Dans la peau d’un candidat de «Pékin Express» en Malaisie

Notre journaliste était en Malaisie pour vivre la même étape que les candidats encore en lice de la onzième saison de la course d’aventures de M 6, diffusée jeudi soir à 21 heures.

    « Quand vous allez faire pipi au bord de la route, attention aux cobras, vipères vertes et scorpions, prévient Benny Boeckmans, chef de la sécurité sur le tournage de Pékin Express. Aujourd'hui, vous allez dans la jungle, c'est vraiment nature. » Face à lui, les sept binômes encore en lice pour cette troisième étape, au nord-est de Bornéo, en Malaisie.

    À eux de rejoindre de rejoindre Belaga en auto-stop, située à plus de 200 km de routes chaotiques. Mais pas seulement. Cette année, la production mise sur d'autres moyens de transport. Cette fois, ce sera aussi 8 km de pirogue sur le fleuve Rajan jusqu'à Long Dungan, petit village en bois de 1 000 habitants qui servira de camp de base pour les jeux d'immunité du lendemain.

    Avec Alexandre, un confrère de Télé 7 jours, nous avons pu tester une étape de « Pékin Express »./DR
    Avec Alexandre, un confrère de Télé 7 jours, nous avons pu tester une étape de « Pékin Express »./DR Michaël Zoltobroda, notre envoyé spécial à Bornéo (Malaisie)

    Une mission que nous effectuons également, accompagné d'Alexandre, un confrère de Télé 7 jours, après l'abandon, la veille, d'un journaliste de RTL, pour cause d'une infection à la main. Comme de vrais participants, pour un jour, nous partons équipés d'une balise GPS qui localise notre position à tout instant. Une nouveauté précieuse en matière de sécurité, qui sert également à l'équipe médicale, ainsi qu'à l'animateur Stéphane Rotenberg pour suivre notre progression et connaître l'estimation de notre heure d'arrivée.

    Un départ en deux temps

    Au dernier moment, on nous remet une carte très sommaire de la région, une enveloppe d'argent contenant 5 ringgits (l'équivalent d'un euro) par personne. Plus de quoi financer un cadeau pour un couple de Malaisiens qui fêtent ses 100 ans de mariage (ils ont 115 et 126 ans…), un arrêt obligatoire pour tous. Avec nos 20 ringgits supplémentaires, on opte pour un gâteau et des bougies, alors que les candidats ont pour consigne de leur apporter du riz, de la pâte de crevette ou encore une poule vivante, pour les moins chanceux du tirage au sort.

    « Vous êtes prêts ? Allez, top ! » Au bord de la mer, Stéphane Rotenberg donne le départ de la course qui débute par un sprint. En réalité, les caméras s'arrêtent trente secondes plus tard. Le tournage reprendra directement sur la route pour ne pas avoir dans le champ les quinze mini-vans de la production et ceux des journalistes qui suivent les binômes de près.

    Les instructions nous sont remises au départ de l’épreuve./DR
    Les instructions nous sont remises au départ de l’épreuve./DR Michaël Zoltobroda, notre envoyé spécial à Bornéo (Malaisie)

    Nous, on attendra quinze minutes de plus pour ne pas gêner les concurrents, au cas où l'on serait plus rapide qu'eux à stopper une voiture. Vite dit. Dès la première tentative, on manque de se faire renverser. Mais la cinquième est la bonne. Un gros pick-up blanc s'arrête.

    Une mission qui n'est pas du gâteau

    Au volant, il y a Shu, un ingénieur chinois de 70 ans, dont on comprend un mot sur trois. « Quand mes parents ont débarqué ici pour le travail, ça a été très dur, raconte ce grand-père de neuf petits-enfants. On a dû apprendre l'anglais, mais aussi le malaisien. » On lui demande s'il est croyant, dans une région où cohabitent mosquées, églises et temples bouddhistes. Réponse : « Je ne crois qu'à moi-même. Mais on vit tous en paix, ici. »

    Sur la route./DR
    Sur la route./DR Michaël Zoltobroda, notre envoyé spécial à Bornéo (Malaisie)

    Premier couac, notre idée de gâteau tourne au fiasco. C'est dimanche et toutes les boulangeries du quartier sont fermées. Enfin presque. Notre homme nous veut du bien et prend le temps d'en trouver une ouverte, alors qu'il doit se rendre au siège de son entreprise de construction.

    Shu pousse la gentillesse jusqu'à nous accompagner sur la route principale. Notre optimiste est au maximum. Mais à peine le temps de le remercier qu'il passe déjà la première, laissant nos sacs à dos à l'arrière du véhicule. On crie, désemparés. Il pile, souriant. Il était moins une.

    Un policier qui se moque des limitations de vitesse

    Au même moment, une équipe de candidats arrive. Nous voilà obligés de nous cacher pour ne pas interférer, quitte à retarder notre progression. Quelques minutes plus tard, la voie est libre. Les voitures passent sans s'arrêter. Sauf une petite citadine, celle de Sylvester Gavy, surnommé « Oncle G ».

    Il connaît la version thaïlandaise de « Amazing race », une course d'aventure similaire à « Pékin Express » et promet de revenir nous chercher dans dix minutes. On y croit à moitié. Alors, on recommence le stop jusqu'à se mettre au travers de la route, impatient. Et sur qui on tombe : Sylvester au volant d'un 4x4 rutilant. Il est accompagné de sa femme, qui tient dans ses bras leur fils de 3 ans à l'avant.

