Paris : polémiques sur la stratégie de refroidissement défendue par la Ville

La Ville défend la création de « forêts urbaines » ou d’oasis pour rafraîchir Paris. A droite, au centre et à gauche, les critiques se multiplient pourtant sur la stratégie qui sera débattue cette semaine au Conseil de Paris.

 La maire de Paris, Anne Hidalgo, veut débitumiser 4 lieux de Paris : le parvis de l'hôtel de ville, la place Henri Frenay derrière la gare de Lyon, l'arrière de l'opéra Garnier, et une voie piétonne des berges rive droite.
La maire de Paris, Anne Hidalgo, veut débitumiser 4 lieux de Paris : le parvis de l'hôtel de ville, la place Henri Frenay derrière la gare de Lyon, l'arrière de l'opéra Garnier, et une voie piétonne des berges rive droite. APUR/Luxigon

    C'est un débat qui tombe à pic : quelques jours après le premier épisode de canicule de l'été, le Conseil de Paris, qui se tient cette semaine, va débattre de la « stratégie de rafraîchissement » développée par la Ville pour se préparer à vivre des étés plus chauds.

    « Ce nouvel épisode caniculaire est un rappel à l'ordre de l'urgence climatique. Mais cette communication était prévue de longue date », assure Célia Blauel, adjointe chargée du développement durable, pour couper court aux accusations d'opportunisme lancées par l'opposition de droite. De nombreuses voix s'élèvent toutefois, y compris au sein de la majorité, contre certains aspects de cette stratégie.

    Polémique sur le développement du circuit de refroidissement.

    Depuis 1991, la mairie a mis en place une délégation de service public (DSP) pour la production, le transport, le stockage et la distribution d'énergie frigorifique par un réseau urbain d'eau glacée. La concession ne couvre que 43 % du territoire parisien. Le renouvellement de la DSP pour les 20 prochaines années prévoit une extension du réseau. Le groupe communiste souhaite que le réseau soit prioritairement destiné aux écoles, Ephad… « Aujourd'hui, le réseau alimente les grands volumes comme les grands magasins ou les hôtels alors qu'il doit prioritairement servir aux équipements publics. Certaines écoles n'ont même pas de rideaux aux fenêtres ! », insiste Nicolas Bonnet, le président du groupe PC au Conseil de Paris, qui souhaite que la gestion de ce réseau passe par une Société d'économie mixte à opération unique (SEMOP) afin que la ville garde une plus grande maîtrise sur le sujet.

    Le modèle urbanistique de la Ville dans le viseur.

    Plantation de 20 000 arbres, création de 30 ha… La mairie va mettre en avant son « bilan » de mandature et son urbanisme « résilient » censé être exemplaire en matière d'adaptation au changement climatique en citant le projet Saint-Vincent de Paul (XIVe) ou celui de Bercy-Charenton (XIIe). Des chiffres qui laissent cependant nombre d'élus sceptiques à droite, comme au sein de la majorité.

    Le chef de file des macronistes de gauche Julien Bargeton, a ainsi pointé la bitumisation de la place Joffrin (XVIIIe), tout juste rénovée. Eric Azière regrette pour sa part le peu de place dévolue au végétal à Saint-Vincent de Paul (XIVe). « La rue Daguerre refaite l'an dernier est une piste de bowling » s'agace-t-il. Tandis que les Républicains dénoncent le projet surdensifié de la future ZAC Bercy-Charenton (XIIe).

    Et à l'image du groupe Génération.s qui avait déjà posé une question écrite le mois dernier sur le sujet, l'élue de la France Insoumise Danielle Simonnet interpellera la mairie sur le nombre d'espaces verts créés en pleine terre depuis le début de la mandature, même si l'adjoint Jean-Louis Missika affirme qu'ils sont mieux protégés depuis la dernière révision du Plan local d'urbanisme.

    Tirs groupés sur les « forêts urbaines » d'Anne Hidalgo.

    Les espaces verts sont une des solutions préconisées pour rafraîchir les villes. Mais peu d'élus parisiens croient aux « forêts urbaines », présentées par la maire (PS) Anne Hidalgo. « Il n'y aura pas de forêts à Paris », sourit Pierre-Yves Bournazel, président du groupe 100 % Paris. « Le parvis de l'Hôtel de Ville c'est 80 m de large et 150 m de long : c'est pas les Landes! C'est se moquer des Parisiens que de parler de forêts urbaines », renchérit Eric Azière, patron des élus centristes au Conseil de Paris.

    Les écologistes, eux, craignent que ces projets se transforment « en plantes en pot posées sur le bitume ». « C'est du marketing », accuse David Belliard, le patron du groupe écologiste de Paris.

    « Nous sommes des gens sérieux », s'agace l'adjoint Jean-Louis Missika, lorsque les journalistes demandent des précisions sur la faisabilité technique de tels projets. « On sera dans du quasi pleine terre », assure l'élu, « pour un coût de quelques millions d'euros », précise l'adjoint chargé de l'urbanisme. « Ce type de projet n'est pas écologique en termes d'arrosage », regrette Yves Contassot, élu du groupe Génération.s.