Saad Hariri : douze jours de crise entre Beyrouth, Riyad et Paris

Le Premier ministre libanais démissionnaire, que l’on craignait détenu par les Saoudiens, accepte finalement de venir en France. Retour sur une crise diplomatique qui couve depuis le 4 novembre.

 Le Premier ministre libanais démissionnaire Saad Hariri et Emmanuel Macron lors de leur conférence de presse à l’Elysée, le 1er septembre.
Le Premier ministre libanais démissionnaire Saad Hariri et Emmanuel Macron lors de leur conférence de presse à l’Elysée, le 1er septembre. AFP/Ludovic Marin

    Le Premier ministre libanais démissionnaire Saad Hariri va venir en France. C'est le chef de la diplomatie française, Jean-Yves Le Drian, qui l'a confirmé ce jeudi depuis Ryad, après que Beyrouth a accusé le royaume saoudien de le détenir.

    La crise a débuté le 4 novembre lorsqu'il a annoncé sa démission surprise depuis la capitale saoudienne. Depuis, sa liberté de mouvement fait l'objet d'intenses spéculations. Rappel des évènements.

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    - Démission choc. Le 4 novembre, Saad Hariri, alors en Arabie saoudite, annonce sa démission, dans une déclaration retransmise par la chaîne Al-Arabiya à capitaux saoudiens. Il accuse le mouvement chiite libanais Hezbollah et son allié iranien de « mainmise » sur le Liban et dit craindre pour sa vie. Il accuse Téhéran d'avoir « créé un Etat dans l'Etat ». Téhéran rejette des « accusations sans fondement ».

    - Un lien avec la purge ? Le 5 novembre, le chef du Hezbollah, Hassan Nasrallah, accuse l'Arabie saoudite d'avoir contraint Saad Hariri à la démission, alors que cette annonce a coïncidé avec l'arrestation de dizaines de princes, de ministres et d'hommes d'affaires dans une purge sans précédent en Arabie saoudite.

    - Visite à Abu Dhabi. Le 7 novembre, Saad Hariri, reçu la veille par le roi Salmane, effectue une visite à Abou Dhabi, où l'homme fort du pays, cheikh Mohammed ben Zayed Al-Nahyane, l'assure du « soutien » de son pays face « aux ingérences régionales ».

    - Hariri « détenu ». Le 10, le président libanais Michel Aoun, élu en 2016 grâce au soutien du Hezbollah, exprime son « inquiétude » quant au sort de du Premier ministre démissionnaire. Le chef du Hezbollah accuse l'Arabie saoudite de le « détenir » et d'avoir demandé à Israël, ennemi juré du mouvement chiite, de frapper le Liban. Le ministre français des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian déclare qu'à sa « connaissance », Saad Hariri est libre de ses mouvements.

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    - Hariri se dit « libre ». Le 12, Michel Aoun dénonce « les circonstances obscures » dans lesquelles son ex-Premier ministre « vit à Ryad ». Saad Hariri annonce qu'il va « très bientôt » rentrer dans son pays. « Je suis libre ici, si je veux voyager demain, je voyage », déclare-t-il lors d'un entretien avec sa chaîne de télévision libanaise, Future TV, ajoutant : « J'ai écrit ma démission de ma main, et j'ai voulu provoquer un choc positif ».

    - Macronfait une offre... Le 14 novembre, le patriarche maronite, le cardinal Bechara Raï, effectue une visite historique en Arabie saoudite, où il est reçu par le roi Salmane et rencontre M. Hariri. « Je suis convaincu par les raisons de sa démission ». « Il reviendra au Liban dès que possible », dit-il. Le président français Emmanuel Macron, qui avait effectué une visite éclair le 9 novembre à Ryad pour rencontrer le prince héritier, « réitère son souhait que Saad Hariri puisse se rendre au Liban comme il l'a annoncé », lors d'un entretien à Paris avec le ministre libanais des Affaires étrangères Gebrane Bassil.

    - ... Hariri l'accepte. Le 15 novembre, Michel Aoun accuse l'Arabie saoudite de détenir Saad Hariri. « Nous le considérons donc comme en captivité et détenu […] », affirme-t-il. De son côté, l'intéressé s'exprime sur Twitter : « Je veux répéter et assurer que je vais très très bien », assure-t-il, ajoutant : « Je vais revenir si Dieu veut à mon cher Liban comme je vous ai promis ».

    En fin de journée, Emmanuel Macron annonce avoir « invité » Saad Hariri à venir « avec sa famille » en France. L'Elysée précise que celui-ci devrait arriver à Paris « dans les prochains jours ». Le jeudi 16 novembre, Jean-Yves Le Drian, dépêché en Arabie saoudite, annonce que Saad Hariri a « accepté l'invitation » de la France.