Homophobie, transphobie… Ces nouveaux chiffres qui inquiètent

Dans son rapport annuel rendu public ce mercredi, l’association SOS Homophobie s’alarme d’une montée inédite des discriminations et de la violence envers les personnes LGBTI (lesbiennes, gays, bi, trans et intersexes). Du jamais-vu en dix ans.

Une grande manifestation s'est tenue le 5 mai pour dénoncer la vague actuelle de violences transphobes. LP/Delphine Goldsztejn
Une grande manifestation s'est tenue le 5 mai pour dénoncer la vague actuelle de violences transphobes. LP/Delphine Goldsztejn

    Patrick, 58 ans, n’arrive plus à travailler. Dans l’hôpital parisien où il est agent de service, il a été victime d’homophobie. Il est en arrêt maladie depuis sept mois. Durant des années, Selma, 42 ans a subi la violence de son conjoint. « T’es qu’un travelo », lui répétait-il, avant de lui asséner des coups de poing en pleine rue. Titouan, 29 ans, a été injustement banni de la plate-forme de messagerie Discord. Il venait de signaler des insultes homophobes.

    Ce type de témoignages, SOS Homophobie en reçoit de plus en plus. Son rapport annuel sur les discriminations, rendu public ce mercredi 15 mai, en comptabilise 2 085 en 2023 via sa ligne téléphonique anonyme, son tchat, ses formulaires, contre 1 506 en 2022. Du jamais-vu depuis dix ans. « Nous sommes extrêmement inquiets, alerte Julia Torlet, présidente et porte-parole de l’association. On a l’impression que les braises de la LGBTI phobie sont allumées et que le feu est prêt à prendre. »

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    Le rapport note la persistance et l’ancrage de l’exclusion et de la haine à l’encontre des personnes lesbiennes, gays, bis, trans et intersexe (LGBTI) en France. Il n’en donne qu’une illustration partielle, les chiffres n’étant pas exhaustifs. L’association regrette l’absence de données nationales sur ces violences. « Comptabiliser, c’est extrêmement important pour pouvoir mesurer, avoir une vue d’ensemble et mettre en place des actions », rappelle Julia Torlet.

    D’après le rapport, 45 % des discriminations et de la haine s’exercent contre les gays. « On n’en veut pas ici ! » avait asséné un client d’un bar parisien à Amos, 20 ans, le 15 mars. Puis l’individu, rejoint par d’autres, s’était jeté sur lui, le frappant à coups de pied et de poing. « J’ai à nouveau été puni pour mon homosexualité », nous confiait-il, la paupière toujours gonflée et l’œil rouge, trois semaines après son agression traumatisante.



    L’association se dit aussi très préoccupée par « la vague de transphobie que nous sommes en train de vivre ». La porte-parole met en garde contre « une banalisation et une légitimation de la parole haineuse », conséquence « d’un repli conservateur ». Dans son viseur : le livre polémique « Transmania », de Dora Moutot et Marguerite Stern, deux féministes désavouées par leur camp. SOS Homophobie a porté plainte contre ce pamphlet anti-trans, paru mi-avril, devenu numéro 1 des ventes sur Amazon. Un mauvais signal selon l’association, qui regrette la tribune médiatique offerte aux autrices.

    SOS Homophobie dénonce une proposition de loi LR jugée transphobe

    L’offensive ne s’arrête pas là. Elle est menée, dit SOS Homophobie, par des groupes extrêmement organisés et occasionne un « débat qui ne devrait pas avoir lieu. » L’association dénonce aussi la proposition de loi LR visant à interdire les transitions de genre aux mineurs qui arrive au Sénat le 28 mai. « La transphobie n’est plus seulement dite, elle est mise au vote », décoche Julia Torlet.

    Ugo Ziccarelli, co-référent de la commission rapport annuel, appelle à un sursaut face à la souffrance des personnes LGBTI. « Les bénévoles de la ligne d’écoute sont bouleversés par ce qu’ils entendent. »