    C'est parti pour une heure de route limitée à 90 km/h. Lui roule à 120. On lui demande de respecter le Code de la route, comme les candidats doivent absolument le faire. Il rigole. « Vous avez peur ? demande le père de famille de 24 ans. Ne vous inquiétez pas, je suis policier. »

    À toute vitesse, nous sommes parvenus à doubler une équipe./DR
    À toute vitesse, nous sommes parvenus à doubler une équipe./DR Michaël Zoltobroda, notre envoyé spécial à Bornéo (Malaisie)

    Sur le chemin, on double une équipe à 110 au lieu de 50 km/h sur une portion en travaux, puis une autre. Méfiants, on demande à notre chauffeur s'il y a vraiment des serpents dangereux dans le coin. « Ils sont mêmes très dangereux, précise Sylvester. Si vous en voyez un, tuez-le avant qu'il ne vous tue. » Fini de rire.

    Et des singes ? « Les seuls que vous pourrez voir, ce sont des singes domestiques que certains villageois ont apprivoisés depuis la naissance », poursuit notre chauffeur, avant de nous déposer à une jonction, au beau milieu de… nulle part.

    Les vraies galères commencent

    Par désespoir, nous prenons la première voiture venue : c’est une erreur./DR
    Par désespoir, nous prenons la première voiture venue : c’est une erreur./DR Michaël Zoltobroda, notre envoyé spécial à Bornéo (Malaisie)

    Nos réserves d'eau (1,5 litre) s'épuisent. Impossible d'attendre trop longtemps au soleil, quand il fait déjà 36 degrés à l'ombre. Alors, on prend la première voiture qui s'arrête, sans se rendre compte de l'erreur de débutant. À bord du véhicule, ni le conducteur ni son jeune fils ne parlent anglais. Et nos indications en malaisien, fournies par la production, ne changent rien : ils ne savent pas lire non plus.

    Pendant deux heures, on se met à douter. Jusqu'à s'apercevoir qu'on est allés beaucoup trop loin. Dilemme : faire demi-tour pour aller voir le couple de centenaires ou continuer quand même ? Fébrile, on sort notre portable pour appeler l'équipe de production. Normalement, ça serait carton rouge. « On n'a jamais trouvé de téléphone dans les sacs, mais parfois on tombe sur des cartes ou guide de conversation », sourit le producteur Thierry Guillaume.

    À cette latitude, la nuit tombe à 18 heures. Pas d'autre choix que de poursuivre notre chemin. Moral à zéro. Heureusement, il ne reste plus que 40 km. Une voiture s'arrête et nous demande combien on a sur nous.

    Un trajet à deux à l'heure

    On frôle le désespoir et la déshydratation, quand surgit une vieille Proton Tiara. Cette AX version malaise affiche 200 000 km au compteur. « Je n'ai jamais fait le trajet avec cette voiture, je ne sais pas si elle va tenir », nous avertit Nathanaël. Pour la première fois, ce technicien de 24 ans va rejoindre l'une des centrales hydraulique de la région avec sa propre voiture. Normalement, ça prend 40 minutes. Avec ça, il faut compter plutôt trois heures.

    Nathanaël, 24 ans, nous conduit à plus de trois heures de route./DR
    Nathanaël, 24 ans, nous conduit à plus de trois heures de route./DR Michaël Zoltobroda, notre envoyé spécial à Bornéo (Malaisie)

    Vu la profondeur des nids-de-poule, les éboulements de terrain et la hauteur du précipice qui borde la route, on se contentera d'arriver en vie. Seule réjouissance, l'anglais de cet enfant du pays est meilleur que le nôtre. « Ma mère, qui est prof, nous a toujours parlé en anglais à la maison, raconte-t-il. Pour elle, c'est la seule façon de trouver un vrai métier. »

    Sur le trajet, on lui demande s'il a une copine. Réponse : « Non, je veux rester libre pour l'instant. » Et comment on drague, ici ? « Suffit de demander à la fille si elle veut bien sortir avec toi. » Son passe-temps, c'est d'aller pêcher en famille. Certains poissons peuvent rapporter jusqu'à 200 euros le kilo, alors qu'il en gagne 250 euros par mois, à peine plus que le salaire minimum. Dans 10 ans, il espère devenir ingénieur et gagner 10 fois plus. Pour ça, il a prévu de mettre de l'argent de côté pour retourner à l'école.

    À l'épreuve du panneau « voiture interdite »

    A bord d’une pirogue, trop grande, trop lourde…./DR
    A bord d’une pirogue, trop grande, trop lourde…./DR Michaël Zoltobroda, notre envoyé spécial à Bornéo (Malaisie)

    Malgré notre handicap de départ, notre équipe n'arrive pas la dernière à l'embarcadère des pirogues, en pleine jungle. Maigre récompense alors qu'on a raté un arrêt. « Un peu plus en aval, il y a des crocodiles, mais cette portion est tranquille », nous indique un membre de la production. Le problème, c'est plutôt notre embarcation : trop grande, trop lourde… Au bout de 20 minutes et trois bouteilles d'eau vidées, nos muscles nous lâchent.

    On finira le reste du périple au moteur, un peu honteux, alors que les autres équipes pagayeront plus de deux heures. Stéphane Rotenberg ne manque pas de nous chambrer. La suite n'est pas plus glorieuse. Il fait déjà nuit quand on se met à chercher un toit pour dormir, alors que tout le monde est déjà casé. Trop tard pour aller voir le chef du village et trouver un abri. Penauds, on rentre à l'hôtel de la production.

    Pour nous l'aventure a vraiment été « express ».

    VIDEO. J'ai testé une étape de « Pékin Express »