Pour sa mère, Valérie Bacot était «amoureuse» de son bourreau

Valérie Bacot est jugée jusqu’à vendredi aux assises pour avoir assassiné son mari violent et proxénète. Sa mère a témoigné, ce mercredi, regrettant à demi-mot son comportement de l’époque.

Valérie Bacot, ici avec l'écharpe jaune, est jugée jusqu'à vendredi. AFP/JEFF PACHOUD
Valérie Bacot, ici avec l'écharpe jaune, est jugée jusqu'à vendredi. AFP/JEFF PACHOUD

    Valérie Bacot, jugée jusqu’à vendredi pour avoir assassiné son mari violent et proxénète, était « amoureuse » de son bourreau, a assuré mercredi devant les assises de Saône-et-Loire sa mère. « Je serais tentée de dire amoureuse », répond Joëlle Aubague, 65 ans, à la présidente de la cour, Céline Therme, qui lui demande comment on pouvait qualifier la relation entre Valérie Bacot et son violeur.

    Valérie Bacot, 35 ans à l’époque des faits, encourt la perpétuité pour avoir assassiné d’une balle dans la nuque, le 13 mars 2016, Daniel Polette, alors âgé de 61 ans. Ce dernier avait déjà été condamné en 1995 pour avoir agressé sexuellement Valérie Bacot, qui avait alors 12-13 ans. Mais, après avoir purgé sa peine, il est revenu au domicile familial en septembre 1997. Valérie Bacot est tombée enceinte de lui et l’a suivi en s’installant en couple avec son violeur.

    C’est un des « nombreux dysfonctionnements » des autorités qui ont poussé Me Nathalie Tomasini, une des avocates de Valérie Bacot, à assigner l’État en justice pour « faute lourde ». « Valérie voulait » que Daniel Polette revienne « à la maison », assure à la barre sa mère Joëlle Aubague. Selon elle, Valérie Bacot avait déjà dit, quand son violeur a été jugé : « Je ne lui en veux pas. Je ne veux pas qu’il aille en prison. »

    « Comment avez-vous pu emmener cette enfant chez son bourreau ? »

    « Je veux rester avec mon homme », avait écrit Valérie Bacot, alors presque majeure, dans une lettre écrite à sa mère à l’époque. « J’ai été naïve. On donne une deuxième chance. Oui, ce n’était peut-être pas normal », tente de se justifier Joëlle Aubague, assurant avoir « découvert » le viol de sa fille par son compagnon « quand les gendarmes ont débarqué un matin ».

    Mais « vous étiez sa mère ! Comment avez-vous pu emmener cette enfant chez son bourreau ? » s’emporte Me Tomasini en évoquant les visites de Valérie Bacot, alors adolescente, dans la prison où était son violeur. « C’est elle qui voulait », assure la mère. « Mais qu’est-ce qui vous est passé par la tête ? » crie l’avocate. « Je n’ai rien imposé », affirme Joëlle Aubague. La mère restera sans mots quand l’avocate lui annoncera que sa fille vient de déposer plainte contre elle pour « complicité de viol par omission ».

    « Il aurait pu la tuer »

    « Je voudrais bien pouvoir faire marche arrière », lâche la mère, concédant ne pas avoir été « parfaite » mais assurant n’avoir jamais chassé sa fille du domicile familial quand elle est tombée enceinte. « Valérie a cru comprendre que je voulais qu’elle parte mais non », dit-elle, jurant ses grands dieux que c’était Daniel Polette qu’elle voulait chasser de sa vie.

    Au cour de l’après-midi, les jurés ont entendu de nombreux témoignages de proches de Daniel Polette, le dépeignant comme un être « ignoble », selon son frère Alain. « Monstre, c’est un mot trop gentil pour lui », déclare-t-il, se souvenant que son frère lui avait « planté une fourchette dans la main » après qu’il eut osé lui répondre. « J’habitais la maison du diable car le diable était dedans. Ce n’est pas lui la victime, c’est elle. Elle ne mérite que la liberté », ajoute Alain Polette.

    « Dans ses yeux, on voyait la mort », renchérit Régine Jolivet, une ex-compagne. « On était sa chose. » Daniel Polette était « violent et dangereux », ajoute Josiane Lesoudard, une autre ancienne amie. Quant à Michèle Nadoux, mariée avec Daniel Polette de 1981 à 1987, elle explique n’avoir obtenu son salut qu’en réussissant à divorcer « mais en cachette ». « C’est très compliqué quand vous êtes sous emprise. J’étais surveillée. Il m’appelait quinze fois par jour », dit-elle, se souvenant avoir déposé plainte à la gendarmerie après avoir été « défigurée » par son mari – initiative restée « sans suite », selon elle.

    « J’ai toujours pensé que mon frère était un pervers », affirme Mireille Polette, soeur de Daniel, qui a dénoncé le viol sur Valérie Bacot alors jeune adolescente.