Génocide au Rwanda : la justice française confirme le non-lieu de l’attentat déclencheur du conflit

La justice a confirmé ce vendredi l’abandon des poursuites contre l’entourage de l’actuel président rwandais Paul Kagame dans l’affaire de l’attentat qui a déclenché le génocide de 1994 au Rwanda.

 L’ancien président rwandais, Juvenal Habyarimana, et sa femme, Agathe Habyarimana dans les années 1980.
L’ancien président rwandais, Juvenal Habyarimana, et sa femme, Agathe Habyarimana dans les années 1980. LP/JEROME Benjamin EVRY

    La Cour d'appel de Paris a confirmé ce vendredi, le non-lieu rendu après vingt ans d'enquête sur l'attentat contre l'avion du président rwandais Juvénal Habyarimanau, ont annoncé les avocats des parties. Cette attaque a déclenché le génocide rwandais de 1994 qui a fait plus de 800 000 morts selon l'ONU, principalement dans la minorité tutsie.

    Après six mois de délibérations, les magistrats de la chambre de l'instruction de la cour d'appel ont confirmé la décision datant du 21 décembre 2018 des juges antiterroristes, qui ordonnaient l'abandon des poursuites contre neuf membres de l'entourage de l'actuel président rwandais, Paul Kagame.

    Les avocats de la famille de l'ancien président défunt et celles de l'équipage de l'avion ont annoncé qu'ils formaient un pourvoi en cassation. Ils espéraient a minima que la cour ordonne la réouverture des investigations afin que la justice française puisse accéder à un rapport secret de 2003 du Tribunal pénal international pour le Rwanda (mise en place par le Conseil de sécurité des Nations unies afin de juger les personnes responsables du génocide), qui attribuait la responsabilité de l'attaque au clan de Kagame.

    « Vouloir rouvrir un dossier classé, c'est vouloir créer des problèmes »

    « C'est une décision qui ne nous surprend pas, malheureusement » mais « ça ne met pas fin au combat des parties civiles, le combat d'une vie », a réagi à la sortie de l'audience Me Philippe Meilhac, l'avocat de la famille Habyarimana. Il a dénoncé une « une connotation politique omniprésent » dans ce dossier, citant des propos récents du président Kagame.

    « Vouloir rouvrir un dossier classé, c'est vouloir créer des problèmes », avait mis en garde cette semaine président Kagame dans un entretien à Jeune Afrique au sujet de cette affaire qui empoisonne les relations diplomatiques franco-rwandaises depuis plus de 20 ans.

    Ce dossier, dans lequel des membres de l'entourage de l'actuel président rwandais, Paul Kagame, étaient poursuivis, « a été une parodie de justice, une véritable mascarade qui n'aurait jamais dû voir le jour », a réagi sur son compte Twitter le ministre rwandais de la Justice, Johnston Busingye.

    800 000 morts en trois mois

    Le 6 avril 1994, l'avion transportant Juvénal Habyarimana, issu de la tribu Hutu, et le président burundais Cyprien Ntaryamira avait été abattu en phase d'atterrissage vers Kigali, la capitale du Rwanda, par au moins un missile. Cet attentat est considéré comme le déclencheur du génocide qui a fait plus de 800 000 morts d'avril à juillet 1994.

    En mars 1998, une enquête judiciaire a été ouverte en France, après une plainte de la famille d'un pilote français tué dans l'attentat.

    Les enquêteurs français ont longtemps privilégié la responsabilité des rebelles tutsis menés par Paul Kagame, devenu président du Rwanda en 2000. Puis ils se sont orientés vers une implication d'extrémistes hutus, qui selon eux, voulaient se débarrasser d'un président trop modéré.