Ecole dès 3 ans : pourquoi ce n’est pas anodin

La loi pour « une école de la confiance » de Jean-Michel Blanquer est présentée ce lundi. Parmi les principales mesures l’instauration de l’école obligatoire à trois ans dès septembre prochain, contre six aujourd’hui.

 L’instruction devrait être obligatoire à partir de 3 ans pour tous les enfants dès la rentrée de septembre 2019.
L’instruction devrait être obligatoire à partir de 3 ans pour tous les enfants dès la rentrée de septembre 2019. PHOTOPQR/Le Progrès

    La mesure devrait être effective à la rentrée 2019. En attendant cette échéance, le ministre de l'Education nationale, Jean-Michel Blanquer, présente ce lundi au Conseil supérieur de l'éducation le texte « Loi pour une école de la confiance » dans lequel est comprise une petite révolution : rendre la scolarisation obligatoire dès l'âge de 3 ans, contre 6 actuellement. Ou plus précisément, rendre obligatoire dès 3 ans, l'instruction ( les parents pourront ainsi toujours décider de faire classe à leurs enfants ). Pourquoi cette décision n'est pas seulement symbolique alors que 97 % des enfants de 3 ans sont déjà scolarisés en maternelle?

    Priorité au langage

    80 % des décrocheurs du système scolaire, c'est-à-dire ceux qui le quitteront à 16 ans sans savoir bien lire, écrire, compter, sont déjà en difficulté au CP. Or, l'apprentissage de la lecture qui se fait à ce moment-là nécessite comme prérequis une bonne pratique du langage. Vers 2 ans, l'enfant communique avec 20 mots. A 6 ans, le chiffre monte à 2 500. « L'immersion langagière » dans ces premières années de la scolarité est donc un enjeu fondamental pour le ministère de l'Education Nationale.

    Le Président de la République, Emmanuel Macron, n'avait pas dit autre chose, fin mars aux Assises de la maternelle, lorsqu'il annonce qu'il veut rendre obligatoire l'école dès 3 ans et faire de l'école maternelle « l'école du langage ». « Le langage, dont la place essentielle a été réaffirmée dans le programme de 2015, est à la fois le produit et la source (des) apprentissages », rappelaient d'ailleurs dix associations et organisations syndicales dans une lettre ouverte au ministre, à la veille de ces Assises.

    Lutter contre les inégalités

    La maternelle est déjà aujourd'hui plébiscitée. Mais quid des 25 000 petits (soit 3 %) qui ne la fréquentent pas ? Ils sont diversement répartis sur le territoire. Le taux des scolarisés dès 3 ans est ainsi de moins de 70 % dans certains départements d'Outre-mer, de 87 % en Corse et de 93 % à Paris.

    A noter que tous les enfants de 3 à 5 ans ne sont pas accueillis en maternelle malgré le souhait des parents. Le manque de places à Mayotte et en Guyane, par exemple, contraint à scolariser en priorité les enfants de 5 ans, puis de 4 ans, puis de 3 ans. Force est de constater que cette carte des disparités territoriales coïncide avec celle des moins favorisés.

    Les études montrent pourtant, sans ambiguïté, que la maternelle profite aux enfants qui la fréquentent régulièrement dès 3 ans, mais surtout que ceux qui en retirent le plus grand bénéfice sont ceux venant des milieux les plus modestes.

    Un cerveau prêt à apprendre

    Abaisser à 3 ans l'âge obligatoire de l'entrée à l'école, c'est aussi reconnaître l'importance des premières années de l'enfant pour les apprentissages. Lors des Assises de la maternelle, Emmanuel Macron le rappelait : « La plasticité du cerveau avant 6 ans est particulièrement propice à l'assimilation du langage, or […] c'est à ce moment que les décrochages les plus profonds se fabriquent ». Un diagnostic que l'on doit aux recherches en neurosciences.

    La plasticité cérébrale ? Autrement dit, le fait que le cerveau va se construire en fonction de son environnement et des zones qui sont sollicitées. Cette obligation dès 3 ans serait donc une façon d'ancrer dans le marbre le rôle clé de l'école maternelle dans le parcours scolaire français, et de balayer l'idée qu'elle ne serait qu'une simple préparation à l'école élémentaire.

    Les autres mesures du projet de loi

    Le projet de loi « pour une école de la confiance », qui va être dévoilé aujourd'hui, comprend 24 mesures au total. Outre l'instruction obligatoire dès 3 ans, un nouveau Conseil d'évaluation de l'école est prévu pour évaluer l'organisation et les résultats de l'enseignement scolaire. Il remplacera l'actuel Conseil national d'évaluation du système scolaire (CNESCO). Les assistants d'éducation, autrement dit les surveillants, inscrits dans une formation préparant aux concours, pourront aussi accéder à des fonctions d'enseignement. Par ailleurs, la réforme de la formation des enseignants est aussi inscrite avec le changement de nom des ESPE (Ecoles supérieures du professorat et de l'éducation) qui deviendraient les INSP (Instituts nationaux supérieurs du professorat) avec une modification de la procédure de nomination des directeurs qui seront choisis par les ministres, et non plus par la procédure universitaire actuelle.