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Claire Keim : « J'ai du mal à comprendre cette fascination pour les enquêtes policières »

Dans «L'Eclipse», Claire Keim est Johanna Croiset, gendarme dans l'Aubrac.
Dans «L'Eclipse», Claire Keim est Johanna Croiset, gendarme dans l'Aubrac. © Eloïse Legay - Carma Films - FTV
Emilie Cabot , Mis à jour le

Dans la série « L’Éclipse », diffusée sur France 2, Claire Keim mène l’enquête avec Anne Charrier dans l’Aubrac pour un huis clos à ciel ouvert. Rencontre.

Paris Match. Vous dites avoir hésité avant de tourner cette série. Pourquoi ?
Claire Keim. Quand « L’Éclipse » est arrivée à moi, j’étais encore en tournage sur la saison 2 de « Vise le cœur », une série policière de TF1. J’étais au bout de mes forces. Quand on m’a dit qu’il s’agissait d’une série policière, j’ai d’abord dit non. Il fallait vraiment que je prenne du temps pour moi, que je vive des choses, que je sois un peu en réaction et pas dans l’action.

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Qu’est-ce qui vous a fait changer d’avis ?
J’ai commencé à lire, j’ai trouvé ça bien et l’info capitale est tombée : il y avait Anne Charrier au casting. J’étais obligée d’y aller. Je ne peux pas ne pas tourner avec cette fille que j’aime trop, sans la connaître pour autant. Elle représente un peu ce que j’aimerais être. Elle a une liberté folle. Aussi, le metteur en scène, Franck Brett, est venu me voir. C’est un homme incroyablement doué, gentil, humble, travailleur et il m’a conquise. Je n’ai jamais vu quelqu’un qui avait autant de précision par rapport à ce qu’il voulait faire. La veille de chaque scène, on recevait la feuille de service mais également un story-board dessiné par lui, qui nous expliquait exactement comment il allait filmer la scène. C’est tellement précieux quand on est acteur.

Pour cette enquête, Anne Charrier et Claire Keim, Manue et Johanna, font équipe.
Pour cette enquête, Anne Charrier et Claire Keim, Manue et Johanna, font équipe. © Eloïse Legay - Carma Films - France Télévisions

« Moins je suis préparée, plus je vais prendre des coups et le rôle va laisser des marques »

Incarner une gendarme vous est familier…
Oui et j’étais un peu fatiguée de ce genre de rôle. J’ai du mal à comprendre cette fascination pour les enquêtes en France. Dans « L’Éclipse », cette gendarme a grandi au vert, elle connaît très bien les gens qui habitent son secteur… Ça n’a rien à voir avec l’univers extrêmement bureaucratique des flics parisiens et, pour une fois, elle n’avait pas une trajectoire personnelle dramatique. J’ai trouvé ça intéressant.

Votre personnage a deux enfants, dont une adolescente, comme vous (Claire Keim et Bixente Lizarazu sont parents de Uhaina, 16 ans, NDLR). Avez-vous puisé des choses de votre vie personnelle ?
Pas du tout. Je me l’interdis pour ma santé. Malheureusement c’est parfois irrépressible, il m’est arrivé de jouer des choses tellement traumatisantes que c’était impossible de ne pas faire une projection avec ma vie. J’essaye désormais de cloisonner les espaces. À mes débuts, j’étais paniquée à l’idée des scènes d’émotion que je devais interpréter. Je cherchais dans ma vie, je me mettais le cœur à l’envers et je me retournais la tête pour accéder à ce que j’estimais être la sincérité dans la scène. J’ai mis des années à progresser et à enfin être émue par la réalité de mon personnage. L’expérience m’a protégée. Plus je travaille en amont et moins je me fais mal sur le tournage. Moins je suis préparée, plus je vais prendre des coups et ça va laisser des marques.

Il y a des rôles qui vous ont laissé des traces ?
Il y a des rôles qui vivent encore un peu avec moi. Par exemple, celui dans « La soif de vivre », un téléfilm sur l’alcoolisme, m’a beaucoup entamé. J’ai adoré mais je n’étais pas encore dans un processus de protection. J’ai laissé des petits bouts de moi. Il y a aussi des personnages qui sont toujours en moi, avec plaisir.

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« J’ai masqué mon nom de toutes les actualités »

Les enfants de votre personnage et de celui d’Anne Charrier sont en première ligne autour de la disparition de la jeune Nour. Jusqu’où seriez-vous prête à aller pour protéger vos enfants ?
Vous voulez vraiment me faire parler de mes vrais enfants ? J’ai envie de leur foutre la paix. […] Je n’en peux plus d’avoir des mini-phrases sorties de leur contexte. Vous allez écrire un truc mais ça va être repris par 67 journaux qui vont en faire des titres du style « je serais prête à tout pour défendre ma fille ». Ce n’est pas possible. J’ai masqué mon nom de toutes les actualités. Je ne supporte plus de relire des articles sur moi, ça me rend triste. Ce n’est pas possible que les gens les lisent et pensent que j’ai dit ça. Tout ce qui touche à ma vie maintenant je n’en parle plus du tout. Du coup, on raconte de l’eau tiède parce qu’on sait que dès qu’on va dire un truc intéressant malheureusement il va être sorti de son contexte. Je voudrais vous répondre en vous donnant des tas de détails précis mais je ne peux pas car ma parole va être déformée.

