et islamophobes » des militants.

    « De jeunes citoyens pacifiques », « des précurseurs », rétorque Génération identitaire, qui appelle à traiter les « cinq de Poitiers en héros et non en accusés ». Parmi les 70 militants présents ce jour-là, certains ont été condamnés pour des petits délits. Surtout, 20 d'entre eux faisaient alors l'objet d'une fiche S pour activisme d'extrême droite et hooliganisme. A l'image de Benoît Vardon, le frère de Philippe Vardon, un proche de Marine Le Pen et ancien responsable du Bloc identitaire. Ou des trois autres prévenus jugés à Poitiers : Alban Ferrari, Maxime Frier et Julien Langella qui a notamment tenu ce jour-là le mégaphone et distillé des slogans tels que « Gaulois, réveille-toi, pas de mosquée chez toi ».