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Alors que la campagne de vaccination pour la troisième dose bat son plein en France, certains ouvrent déjà la possibilité d'une quatrième dose.
Alors que la campagne de vaccination pour la troisième dose bat son plein en France, certains ouvrent déjà la possibilité d'une quatrième dose.
NurPhoto via AFP

Covid : pourquoi une quatrième dose de vaccin n'est pas à exclure

Rebelote

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La campagne de rappel pour la vaccination contre le coronavirus bat son plein… Et voilà que certains évoquent déjà la possibilité d’une quatrième dose de vaccin anti-Covid, qui ne remettrait pas pour autant en cause l’efficacité de la troisième. Explications.

Jamais deux sans trois… Jamais trois sans quatre ? « Il est possible que nous ayons besoin à un moment donné d'une quatrième dose », assumait Jean-François Delfraissy, président du Conseil Scientifique, le 8 décembre, lors d’une audition par le Sénat.

L'immunologue français n’est pas le seul à avoir mis la quatrième dose sur la table. En Israël, un responsable du ministère de la Santé a récemment estimé qu’il est possible qu’elle « arrive en janvier ou en février », alors que la majorité du pays a déjà reçu sa dose de rappel. La quatrième injection pourrait même être une aubaine pour Sanofi : le laboratoire français a annoncé ce 15 décembre un nouveau retard dans le développement, avec le britannique GSK, de son vaccin anti-Covid à base de protéine recombinante… Arrivé trop tard pour freiner la vague actuelle, il pourrait donc servir « pour une quatrième dose », a lancé son dirigeant Olivier Bogillot.

Chez Pfizer aussi, on s’y prépare : début novembre, le directeur scientifique du groupe évoquait la possibilité de faire une étude sur l'impact d'une quatrième dose du vaccin et éventuellement d'un rappel tous les ans. À quoi servirait une quatrième dose de vaccin anti-Covid, et quelle est la probabilité qu’elle soit administrée en population générale ? Éléments de réponses.

Quelle efficacité pour la dose de rappel ?

Première raison qui pourrait conduire à la nécessité d’une quatrième dose : si le virus continuait à circuler pendant plusieurs mois et que l'on s'apercevait d'une baisse d'’efficacité de la troisième dose au fil du temps. « Pour l'instant, c'est un rappel, mais peut-être qu'il en faudra un quatrième, je ne sais pas. Je ne sais pas combien de temps va durer le rappel », a poursuivi devant le Sénat le président du Conseil scientifique, à propos de la troisième injection.

Réponse d’Olivier Véran dans les colonnes du Parisien le 11 décembre : « Je ne vais pas réagir à chaque fois qu’un scientifique émet une idée, ce n’est pas mon rôle. Sincèrement, chacun peut comprendre que l’urgence est à la dose de rappel. C’est là que doit aller notre énergie, et notre mobilisation », a-t-il insisté, avant d’ajouter : « Évidemment, si dans quelques semaines, on observait une baisse progressive de l’efficacité du rappel, et que le virus circulait à nouveau beaucoup, je n’aurais aucune difficulté à expliquer pourquoi il faut une quatrième dose. Pour l’instant, ce n’est pas à l’ordre du jour. »

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Il est encore trop tôt, pour l’instant, pour conclure sur la durée de la protection fournie par la troisième dose. « On n’a pas encore assez de recul, il n’y a que le temps qui pourra nous le dire », confirme à Marianne l’infectiologue Jean-Paul Stahl. On sait que la troisième dose permet de rehausser l’efficacité contre l’infection et donc la transmission, mais aussi contre les formes graves. Mais les premières injections de rappel en population générale ont eu lieu il y a environ cinq mois – la campagne de rappel a commencé pour les plus de 60 ans en juillet en Israël, pionnier en la matière. Impossible de savoir si ce niveau de protection est encore élevé neuf, dix mois ou un an plus tard.

On peut simplement supposer que cette protection dure plus longtemps que celle fournie par la deuxième piqûre. « Ce rappel six mois après la deuxième dose induit une réponse durable et optimise l’efficacité du vaccin », expliquait récemment à Marianne Jean-Daniel Lelièvre, chef du service maladies infectieuses à l'Hôpital Mondor à Créteil (Val-de-Marne). Comme le niveau d’anticorps produits après le rappel est très élevé, il met davantage de temps à décroître. Même hypothèse pour Jean-François Delfraissy : « Il est possible aussi que le boost donné par la troisième dose soit tellement important qu'il soit durable dans le temps ». Bémol : même si l’efficacité du rappel durait très longtemps, l’arrivée de nouveau variant, à l’instar d’Omicron, pourrait rendre nécessaire l’injection supplémentaire d’une formule adaptée.

Comment s’adapter au variant ?

« On ne sait pas encore exactement à quel point le variant Omicron contourne l’immunité, poursuit le spécialiste des maladies infectieuses, Jean-Paul Stahl. Mais je pense que si quatrième dose il y a, ce sera pour des formules adaptées aux variants ». Cela ne montrerait en rien que les précédentes injections étaient inefficaces. Elles ont d’ailleurs permis de réduire drastiquement le nombre de décès pendant les quatrième et actuelle cinquième vague épidémique. Cela signifie plutôt que le virus continue d’évoluer.

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Pfizer et son partenaire BioNTech misent sur mars 2022 pour une formule adaptée à Omicron, délai auquel il faudrait ajouter toute la logistique de mise en place d’une nouvelle vaccination à grande échelle. Sera-t-elle nécessaire ? Une récente étude menée en Afrique du Sud estime que deux doses du vaccin Pfizer protègent à 70 % contre les formes graves liées à cette nouvelle souche, mais seulement à 30 % contre son infection. Une efficacité réduite, mais pas à néant : s'agissant du variant Delta, le vaccin est efficace à 93 % contre les cas sévères et à 80 % contre les contaminations.

Vers une vaccination annuelle ?

En dehors d'Omicron, l’émergence d’autres souches davantage aptes à contourner l’immunité est également possible. De là à envisager une vaccination annuelle, comme la grippe ? Les injections contre cette maladie hivernale sont menées chaque hiver, car les souches qui circulent d’une année sur l’autre ne sont pas les mêmes. « Mais on ne peut pas savoir si ce sera le cas pour le Sras-Cov-2 : pour la grippe, on a des décennies de recul, contre à peine deux pour ce virus », insiste l’infectiologue.

Reste alors simplement à accepter la part d’inconnu dans laquelle nous plonge l’évolution de ce coronavirus. « Dans une crise de ce type, il faut qu'on dise tout ce qu'on sait, et qu'on le mette sur la table, pour qu'on partage ce qu'on sait ou ne sait pas. Donc il est possible que nous ayons besoin à un moment donné d'une quatrième dose, pour rappeler, et dans quel délai, je ne le sais pas encore », a encore insisté Jean-François Delfraissy. Même son de cloche du côté de Jean-Paul Stahl : « Tout est de la pure hypothèse à ce stade. Mais il faut se préparer à tous les scénarios ». Même les pires !

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Natacha Polony, directrice de la rédaction de Marianne