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Olivier Véran et Jean Castex assument le choix d'un passe vaccinal à compter de janvier 2022.
Olivier Véran et Jean Castex assument le choix d'un passe vaccinal à compter de janvier 2022.
AFP

Du passe sanitaire au passe vaccinal : le revirement total du gouvernement

Montagnes russes sanitaires

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Lorsque la campagne vaccinale a débuté en France fin décembre 2020, l’exécutif avait promis de n'imposer ni la vaccination ni le passe vaccinal, afin de pouvoir se rendre dans certains lieux comme les restaurants ou cinémas. Un an plus tard, les discours ont radicalement changé.

Le 17 décembre 2021, Jean Castex a annoncé, à l’issue d’un Conseil de défense sanitaire, qu'un projet de loi devrait être discuté à la rentrée de janvier pour transformer le passe sanitaire en passe vaccinal. Autrement dit, « seule la vaccination sera prise en compte » pour pouvoir déjeuner ou dîner dans un restaurant, se rendre dans un lieu de culture, etc. Quant au test PCR et au certificat de vaccination, ils ne seront plus valides. On ne sait toujours pas si les adolescents de 12 ans et plus seront concernés, comme ils le sont actuellement par le passe sanitaire.

En parallèle, Élisabeth Borne a rencontré les représentants syndicaux ce lundi 20 décembre, afin de débattre de l’éventuelle obligation vaccinale qui pourrait finir par s’imposer à tous les salariés. Chronique d'un revirement spectaculaire.

Novembre 2020 à février 2021 : les propos rassurants

​​​​​​Le 24 novembre 2020, Emmanuel Macron prend la parole après la tenue d'un Conseil de défense. « Je ne rendrai pas la vaccination obligatoire », rassure-t-il. Le 27 décembre 2020, soit le lendemain du début de la campagne vaccinale, le président de la République se montre une nouvelle fois ferme sur ce que doit être la vaccination : une décision basée sur le volontariat, bien que vivement conseillée. « Je l’ai dit, je le répète : le vaccin ne sera pas obligatoire. Ayons confiance en nos chercheurs et médecins. Nous sommes le pays des Lumières et de Pasteur, la raison et la science doivent nous guider », insiste-t-il.

À l’époque, seuls les personnels soignants, les personnes âgées ou résidant en Ehpad, les pompiers, les aides à domicile peuvent se faire vacciner car ils sont considérés comme des publics prioritaires, qui se trouvent en première ligne. Entre-temps, Olivier Véran s'aligne logiquement sur le président. Ainsi, il déclare le 22 décembre sur TF1 : « La vaccination contre le coronavirus ne sera pas obligatoire, ni pour prendre un transport en commun, ni pour rentrer dans un restaurant. »

Rebelote deux mois plus tard, le 25 février 2021, en marge d’un Conseil européen. Emmanuel Macron rejette l’idée d’un futur passe vaccinal, paravent d’une obligation : « Si on arrive à rouvrir certains lieux, nous ne saurions conditionner leur accès à une vaccination, alors même que nous n’aurions pas ouvert la vaccination aux plus jeunes. » Le 12 mai 2021, le feu vert à la vaccination est donné pour toutes les personnes de 18 à 49 ans.

Au printemps, l’ombre d’une obligation commence à planer. Le Premier ministre et le ministre de la Santé incitent de plus en plus fortement les Français à recevoir le sérum. Le 24 juin, Jean Castex et Olivier Véran se déplacent dans le département des Landes, où le variant Delta circule rapidement, afin d’inciter les soignants à se faire vacciner. « La vaccination, c’est encore une fois la planche de salut indispensable », soutient le Premier ministre, tout en glissant que le gouvernement prendra « ses responsabilités » si le personnel médical ne se prête pas de bonne grâce aux injections.

Juillet 2021 : le grand revirement

Le véritable coup de tonnerre a lieu durant l’été 2021, plus précisément avec l’allocution du président le 12 juillet. La vaccination obligatoire des soignants (et du personnel paramédical) est décrétée, ainsi que la création du passe sanitaire. Les adolescents de 12 ans devront également l'avoir en leur possession au 30 septembre. Autre changement de taille : Emmanuel Macron n’exclut plus l’obligation vaccinale pour l’ensemble des citoyens. « En fonction de l’évolution de la situation nous devrons sans doute nous poser la question de la vaccination obligatoire pour tous les Français. »

La semaine suivante, Jean Castex confirme les nouvelles mesures et obligations, tout en précisant qu’une semaine de tolérance sera observée pour le passe sanitaire. Il tempère aussi la grogne qui traverse une partie de la population, en rappelant qu’il n’y aura pas de contrôle d'identité des clients par les restaurateurs, seulement de leur passe. Sur ce point, l’exécutif n’a pas varié.

Décembre 2021 : l'obligation vaccinale « déguisée »

Après le temps du passe sanitaire quasiment généralisé s'annonce celui du passe vaccinal.

Le 25 novembre, Olivier Véran promet que le gouvernement ne mettra pas en place ce certificat largement synonyme d’obligation vaccinale. « Il y a toujours la possibilité de se faire tester », persiste le ministre de la Santé lors de son point Covid ce jour-là.

Il lui faudra moins d’un mois pour affirmer finalement le contraire. « Le passe vaccinal est une forme déguisée d’obligation vaccinale », lâche-t-il sans ambages, le 18 décembre, dans un entretien à Brut. Il va même plus loin en louant les bienfaits de ce nouveau passe : « Empêcher les gens d’aller dans des bars, des restaurants, des lieux qui reçoivent du public s’ils ne sont pas vaccinés, c’est plus efficace que leur mettre une amende de 100 euros quand on les attrape dans la rue. » La veille, Jean Castex n'a pas pris de gants non plus : « Nous assumons de faire peser la contrainte sur les non vaccinés. » Des propos sans équivoque.

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Natacha Polony, directrice de la rédaction de Marianne