Ils envoyaient du sang contaminé par le sida dans des colis

Ils envoyaient du sang contaminé par le sida dans des colis

    L'institut national de la transfusion sanguine (INTS) est jugé aujourd'hui devant le tribunal correctionnel de Créteil pour « mise en danger de la vie d'autrui » et « violation délibérée d'une obligation de sécurité » pour avoir expédié des paquets contenant des échantillons de sang contaminés par le sida sans précaution. L'ex-directrice du laboratoire de virologie de l'INTS, Anne-Mary Couroucé, et Alain Calvo, le responsable du laboratoire Orgenics destinataire du colis, seront parmi les prévenus.

    Le 7 octobre 1998, Jean-Marie J. prévenait sa hiérarchie qu'il avait été blessé en manipulant un colis dans l'entrepôt de la Société de fret et de services sur l'aéroport d'Orly. A l'intérieur, quarante tubes contenant du plasma humain infecté par le virus VIH que l'employé a ramassé à mains nues, sans connaître la teneur exacte des échantillons qu'il avait manipulés.

    Aucune alerte du risque

    Les produits, qui n'avaient pas été chauffés, étaient destinés à des laboratoires spécialisés pour étalonner des appareils de détection automatique. Après avoir d'abord assuré que ces produits ne présentaient pas « de danger », le laboratoire Orgenics alertait la société de fret que « le blessé devait procéder à des examens sanguins, y compris le test de diagnostic du sida ». La direction de la société de fret alertait alors la gendarmerie. Une information judiciaire était ouverte et le juge Laurent Raviot a voulu comprendre comment l'INTS et ses clients échangeaient leurs marchandises à haut risque.

    L'enquête a permis de découvrir que ces colis voyageaient sans « aucune mention relative au danger ». Aucune étiquette alertant du risque infectieux grave ou pathogène n'était apposée par l'INTS sur les cartons, par ailleurs non conformes. La directrice du service de virologie, Anne-Mary Couroucé, a reconnu avoir oublié l'étiquette sur la dangerosité du produit. La société Orgenics a invoqué « un flou » dans la législation pour s'exonérer de sa responsabilité, alors que l'instruction a démontré que cette société connaissait pertinemment le risque de ce colis dont la commande était « un panel HIV ». Pire pour l'INTS, l'enquête a montré que « la question du transport des produits biologiques n'avait jamais été abordée ». « La mise en cause de l'INTS est injustifiée et nous le démontrerons », prévient Marie-Paule Pioli, l'avocate de l'organisme. Le manutentionnaire, placé sous trithérapie d'urgence, a vécu plusieurs semaines d'angoisse avant d'avoir la certitude qu'il avait finalement échappé à la transmission du virus.