Retraites : âge de départ, carrières longues… ce que contiennent les deux premiers décrets publiés

Les deux premiers décrets d’application de la réforme des retraites, portant sur les mesures les plus emblématiques (l’allongement de l’âge légal, l’accélération de la durée d’assurance…), sont parus ce dimanche au Journal officiel. Décryptage.

Les deux premiers décrets publiés ce dimanche précisent notamment le calendrier de cotisation. Une vingtaine d'autres textes doivent sortir. LP/Arnaud Journois
Les deux premiers décrets publiés ce dimanche précisent notamment le calendrier de cotisation. Une vingtaine d'autres textes doivent sortir. LP/Arnaud Journois

    Alors que la mise en œuvre de la réforme des retraites est programmée au 1er septembre, deux premiers décrets d’application, dont nous avions déjà dévoilé le contenu début mai, sont parus ce dimanche au Journal officiel. Une publication qui intervient deux jours avant la 14e journée d’action contre la réforme des retraites mardi, à l’appel de l’intersyndicale, alors que 8 juin, l’Assemblée nationale doit également examiner une proposition de loi abrogeant la réforme, à l’initiative du groupe indépendant Liot.

    Ces textes déclinent les modalités d’application des articles 10, 11 et 17 de la loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023 « relatifs, d’une part, à l’augmentation progressive de l’âge d’ouverture des droits à la retraite de 62 à 64 ans et à l’accélération du rythme de montée en charge de la durée d’assurance requise pour le taux plein, et, d’autre part, aux départs anticipés, notamment s’agissant des carrières longues et au titre du handicap », explique le gouvernement dans un communiqué.



    Des décrets publiés en priorité car ils « conditionnent l’âge de départ », précisait mi-mai le ministère du Travail, les caisses de retraite les attendant avec impatience pour mettre à jour les logiciels et informer au mieux les futurs retraités. « Dès le mois de juillet, il y aura des retraites qui seront calculées en fonction des nouvelles règles », avait indiqué le 31 mai le directeur général de la Caisse nationale d’assurance vieillesse (Cnav), Renaud Villard. On fait le point.

    Age de départ porté à 64 ans

    C’est la mesure la plus emblématique et celle qui a concentré (et concentre encore) la colère des oppositions. L’âge légal minimal de départ à la retraite va passer progressivement de 62 ans à 64 ans, pour tous les salariés du privé et les fonctionnaires, hors catégorie active. L’article 1 du décret détaille le « relèvement de l’âge d’ouverture des droits ».

    Il s’agit ainsi d’avancer d’un trimestre par génération à partir du 1er septembre 1961 jusqu’en 1968. Pour les générations nées en 1968 et après, les règles seront les mêmes pour tous : départ à 64 ans. Pour rappel, la durée de cotisation requise pour obtenir une pension à taux plein (sans décote) change aussi : elle passe de 42 ans actuellement (168 trimestres) à 43 ans (172 trimestres), selon votre génération.

    Carrières longues : quatre bornes d’âge…

    Pour les carrières longues notamment, le dispositif « prévoit désormais quatre bornes d’âge d’entrée dans le dispositif (16 ans, 18 ans, 20 ans et 21 ans), en permettant un départ anticipé à la retraite selon quatre bornes d’ouverture des droits à la retraite (respectivement 58 ans, 60 ans, 62 ans et 63 ans) », indique le communiqué. Le décret introduit aussi un traitement à part pour ceux ayant commencé juste avant 20 ans.

    Sont également précisées les dispositions relatives aux « catégories actives » de la fonction publique (pompiers, policiers, contrôleurs aériens…), qui pourront toujours partir avant 64 ans mais dont l’âge légal de départ sera lui aussi relevé progressivement de deux ans.

    … et des dérogations

    Le décret prévoit également des dérogations en matière de retraite anticipée pour carrières longues, en maintenant les conditions actuelles à ceux qui y sont éligibles (début d’activité avant 20 ans et 168 trimestres) et qui ne le seraient plus dans le système actuel. Sont concernés, lit-on dans l’article 8 du décret, « les assurés nés entre le 1er septembre 1961 et le 31 décembre 1963 et qui justifient, avant le 1er septembre 2023, d’une durée d’assurance », équivalente à celle exigée avant l’entrée en vigueur de la réforme, selon la génération.

    Ces assurés peuvent ainsi « demander à bénéficier, pour une pension prenant effet à compter du 1er septembre 2023, d’un âge d’ouverture du droit à pension abaissé dans les conditions prévues aux articles D. 16-1 du code des pensions civiles et militaires de retraite, D. 732-40 du code rural et de la pêche maritime et D. 351-1-1 du Code de la sécurité sociale dans leur rédaction antérieure à l’entrée en vigueur du présent décret. ».

    Jusqu’au 31 octobre pour annuler sa demande

    SI vous avez déjà fait les démarches pour pouvoir bénéficier d’un départ à la retraite le 1er septembre mais que vous vous rendez compte qu’avec les nouvelles règles, vous ne remplissez plus les conditions, vous bénéficiez, à votre demande, « d’une annulation » de votre pension ou de la « demande de pension », indiquait la loi promulguée mi-avril. L’article 7 du décret en précise les conditions. « La demande d’annulation de la pension ou de la demande de pension est adressée aux organismes de sécurité sociale et de mutualité sociale agricole (…), à compter du lendemain de la publication du présent décret et au plus tard le 31 octobre 2023. »

    31 décrets au total

    Ces deux décrets sont les premiers des 31 textes d’application qui doivent être publiés avant le 1er septembre pour que la réforme puisse être mise en œuvre dans les temps. Viendront ainsi ces prochaines semaines les décrets concernant la fermeture des principaux régimes spéciaux (RATP, industries électriques et gazières, clercs et employés de notaires, Banque de France, Conseil économique, social et environnemental), ceux sur l’usure professionnelle, la prévention, les droits nouveaux avec la hausse du minimum de pension pour les petites retraites, ou encore le cumul emploi retraite et la retraite progressive, ouverts aux salariés du privé et aux agents de la fonction publique. Enfin, les trimestres supplémentaires accordés aux pompiers volontaires, aux anciens bénéficiaires des travaux d’utilité collective…