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Tunisie. Les salafistes contre la révolution

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Tunisie. Les salafistes contre la révolution

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On ne les avait jamais entendus tout au long des semaines sanglantes qui ont conduit à la chute de Ben Ali. Mais, aujourd'hui, alors que la révolution tunisienne affronte son premier grand défi - les élections libres , les salafistes donnent de la voix, de la barbe, de l'invective. Et du voile intégral. Ce sont eux qui, cet été, ont attaqué un cinéma, puis la faculté de Sousse il y a dix jours, sous prétexte qu'on refusait d'y inscrire une étudiante en niqab. Eux qui s'en sont pris à la chaîne de télévision Nessma TV, coupable d'avoir diffusé Persepolis, le film adapté de la bande dessinée de Marjane Satrapi. Avant de saccager la maison du directeur de Nessma, Nabil Karoui. C'est à cause d'eux que, dans les quartiers périphériques de Tunis, les parents déconseillent à leurs filles de porter un T-shirt légèrement décolleté. A cause des salafistes, ou des islamistes ? La frontière est floue. Les salafistes du mot arabe salaf, «ancêtre» - affirment qu'ils veulent revenir à la pureté du temps de Mahomet. Ce qui implique une lutte sans merci contre les 99 % impurs de leur environnement ! Vis-à-vis d'eux, en Tunisie, le parti religieux Ennahda alterne condamnation de principe et gronderie bienveillante. Air favori des cadres du parti islamiste : «Les salafistes ont simplement besoin d'un peu d'éducation...» Mais ce sont bel et bien les actions commandos des salafistes qui viennent d'entraîner des poursuites judiciaires contre Nessma TV... à la grande satisfaction d'Ennahda. Le salafisme serait, au fond, un islamisme extrémiste. Quand il va jusqu'au bout, il devient jihadiste, comme ce fut le cas en Algérie pendant la guerre civile. Redescendu du maquis avec la politique de réconciliation du président Bouteflika, le salafiste rend son couteau, mais garde sa barbe d'inquisiteur. Faute d'avoir pu soumettre politiquement la rue, il va régner sur son comportement. La rue algérienne est aujourd'hui soumise aux salafistes, de même que la rue égyptienne. La rue tunisienne résiste. C'est un enjeu majeur de la contre-révolution religieuse.

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Natacha Polony, directrice de la rédaction de Marianne