«Sachez, madame la maire de Lodi, qu’en Europe, on ne trie pas les enfants selon leur origine»

Dans une tribune au Parisien - Aujourd’hui en France, les maires français et allemand de Fontainebleau et de Constance, dont les villes sont jumelées avec Lodi, appellent l’élue italienne à abandonner des mesures visant les enfants d’origine étrangère.

La mairie de Lodi demande aux enfants d’origine extracommunautaire de justifier de ne posséder aucun bien hors d’Italie, sans quoi ils se voient appliquer des tarifs plus élevés pour la cantine, le transport ou l’aide aux devoirs.
La mairie de Lodi demande aux enfants d’origine extracommunautaire de justifier de ne posséder aucun bien hors d’Italie, sans quoi ils se voient appliquer des tarifs plus élevés pour la cantine, le transport ou l’aide aux devoirs. LP/Olivier Boitet

    Frédéric Valletoux, maire de Fontainebleau et Uli Burchardt, maire de Constance.

    « Parce que nos villes de Fontainebleau, en France, et de Constance, en Allemagne, sont jumelées avec la ville de Lodi, en Italie, nous sommes particulièrement touchés par les événements qui s'y déroulent. Notre homologue italienne a décidé d'imposer aux habitants non communautaires de justifier du fait qu'ils ne possèdent ni biens ni propriétés dans leurs pays d'origine, des pays parfois en guerre ou en état de chaos administratif. A défaut, il leur est appliqué les tarifs les plus élevés pour la cantine, le transport et l'aide aux devoirs de leurs enfants.

    En exigeant l'impossible, à dessein, cette décision revient de facto à exclure, selon la presse, 300 enfants de la restauration et des transports scolaires. Cette mesure s'inscrit dans un contexte national particulier et vient mettre en application, localement et très concrètement, un programme politique xénophobe et discriminatoire. Ici, il frappe lâchement en s'en prenant au premier chef à des enfants. Nous, nous considérons qu'au XXIe siècle, en Europe, on ne trie pas les enfants selon leur pays d'origine.

    Le jumelage entre villes a été un acte essentiel de la réconciliation des peuples européens au lendemain de la Seconde Guerre mondiale qui nous déchira. Le jumelage n'est pas qu'un geste symbolique, un simple message de paix et de fraternité. C'est un acte concret, qui tisse des liens entre institutions, associations et populations de villes européennes. Souvent d'ailleurs, les actions communes sont à destination de la jeunesse. Le jumelage est fondé sur les valeurs de l'Europe, au premier rang desquelles le respect de la personne humaine, la fraternité et l'humanisme.

    Nous voyons en Italie l'action publique revêtir les habits des heures les plus sombres de notre histoire. Ce qui se passe dans ce pays frère, cofondateur de l'Europe, nous concerne, nous interpelle et aujourd'hui nous préoccupe. Nous ne voulons pas nous ériger en procureurs, ni en juges, mais à travers nos liens de jumelage, à travers la promotion que nous en faisons auprès de nos populations et des élèves de nos écoles, nous tenons à rester fidèles aux valeurs européennes qui nous animent.

    Nous appelons donc notre homologue, Mme la maire de Lodi, à revenir sur sa décision et à mettre un terme à la situation indigne dans laquelle, dans les écoles de sa ville, certains enfants bénéficient d'un repas à la cantine, alors que d'autres, du fait de leur origine, seraient traités à part et moins bien. Nous ne pouvons qu'être solidaires de la population de Lodi et des nombreux Italiens qui ont marqué leur soutien à ces enfants en paroles et en actes. »