Parmi les jeunes au casting, Aymeric Fougeron et Justine Lacroix, alias Luca et Inès.
Parmi les jeunes au casting, Aymeric Fougeron et Justine Lacroix, alias Luca et Inès. © Eloïse Legay - Carma Films - France Télévisions

Il y a beaucoup de jeunes acteurs au casting. Comment s’est passé le tournage ?
Ils ont trouvé des gens incroyables. Je suis totalement tombée sous le charme. C’est hyperexcitant de voir des jeunes acteurs géniaux débuter. Même si on y est pour rien, on se dit quand même qu’on est là, qu’on assiste à quelque chose.

« Je ne peux pas faire autrement que binge-watcher. On ne peut pas me faire attendre une semaine »

Vous regardez beaucoup de séries ? Vous avez un coup de cœur ?
Je passe ma vie devant les séries. Je perds des années de vie à regarder des saisons et des saisons. Je regarde tout ! Dites-moi une série que vous avez aimée, on va voir si je ne l’ai pas vue.

Si je vous dis « La Fièvre »
J’ai adoré ! Ça m’a fait du bien au moment où c’est arrivé. J’avais besoin d’entendre qu’on est conscient de ce qu’il se passe. Côté séries françaises, j’ai adoré « D’Argent et de sang », mais aussi « Sambre » et « Les Sauvages ». Je ne peux pas faire autrement que binge-watcher. On ne peut pas me faire attendre une semaine. C’est impossible ! Je ne dors pas beaucoup. J’ai commencé à regarder des séries au moment de « Six feet under », la première que je mets dans mon Panthéon. Je regarde aussi beaucoup de documentaires. Les plateformes de France Télévisions et d’Arte sont mes copains.

«Je n’ose plus parler d’écologie»

Vous êtes très engagée autour de la cause environnementale…
J’étais…

Vous en êtes où ?
Il y a vingt ans, dans une interview, je sensibilisais autour de la menace pesant sur la biodiversité du Morvan. Suite à cela, on m’a proposé d’être marraine de la fondation Hulot et j’ai accepté. Aujourd’hui, je suis très en colère. J’ai le sentiment d’avoir participé à une entreprise d’enfumage des gens malgré moi. On sait très bien ce qu’il faut faire pour inverser la tendance. On a les clés, les moyens et les compétences. Ce sont des décisions politiques ! Si elles ne sont pas prises, c’est politique ! Je suis en colère parce que j’ai participé à cette espèce de green washing  disant « coupez l’eau en vous brossant les dents, recyclez vos détritus, ne prenez pas l’avion, ne faites pas ci… » J’ai participé à cette entreprise de culpabilisation des gens. J’y croyais quand je l’ai fait, parce que moi-même je me disais que je pouvais m’améliorer. J’ai changé des choses dans ma vie, la plupart des gens que je connais aussi. On voit bien que ce n’est pas suffisant. Ça ne sert à rien si au final on n’est pas capable de protéger des zones marines ; si prendre le train reste plus cher que l’avion, si on n’est pas capable de mettre des vraies taxes sur les pollueurs... Je n’ose plus parler d’écologie parce que, pour moi, je participe à une entreprise d’enfumage des gens. Je ne veux plus faire ça! Aujourd’hui, je me dis que ma parole n’a servi qu’à faire gagner du temps aux gens qui exploitent la planète, à ceux qui font semblant.

Et si on vous proposait d’avoir un rôle politique sur le sujet ?
Aujourd’hui ça ne me semble pas possible, notamment de rallier un parti. En revanche, je me rends compte que beaucoup de choses que je fais dans ma vie sont politiques. Quand je fais des mini-actions localement pour essayer d’améliorer les choses, c’est de la politique.

N’y a-t-il pas encore une petite touche d’optimiste ?
Notre seule issue c’est l’optimisme. C’est une catastrophe mais il y a quand même énormément d’espoir. On entend les arbres qui tombent mais pas la forêt qui pousse. Des gens qui créent des moyens de dépolluer, d’alléger notre impact j’en connais plein. Mon pessimisme n’a aucun sens il est destructeur, vain, nul et ne sert à rien. Ce qui m’inspire ce sont les gens optimistes. Je vois des grandes figures de l’Écologie qui disent « on va s’en sortir, il y a des solutions». L’homme a des capacités de se réinventer fabuleuses. La seule sagesse c’est l’optimisme.

«L'Eclipse», série en six épisodes diffusée sur France 2 , à partir de mercredi 4 septembre.
L'affiche de la série «L'Eclipse». © Eloïse Legay - Carma Films - France Télévisions

Un soir d’éclipse, Luca, 17 ans, s’amuse avec l’arme de service de sa mère et tire accidentellement sur Nour, sa petite amie. Alors qu’il part chercher les secours, la jeune femme disparaît. Claire Keim et Anne Charrier, gendarmes, enfants du pays et mères d’adolescents proches de la victime et impliqués dans l’affaire, mènent l’enquête.

« L’Éclipse », série en six épisodes diffusée sur France 2, à partir de mercredi 4 septembre.

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