Joe Coulombe, l’homme qui a aidé les Américains à mieux manger

Il y a un demi-siècle, Joe Coulombe fondait la chaîne Trader Joe’s. Décédé le 28 février, il a légué un héritage de plus de 500 supermarchés aux États-Unis qui rivalisent avec Whole Foods, le géant du bio racheté par Amazon.

 Joe Coulombe dans un de ses magasins Trader Joe's à Huntington Beach (Californie) en 1986
Joe Coulombe dans un de ses magasins Trader Joe's à Huntington Beach (Californie) en 1986 MediaNews Group via Getty Images

    Au pays de la malbouffe, il avait fondé l'un des premiers supermarchés proposant des produits plus sains – fruits et légumes cultivés sans pesticides, bœuf sans hormone ou poisson certifié « durable ». Joseph « Joe » Coulombe, créateur de l'enseigne américaine Trader Joe's, est mort le vendredi 28 février à l'âge de 89 ans à Pasadena (Californie), la ville où, en 1958, il avait ouvert sa première épicerie.

    Peu connu hors des États-Unis, Trader Joe's est un succès incontestable, mais aussi un ovni dans le commerce alimentaire américain : avec 504 supermarchés à travers tout le pays, cette chaîne à l'image rustique et « sympa » possède plus de points de vente que le très branché Whole Foods, spécialiste du bio racheté en 2017 par Amazon pour 13,7 milliards de dollars.

    Pas d'hormones ni d'OGM

    La recette de « Joe le négociant »? Proposer moins de produits que les autres, mais avec un rapport qualité/prix imbattable. Si elle ne pratique pas le 100 % bio, la chaîne se rapproche beaucoup des standards européens, bien plus stricts que les règles en vigueur aux États-Unis.

    Chez Trader Joe's, pas d'hormones ou d'antibiotiques dans la viande, pas de colorants ou de conservateurs artificiels, pas d'OGM, pas de sucres ajoutés… On est loin, très loin de ce que trouvent les usagers américains dans les 4 500 magasins du géant Walmart, leader de la grande distribution. Dans 80 % des cas, les produits sont vendus sous la marque Trader Joe's, du papier toilette aux plats surgelés en passant par les conserves, le lait ou les œufs – un tournant pris en 1972, afin de proposer de meilleurs prix et d'imposer ses normes aux fournisseurs.

    Des produits d'ailleurs

    Dès ses débuts, Trader Joe's s'est aussi distingué avec des produits venus d'ailleurs – Joe Coulombe était persuadé que l'essor du tourisme de masse allait changer les habitudes des consommateurs, et leur faire aimer les aliments exotiques. Aujourd'hui encore, on y trouve de La Vache qui rit, des bouteilles d'Orangina… mais surtout des olives grecques, des pâtes italiennes, de l'agneau néo-zélandais, des gaufres belges, de la brioche française ou du chocolat suisse.

    « Il y a des choses que l'on ne peut trouver dans aucune autre chaîne de magasins aux États-Unis, explique Laurent Fontanel, un Français installé depuis 25 ans à Rochester, au nord de l'État de New York. J'y vais pour le fromage, les yaourts, les pains au chocolat surgelés, la limonade qui vient de France… C'est un peu comme Ikea : une enseigne qui a des fans aux États-Unis, parce que les produits sont de très bonne qualité et à des prix abordables. »

    Un vin à succès

    Ces dernières années, l'un des plus grands succès de Trader Joe's est pourtant 100 % américain : un vin californien, sous la marque Charles Shawn, vendu depuis 2002 au prix imbattable de 1,99 dollar la bouteille. Disponible en plusieurs cépages (cabernet sauvignon, merlot, chardonnay, sauvignon blanc…) et connu sous le surnom de « Two bucks Chuck » (« Charlie les deux dollars »), il s'est vendu à plus de 1 milliard de bouteilles depuis son lancement. On le trouve même en version bio, à peine plus cher (3,99 dollars).

    Mais Joe Coulombe, grand amateur de vin, n'est pour rien dans ce best-seller : il avait pris sa retraite en 1988, après avoir vendu Trader Joe's à Theo Albrecht, cofondateur du distributeur allemand Aldi.