Paris : Moi et mes enfants, un lieu pionnier pour les familles monoparentales

Cette association parisienne d’aide aux familles monoparentales vient d’ouvrir un « espace de vie » encore pionnier en France, où les mères (et quelques pères) trouvent du temps pour soi sans culpabiliser

Paris XIIIe vendredi. Olivia Barreau,  la fondatrice de Moi et mes enfants, prépare l'ouverture d'un second lieu. LP/Elodie Soulié
Paris XIIIe vendredi. Olivia Barreau, la fondatrice de Moi et mes enfants, prépare l'ouverture d'un second lieu. LP/Elodie Soulié

    Elles sont pour la plupart divorcées ou séparées, « mamans solos » depuis peu ou toujours, par contrainte ou par choix. Toutes partagent une capacité phénoménale à mener de front famille, travail, intendance quotidienne et disponibilité affective de tous les instants. Surmontant mille difficultés, s’oubliant par manque de temps. C’est pour ces femmes, ses jumelles, qu’Olivia Barreau a créé l’association « Moi et mes enfants » il y a 6 ans. « Mes enfants avaient 9 mois et 5 ans lors de la séparation d’avec mon compagnon, raconte cette ancienne comédienne. J’ai traversé les difficultés d’être une maman solo, je devais réorganiser ma vie. Mon rêve était d’avoir du temps pour mes enfants et un salaire convenable, alors j’ai cherché un travail qui me permette d’être disponible ».

    Sauf qu’elle s’ennuie, Olivia, dans son nouveau travail très administratif. Elle s’ennuie, et si elle se « recentre » avec bonheur sur ses enfants, elle met de côté sa propre vie. Le déséquilibre pèse sur la petite famille, les tensions et l’isolement gagnent, le budget devient compliqué… De son expérience et des affres de l’isolement, jaillit l’idée de partager des petits moments, « de créer du lien » entre familles à son image. « J’aspirais à faire quelque chose d’utile et à mettre mon énergie au service d’autres parents seuls, pour les aider à équilibrer leur temps de vie », raconte Olivia. Même les mamans ont droit au répit. Les papas solos aussi, bien qu’ils ne représentent encore « que 10 % des monoparents de l’association ».

    Accompagner sans assister

    Le tout premier projet se veut festif, en cohérence avec l’envie d’Olivia de « mettre du soleil dans la vie des familles monoparentales » : un séjour au ski. La jeune femme trouve le lieu, se charge des réservations, du voyage, de la trame du séjour pour les petits et leurs mamans. « L’association a servi de facilitateur, et nous sommes partis à 5 ou 6 familles, c’était une réussite ! », se souvient-elle, confortée et confirmée dans sa nouvelle vocation « d’accompagner les familles sans les assister, les encourager à agir mais pas le faire à leur place ».

    Depuis ce petit voyage pilote, Moi et mes enfants a multiplié les activités, parfois simplement festives, et de plus en plus engagées vers l’encouragement des femmes à agir, à s’offrir des parenthèses de liberté profitables à toute la famille. « Une solidarité naturelle se crée entre des familles qui ont en premier lieu envie de s’appuyer sur un réseau d’entraide pour échanger, se rassurer, et en second lieu ont besoin qu’on les aide à prendre du temps pour elles sans culpabiliser, à ne plus être « que » maman ». Cela passe par des activités « ensemble mais séparément », les enfants d’un côté, en atelier artistique ou en soutien scolaire, les mamans dans un autre espace pour un « tea-time » d’aide à la parentalité, une conférence thématique ou une permanence juridique. Cela passe aussi par des pique-niques, vacances, « after school » mensuels et autres goûters d’anniversaire. « En 4 ans, toutes activités confondues, nous avons touché plus de mille personnes », note la fondatrice.

    Parmi elles, il a par exemple Léna, mère divorcée de 4 enfants de 5 à 23 ans, qui avait découvert l’existence de l’association sur le réseau social, et s’est jointe avec sa tribu à un pique-nique « pour voir ». C’était il y a 3 ans, et cette conseillère principale d’éducation (CPE) est devenue une habituée. « Mes enfants et moi, on a pris l’habitude de faire beaucoup de choses ensemble, on est soudés, et même l’aîné a toujours envie de participer, raconte-t-elle. On fait des week-ends, il y a des temps et des activités pour chacun, on échange entre parents. Ce n’est pas si évident de rencontrer d’autres familles quand on mène une vie d’acrobate. »

    Aider les parents solos à accéder à la propriété

    Après l’ouverture de son premier tiers-lieu dans le XIIIe (7-9 rue du Docteur-Charles-Richet, XIIIe, et www.moi-et-mes-enfants.com), il y a quelques jours, Moi et mes enfants passe la démultipliée dans son « envie d’agir », et lance des programmes spécifiques à destination des mères célibataires et des enfants : pour ces derniers, un stage « Élevons le cœur de la cité » d’ateliers destinés à encourager leur autonomie et leur capacité à se responsabiliser, et pour les premières, un programme « Brisons le plafond des mères », dont les ateliers visent à les aider à regagner l’estime de soi et « retrouver leur pouvoir d’agir », ainsi que présente Olivia. Un autre projet « Toi. T et Tes enfants », lancé avec deux avocates et un réseau des acteurs de l’immobilier solidaires, vise à accompagner les familles monoparentales qui veulent acheter un logement. « L’accès à la propriété est un véritable problème pour les monoparents, souligne Olivia Barreau. À peine 28 % des mères seules sont propriétaires, contre 63 % des couples avec enfants ! L’objectif est de s’appuyer sur un réseau, selon une charte de valeurs, pour leur faciliter cet accès. »

    Essaimer le modèle pionnier

    À l’automne ouvrira également un deuxième lieu dans le XIIIe, « un espace vraiment multiservice de 150 m2, avec de la restauration, la possibilité de travailler, des activités, du bien-être etc., et qui sera ouvert dès 8h30 le matin jusqu’à 20 heures. L’objectif est d’essaimer ce modèle d’accompagnement des familles, encore unique en France ». À Paris, l’association est en « discussion » avec une autre mairie d’arrondissement du centre de la capitale, histoire « que les mamans n’aient pas à traverser Paris avec 3 poussettes pour deux heures de bien-être ! », sourit Olivia Barreau. L’association lancera en septembre une campagne de financement participatif, afin d’assurer un budget de fonctionnement à ce « tiers-lieu » modèle. « Notre accompagnement est unique, nous avons besoin de partenaires et de soutiens », sourit Olivia Barreau.

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