On n'est pas là pour se faire engueuler

On n'est pas là pour se faire engueuler

    « Pardon, excusez-moi, pardonâ?¦ » L'homme, si impatient, qui tente de tailler son chemin dans la rame de métro est celui qui, quelques secondes plus tôt, faisait l'aumône à l'autre bout en expliquant, entre autres arguments, que cela l'aiderait à rester propre. Le genre de discours, il faut bien le reconnaître, qui sur nous, passagers au coeur endurci et plus sûrement blasés, a tendance à couler comme l'eau sur les plumes d'un canard. Le grand dadais qui lui bloque le passage semble sourd à la supplique agacée du quémandeur qui veut passer.

    Et quand ce dernier finit par forcer le barrage, il lâche en même temps un sympathique : « Il faut vous le demander combien de fois ? » Le vouvoiement reste de rigueur mais la charge jette un froid. Et ce n'est qu'un aperçu. « Un euro, ça vous aurait ruiné ? » lance l'homme en sortant de la rame, à l'intention de tous les autres passagers visiblement insensibles à son charme. C'est malheureux mais nous, habitués du métro, sommes devenus difficiles ; pour avoir une chance de toucher la mise, les mendiants devront maintenant montrer leur meilleur visage.