« La division est un poison », met en garde Élisabeth Borne face aux députés Renaissance

La Première ministre appelle à l’unité de la majorité, quelques jours après l’initiative de l’aile gauche de la majorité de signer une tribune sur l’immigration avec des parlementaires Nupes.

« La division [...] mène au blocage des institutions, à la paralysie politique, puis à la défaite lors des élections », selon Borne. AFP/Bertrand Guay
« La division [...] mène au blocage des institutions, à la paralysie politique, puis à la défaite lors des élections », selon Borne. AFP/Bertrand Guay

    « La division est un poison. » La mise en garde de la Première ministre, Élisabeth Borne, devant les députés Renaissance a le mérite d’être claire. Alors que la nouvelle saison parlementaire jalonnée de 49.3 se profile, et que le projet de loi sur l’immigration met à l’épreuve le « en même temps » macronien, la Première ministre a tenu un discours très politique à l’occasion des journées parlementaires du parti présidentiel, à Louan-Villegruis-Fontaine (Seine-et-Marne) : « La division est un poison, elle mène au blocage des institutions, à la paralysie politique, puis à la défaite lors des élections. »

    Mardi, la cheffe du gouvernement avait déjà appelé à « l’unité » la majorité devant les parlementaires MoDem, et devrait certainement renouveler son message devant ceux d’Horizons vendredi. Mais son avertissement a pris une résonance particulière en Seine-et-Marne, après la publication lundi dans Libération d’une tribune sur l’immigration qui a enflammé les esprits.

    Clivage à dépasser

    Signée par le président de la commission des Lois, Sacha Houlié (Renaissance), avec 34 autres élus, issus de la majorité, du centre et de la gauche hors LFI, le texte appelle notamment à la régularisation des étrangers en situation irrégulière travaillant dans les métiers « en tension » qui ont du mal à recruter.



    Certains députés, notamment sur le flanc droit de la majorité, ont jugé sévèrement cette initiative, au risque de réactiver un clivage droite/gauche que le macronisme entend dépasser.

    Problème de « méthode »

    Si la tribune ne pose pas de problème « sur le fond » aux députés Renaissance, plusieurs d’entre eux ont pointé mercredi un problème de « méthode », lors de la réunion du groupe des députés : « la photo (des députés) en Une de Libération, le fait de le faire dans son coin, d’aller chercher des partenaires qui ne voteront pas le texte », a détaillé un des participants sous couvert d’anonymat à l’AFP.

    Auprès de la presse Houlié a continué d’assumer sa démarche, qui fait « vivre le en même temps macronien », et est selon lui vu d’un « bon œil » à Matignon. Au-delà de ces échanges parfois acides, la majorité s’interroge toujours sur les voies et moyens de faire adopter ce texte, faute de majorité. Le député Guillaume Kasbarian a remis sur la table la possibilité de scinder le texte en deux, avec l’espoir que la droite vote le volet expulsion, et la gauche le volet régularisation.

    Retour des 49.3

    D’autres députés se montrent ouverts à ce qu’une partie du texte passe par voie réglementaire. « Est-ce que c’est efficace d’aller plus vite avec une circulaire, c’est au gouvernement de l’estimer », a dit le président du groupe Renaissance, Sylvain Maillard, à l’AFP, imaginant que le ministre de l’Intérieur puisse s’engager « au banc » sur le contenu de cette circulaire.



    Le 49.3 apparaît donc à certains comme un chemin possible, avec l’idée que la gauche ne voterait pas une motion de censure de la droite sur le sujet migratoire.

    « Renforcer le travail transpartisan »

    En clair, la tâche s’annonce ardue pour Élisabeth Borne, qui reçoit aussi à Matignon les chefs de partis et groupes parlementaires, très divisés sur le sujet. Sans modification de la Constitution, « il ne se passera rien », a mis en garde Olivier Marleix (LR), quand Olivier Faure (PS) refuse tout « accord avec les LR ».

    Des 49.3, il devrait de nouveau en pleuvoir sur les textes budgétaires qui seront examinés à l’Assemblée cet automne, et dès le 27 septembre sur la loi de programmation des finances publiques. « Si je n’utilise pas le 49.3 de gaîté de cœur, je refuse plus encore l’immobilisme », a dit la Première ministre dans son discours. « Nous ne laisserons pas la France sans budget », a-t-elle lancé sous les applaudissements.

    Borne a néanmoins encouragé les députés à « renforcer le travail transpartisan », afin de parvenir à des majorités sur les textes de loi.