Polémique en Espagne après une décision de justice défavorable à Carles Puigdemont

Le leader indépendantiste Carles Puigdemont, en exil depuis la tentative de sécession de la Catalogne, a vu son recours contre le mandat d’arrêt lancé à son encontre rejeté. Une décision inhabituelle qui contrarie aussi les partisans du Premier ministre sortant, Pedro Sánchez, qui a besoin de l’appui du parti indépendantiste catalan.

Exilé à Bruxelles, Carles Puigdemont est visé par un mandat d'arrêt de la justice espagnole pour son implication dans les événements de 2017 en Catalogne. Reuters/Yves Herman
Exilé à Bruxelles, Carles Puigdemont est visé par un mandat d'arrêt de la justice espagnole pour son implication dans les événements de 2017 en Catalogne. Reuters/Yves Herman

    Le rejet d’un recours de l’eurodéputé en exil Carles Puigdemont contre le mandat d’arrêt lancé à son encontre a déclenché une polémique en Espagne. Le leader indépendantiste catalan est dans le viseur de la justice espagnole depuis la tentative de sécession de la Catalogne en 2017. Or, pour se maintenir au pouvoir, le Premier ministre, Pedro Sánchez, a besoin du vote des députés du parti de Puitgemont, qui a obtenu sept sièges aux élections législatives.

    La « Salle des vacances » du Tribunal Constitutionnel (TC), composée de trois magistrats de garde pendant l’été pour expédier les affaires courantes, a déclaré non recevable ce mercredi le recours déposé par les avocats de Carles Puigdemont contre ce mandat d’arrêt, a confirmé ce jeudi un porte-parole du Tribunal.

    Une décision rarissime

    La décision du TC, prise quelques jours seulement après le dépôt du recours, a stupéfié la classe politique et les milieux judiciaires en raison de son caractère rarissime. Depuis 2017, tous les recours en lien avec la tentative de sécession de la Catalogne ont, en effet, toujours été déclarés recevables par le Tribunal constitutionnel, qui les a ensuite examinés en session plénière. À tel point que le parquet de ce même TC « a décidé de faire appel de cet arrêt », a indiqué le porte-parole du Tribunal.

    L’arrêt a fait l’objet de critiques au sein même du TC. « C’est inhabituel », a déclaré ce jeudi María Luisa Balaguer, elle-même membre du Tribunal, dans une interview à la radio Cadena Ser.

    Pour sa part, Laura Borrás, l’une des dirigeantes d’Ensemble pour la Catalogne (JxCat), le parti indépendantiste fondé par Carles Puigdemont, a dénoncé sur X, anciennement Twitter, une décision prise « en pensant à l’investiture » du prochain chef du gouvernement.

    Elle faisait clairement allusion à la situation paradoxale résultant des élections législatives du 23 juillet : Pedro Sánchez, dont le Parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE) est arrivé seulement deuxième avec 121 sièges, derrière le Parti populaire (PP, droite) et ses 137 sièges, a, malgré tout, des chances réelles de réunir les soutiens nécessaires pour être investi chef du gouvernement grâce au jeu des alliances.

    « Une stratégie de l’Etat contre l’indépendantisme »

    Mais pour cela, il devra impérativement obtenir non pas la neutralité, mais un vote favorable de JxCat, qui exige en contrepartie un référendum d’autodétermination et l’amnistie pour tous les Catalans condamnés pour la tentative de sécession. L’arrêt n’est donc pas, a priori, une bonne nouvelle pour le Premier ministre sortant.

    Le secrétaire général de JxCat, Jordi Turull, a ainsi vu dans la décision du TC une nouvelle preuve qu’il existait « une stratégie de l’État contre l’indépendantisme ». « Et la stratégie ne ferme pas pendant les vacances », a-t-il ajouté.

    Le Parti socialiste et le PP se sont abstenus de tout commentaire, mais les milieux de gauche notent que sur les trois magistrats composant la « Salle des vacances » du TC, les deux qui ont pris la décision du rejet sont clairement identifiés comme des conservateurs.