Seine-et-Marne : un braqueur condamné après avoir tué un ado dans un accident

La Renault Mégane, qui fuyait les gendarmes, s’était encastrée dans un camion. Son conducteur et quatre autres jeunes venaient de braquer une bijouterie. Un de ses passagers, âgé de 16 ans, était décédé.

 Pierre-Levée, le 16 juin 2015. La course-poursuite s’était terminée en drame : la voiture des braqueurs avait percuté un camion, tuant Sofiane Hamrouni, 16 ans, assis à l’arrière de la Mégane.
Pierre-Levée, le 16 juin 2015. La course-poursuite s’était terminée en drame : la voiture des braqueurs avait percuté un camion, tuant Sofiane Hamrouni, 16 ans, assis à l’arrière de la Mégane. LP/Rémy Calland

    « J'ai perdu mon fils. J'ai perdu ma santé. Je suis mort. Je n'arrive plus à enseigner, on m'a déclaré inapte. On n'est plus la même famille. On n'est plus le même couple » : c'est un père de famille ravagé par la douleur qui s'est exprimé à la barre du tribunal correctionnel de Meaux, ce lundi.

    Son fils, Sofiane, a perdu la vie à l'âge de 16 ans, dans un accident de la circulation survenu le 16 juin 2015, à Pierre-Levée. L'adolescent était à l'arrière d'une Renault Mégane qui s'est encastrée dans un camion arrivant en face. Pas n'importe quelle Mégane puisque celle-ci transportait les cinq braqueurs qui venaient d'attaquer la bijouterie Jusseaume, à La Ferté-sous-Jouarre.

    La voiture fuyait celle des gendarmes, qui se trouvait loin derrière. A tel point que les militaires n'ont pas vu l'accident. Vitesse excessive, feux tricolores grillés, rues prises à contresens… « Le choc s'est passé dans un virage où il faut absolument rouler à 25-30 km/heure », a indiqué le routier. « J'ai regardé le passager avant qui avait du sang sur lui. J'ai tourné la tête et il y a eu le choc », a expliqué Elias Daheur.

    Cet habitant de Champigny-sur-Marne de 25 ans a été condamné, lundi soir, à trois ans de prison, dont deux ferme, avec mandat de dépôt, pour homicide involontaire par conducteur non titulaire d'un permis de conduire et refus d'obtempérer. Le parquet avait requis trois ans de prison, dont trente mois ferme.

    Elias Daheur - qui venait de sortir de prison et avait déjà été condamné huit fois - avait été recruté comme chauffeur la veille du braquage : des faits pour lesquels il a été condamné par la cour d'assises de Seine-et-Marne, à Melun, à six ans d'emprisonnement, en mai dernier.

    « On m'a dit : il faudra être rapide, tu seras le chauffeur », a raconté le jeune homme, dont la honte a été perceptible tout au long de l'audience. Il en bredouillait. Le braquage a été particulièrement violent, puisque le bijoutier a été frappé à coups de masse sur le trottoir et que la police municipale de La Ferté-sous-Jouarre a tiré des coups de feu.

    « Tout le monde criait dans la voiture : accélère, bombarde. La peur, c'était pas de se faire prendre, c'était de se faire tirer dessus », a raconté Elias Daheur. Son avocate Me Marie Monsef est revenue sur son état d'esprit à l'époque : « Mon client était en révolte. En acceptant de servir de chauffeur, il a fait un choix sur un coup de tête ».

    Sofiane Hamrouni, 16 ans, a perdu la vie dans la collision. DR
    Sofiane Hamrouni, 16 ans, a perdu la vie dans la collision. DR LP/Rémy Calland

    LA FAMILLE DE SOFIANE VEUT LA VÉRITÉ

    « Nous voulons connaître la vérité, savoir pourquoi Sofiane est parti ce jour-là », a martelé sa mère à l'audience. Raison pour laquelle son mari, son fils aîné et elle-même ont saisi le doyen des juges d'instruction d'une plainte avec constitution de partie civile, pour « provocation d'un mineur à commettre un crime » en juin 2016.

    Ce lundi, leur avocate Me Chloé Bonnet a demandé - en vain - le renvoi du procès, pour que soient jugés à la même date l'homicide involontaire et le délit de provocation. L'occasion pour elle de décrire un imbroglio juridique.

    En 2015, le parquet de Meaux avait ouvert une information judiciaire pour « vol à main armée » et une enquête préliminaire pour « homicide involontaire », scindant l'affaire en deux volets. Sauf que pour sa famille, Sofiane a été « entraîné ». D'où leur saisine d'un juge d'instruction en 2016. Mais rien ne s'est passé : les cabinets d'instruction sont surchargés, aucun magistrat ne s'est occupé du dossier.