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Quand le tout-marchand et la consommmation isolent : Matthieu Chaigne raconte la "France des solitaires"

Entretien

Propos recueillis par

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Des pavillons aux maisons bourgeoises avec digicode, en passant par les Ehpad, Matthieu Chaigne, directeur associé à la société BVA Nudge Consulting, brosse un portrait de la « France des solitaires », dans un essai qui pointe le remplacement des rites républicains par des rites de consommation, et l’isolement généré par la norme du tout-marchand.

Marianne : « À la société d’ordres et de services de l’Ancien Régime s’est substituée une nouvelle classification fondée sur la richesse » écrivez-vous. Quel est ce modèle d’individu rationnel, utilitariste, tourné vers ses profits dont vous parlez ?

Matthieu Chaigne : Nous assistons à l’avènement d’une société d’individus-poussières, dont le modèle est l’homo œconomicus – l’individu rationnel, utilitariste et tourné vers ses profits. Cette nouvelle classification sociale fait de l’émancipation de soi une condition d’accès au bonheur. Ce paradigme mène les Français dans une double impasse. La première est l’atomisation totale d’une société composée de personnes vivant seules ensemble. Les individus ne forment plus une communauté d’intérêts, mais de destin. La seconde impasse est le communautarisme. Par un effet boomerang, elle fonctionne comme une réponse à cette atomisation de la société. L’État ne parvenant pas à générer un sentiment de communauté nationale, des individus se rassemblent en des îlots de microcommunautés, tels que les cercles islamistes ou, dans une tout autre sphère, les survivalistes. Ces communautés instituent leurs propres rites, lesquels se substituent progressivement à ceux qui étaient auparavant établis par l’État.

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Natacha Polony, directrice de la rédaction de Marianne