SOS Méditerranée : Ocean Viking, un navire «plus adapté» au sauvetage des migrants

L’Ocean Viking, qui doit prendre la mer dans quelques jours, succède à L’Aquarius qui avait secouru près de 30 000 migrants en deux ans et demi.

 Sophie Beau, cofondatrice et directrice générale de SOS Méditerranée devant l’Ocean Viking, le nouveau bateau de sauvetage de l’ONG, en partenariat avec Médecins sans Frontières.
Sophie Beau, cofondatrice et directrice générale de SOS Méditerranée devant l’Ocean Viking, le nouveau bateau de sauvetage de l’ONG, en partenariat avec Médecins sans Frontières. AFP/Clément Mahoudeau

    Il est le successeur de l'Aquarius. Ocean Viking est le second bateau de sauvetage des ONG SOS Méditerranée et Médecins sans Frontières à naviguer sur la mer que des milliers de migrants tentent de traverser chaque année, et dans laquelle ont péri plus de 400 migrants depuis le 1er janvier dernier.

    En décembre 2018, face aux pressions internationales, l'Aquarius avait été forcé d'abandonner ses missions de sauvetage après avoir secouru près de 30 000 personnes. Cette fois, en plus d'être plus grand et plus rapide, Ocean Viking est mieux préparé. « On a tout fait pour limiter les risques », explique au Parisien Sophie Beau, cofondatrice et directrice générale de SOS Méditerranée.

    Un pavillon norvégien pour « plus de sécurité »

    Changement majeur : Ocean Viking évoluera sous pavillon norvégien, c'est-à-dire qu'il naviguera selon les régulations du pays scandinave. « La Norvège est un Etat qui a une très grande tradition du sauvetage en mer et qui est un très grand défenseur des droits humains dans le monde », détaille Sophie Beau. « On suppose que cela va permettre d'être plus en sécurité. »

    Depuis l'arrêt des opérations de L'Aquarius, qui était lui enregistré sous les pavillons du Panama et de Gibraltar, l'ONG s'était mis en tête de retrouver un navire immatriculé dans un pays différent pour pouvoir poursuivre ses opérations de sauvetage. « On imagine que la Norvège ne fera rien pour aller à l'encontre de notre mission, pas comme l'Italie par exemple », explique Sophie Beau.

    Matteo Salvini, Premier ministre italien, refuse régulièrement l'entrée des bateaux d'ONG dans les ports de la péninsule. Récemment, il avait même qualifié l'activiste allemande Carole Rackete d'« emmerdeuse ». Celle-ci avait été arrêtée après avoir forcé l'entrée d'un port à bord du bateau Sea-Watch 3, transportant des centaines de migrants.

    Une hostilité généralisée qui s'est avérée être un frein lors de l'acquisition du successeur de L'Aquarius. « Il y a une telle criminalisation des ONG de sauvetage… Ce n'est pas évident de trouver des armateurs qui sont prêts à nous louer un bateau », déplore Sophie Beau.

    Après plusieurs réponses à l'appel d'offres de l'ONG, l'Ocean Viking a finalement été repéré à Bergen, au large de la Norvège. Comme le raconte France Inter, il s'agit d'un ancien navire d'assistance et de ravitaillement de plateformes pétrolières, qui a été reconditionné en Pologne. Il mesure plus de 70 m et peut atteindre une vitesse de 14 nœuds, contre 11 pour l'Aquarius.

    « Plus adapté » au sauvetage et à l'accueil des migrants

    En 32 mois de mission, six naissances avaient eu lieu à bord de l'Aquarius. « Beaucoup de femmes migrantes que l'on accueille sont enceintes », explique Sophie Beau. Pour cela l'hôpital de l'Ocean Viking « est plus grand » afin que les sages-femmes de Médecins sans Frontières, partenaire médical de SOS Méditerranée, puissent prendre en charge les femmes qui en ont besoin.

    Les équipements du nouveau bateau de SOS Méditerranée. AFP/Clément Mahoudeau
    Les équipements du nouveau bateau de SOS Méditerranée. AFP/Clément Mahoudeau AFP/Clément Mahoudeau

    Les zones d'accueil ont également été agrandies et davantage délimitées. « Sur le pont, des conteneurs conçus pour l'accueil des rescapés femmes et hommes ont été assemblés », décrit Sophie Beau. « Sur l'Aquarius il y avait l'abri qui était dédié aux femmes, mais les hommes étaient accueillis sur le pont sous des bâches ». La cofondatrice de SOS Méditerranée complète : « On a un aménagement plus conséquent aussi en matière d'hygiène, avec davantage de douches et de toilettes ».

    « On est parti de nos besoins pour ajouter tous ces équipements au navire, tout est plus adapté », résume la cofondatrice de SOS Méditerranée. Aujourd'hui, même si elle n'exclut pas d'en secourir un plus grand nombre, elle dit pouvoir accueillir « 200-300 personnes sans trop de difficultés ». « Ce n'est pas souhaitable d'en accueillir davantage pour des raisons de gestion de la foule », explique-t-elle.

    14 000 euros par jour

    Toutes ces améliorations ont un prix : une journée d'opération à bord de l'Ocean Viking coûte 14 000 euros, contre 11 000 euros pour L'Aquarius. C'est pour cela que l'ONG SOS Méditerranée a renouvelé son appel aux dons. « Nous ne comptons que sur la générosité des citoyens. Nos moyens ne sont pas illimités », explique Sophie Beau.

    L'Ocean Viking prendra la mer dans quelques jours, le temps de régler « quelques derniers petits détails logistiques ». La durée de l'opération est aujourd'hui indéterminée. « Tant qu'il y a des gens qui se noient, tant qu'il n'y aura pas de flotte de sauvetage européenne ni aucun dispositif d'état, SOS Méditerranée continuera ses opérations », conclut Sophie Beau.