Oise : quand des éleveurs deviennent leurs propres vétérinaires

Face à la désertification des vétérinaires ruraux et à la baisse de leurs revenus, de plus en plus d’éleveurs se forment à soigner eux-mêmes leur cheptel.

 Songeons, jeudi. Respiration, digestion, lait, mamelles, les élèves du vétérinaire Nicolas Lucas apprennent à réaliser un diagnostic complet de leurs vaches.
Songeons, jeudi. Respiration, digestion, lait, mamelles, les élèves du vétérinaire Nicolas Lucas apprennent à réaliser un diagnostic complet de leurs vaches. LP/E.J

    1 h 30. C'est le temps que peuvent attendre certains éleveurs de l'Oise pour l'intervention d'un vétérinaire. Car en raison de la diminution du nombre d'élevages dans l'Oise, les vétérinaires viennent à s'éloigner de leurs patients ruraux. Ou ils préfèrent se recentrer sur des animaux de compagnie, plus nombreux et plus rentables (lire encadré). Ils sont d'ailleurs de moins en moins dans l'Oise.

    Pour être sûr de pouvoir soigner leur cheptel, un groupe d'éleveurs vient ainsi d'obtenir la qualification d'infirmier-vétérinaire, à l'issue d'une formation de deux jours. Organisée par la Maison familiale rurale (MFR) de Songeons et le Groupement de défense sanitaire (GDS) de l'Oise, elle proposait d'apprendre à faire un faire un diagnostic, une piqûre pour injecter un traitement ou un prélèvement sanguin, en alternant théorie et pratique.

    Une centaine de producteurs formés

    Ce type de formation séduit. L'Oise compte déjà plus d'une centaine d'éleveurs de bovins formés, sur les 1 030 que compte le département. Et les formations pour les ovins sont elles aussi victimes de leur succès. Des éleveurs des départements voisins viennent ici suivre des cours, si bien que les « classes » sont saturées.

    Parmi les ateliers de la dernière formation, figurait l'examen clinique d'une vache dans une exploitation du hameau de Séronville, à Songeons. « Observer les urines et les selles peut être utile. On peut voir sur cette vache, par exemple, qu'avec du maïs et des brins de plus de 3 cm, la digestion est incomplète », indique aux « apprentis » le docteur Nicolas Lucas, vétérinaire à Crèvecœur-le-Grand. Les élèves procèdent alors à la prise de température de l'animal. Une légère fièvre est relevée, avec un thermomètre indiquant 40 °C, au lieu de 38-39°C, sur cette vache de 12 ans.

    Diminuer les coûts d'exploitation

    L'analyse du lait permettra de suspecter une mammite, une inflammation de la mamelle. Rien de mortel, mais une incapacité temporaire d'exploiter le lait. Tout ce qui sort des pis est alors jetés, car impropre à la consommation.

    « C'est vrai qu'on s'alarme vite pour nos bêtes et qu'on a tendance à appeler le vétérinaire, concède Chantal, éleveuse depuis dix-neuf ans près de Formerie. Alors qu'une bonne observation permet d'éviter de le faire déplacer pour rien et d'engendrer des frais. » C'est tout le but de cette formation. « Il y a beaucoup de soin que l'on peut réaliser, assure Xavier, éleveur déjà formé, qui accueille les stagiaires. On sait faire une perfusion s'il le faut. Avec la baisse du prix du lait [autour de 0,35 €/l payé au producteur], il faut diminuer les coûts. »

    LP/E.J.

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