Anesthésiste de Besançon : «Certaines familles de victimes attendent depuis des années»

Frédéric Péchier, déjà mis en examen pour empoisonnement sur sept personnes, a de nouveau été placé en garde à vue ce mardi. Plusieurs dizaines d’autres personnes auraient pu être empoisonnées. Des victimes témoignent.

 Déjà mis en examen pour sept empoisonnements, Frédéric Péchier est soupçonné d’en avoir empoisonné plusieurs dizaines d’autres.
Déjà mis en examen pour sept empoisonnements, Frédéric Péchier est soupçonné d’en avoir empoisonné plusieurs dizaines d’autres. AFP/Sébastien Bozon

    « Enfin…! » soupire Amandine Iehlen. Voilà dix ans que la jeune femme se bat pour connaître la vérité sur la mort suspecte de son père Damien, décédé à 52 ans lors d'une banale opération des reins. Bien avant que la justice ne fasse finalement le lien avec le docteur Péchier, et mette ce dernier en examen en mars 2017 pour sept cas d'empoisonnement, dont celui-ci. Ce mardi, il a été de nouveau placé en garde à vue pour « plusieurs dizaines de cas suspects » dont certains patients n'auraient pas survécu.

    « On savait que les enquêteurs travaillaient, notamment en raison des exhumations, mais on commençait à trouver le temps long. C'est une bonne nouvelle », réagit celle qui a fondé une association pour fédérer les victimes qui, toutes, espèrent un procès. « Nous sommes impatients de connaître la suite. Certaines familles attendent depuis des années. En cas de mise en examen, nous allons enfin pouvoir nous constituer parties civiles dans cette nouvelle procédure », positive également Me Frédéric Berna, avocat de plusieurs d'entre elles.

    Rescapée d'un empoisonnement en janvier 2017 qui lui a valu de passer cinq jours dans le coma, Sandra Simard reste prudente. « J'attends d'entendre les explications de Frédéric Péchier et de voir des preuves. Mais le chiffre annoncé aujourd'hui commence à faire pencher la balance… ça fait vraiment beaucoup », euphémise-t-elle, persuadée que les enquêteurs ont « forcément des indices graves ».

    «Il y a bien un empoisonneur dans cette clinique !»

    « Et si ce n'est pas lui, qui est-ce alors? Il y a bien un empoisonneur dans cette clinique! » s'emporte de son côté Jacques Henriet, pétrifié par l'ampleur prise par l'enquête. En 2016, sa compagne Laurence Nicod, podologue de 50 ans, était décédée d'une surdose de potassium. « Elle est entrée en toute confiance pour une opération de 45 minutes après une chute de ski, elle n'est jamais revenue », rappelle-t-il tristement. « Quand je pense qu'il a plusieurs fois demandé de pouvoir exercer à nouveau, j'en ai la chair de poule », souffle Jacques Henriet, également en colère contre la clinique Saint-Vincent, coupable selon lui de n'avoir pas réagi pendant toutes ces années.

    L'homme reste toutefois lucide sur la réalité du dossier, et s'inquiète : « Tout le monde n'a pas d'autopsie dans son dossier. Certains risquent de n'être jamais reconnus comme victime », analyse-t-il, se projetant déjà dans un éventuel procès. « On verra bien à la fin de la garde à vue, reprend Amandine Iehlen. En attendant, je reste accrochée à mon téléphone. »