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Erreurs médicamenteuses : causes, conséquences et prévention

25 juillet 2023
Personne sur le point de prendre ses médicaments.

Mauvais dosage, non-respect de la durée du traitement, prescription inexacte... Les erreurs médicamenteuses sont de natures très diverses. Découvrez les différentes conséquences possibles pour les patients, les causes de ces erreurs et comment les éviter.

Les différents types d'erreurs médicamenteuses

Une erreur médicamenteuse, c'est quoi ? 

Qu'entend-on exactement par "erreur médicamenteuse" ? L'Organisation mondiale de la Santé (OMS) parle "d'incidents évitables pouvant causer un dommage au patient ou pouvant mener à une utilisation inadaptée des médicaments. Il peut s'agir d'erreurs survenant lors de la prescription, la vente, l'administration, ou autre".  

Ces erreurs représentent une préoccupation majeure pour la santé publique.

Il ne faut toutefois pas confondre les erreurs médicamenteuses avec les effets secondaires d'un médicament.

Les différents types d'erreurs médicamenteuses

Les erreurs peuvent survenir à toutes les étapes du processus, que ce soit lors de la prescription, la délivrance, le stockage, la préparation ou encore l'administration d'un médicament, précise l'AFMPS (Agence fédérale des médicaments et des produits de santé). La faute peut donc provenir tant du médecin, du pharmacien, du personnel médical de l'hôpital ou de la maison de repos, que du patient.

Parmi les exemples les plus fréquents d'erreurs thérapeutiques commises par les patients, et communiquées par le Centre Antipoisons, on retrouve notamment :

  • Erreur lors de l'utilisation de la pipette de dosage des médicaments pour enfants : l'âge et le poids sont intervertis lors de l'administration ;
  • Erreur lors de l'utilisation d'une cuillère pour le sirop : une cuillère à soupe est par exemple utilisée à la place d'une cuillère à café ;
  • Administration d'un médicament pour adultes à un enfant ;
  • Mauvaise compréhension ou interprétation des consignes données par le pharmacien ;
  • Non-respect du dosage recommandé d'un médicament ;
  • Problèmes de mémoire, notamment chez les personnes âgées, qui prennent trop ou trop peu de doses d'un médicament.

Les erreurs médicamenteuses sont-elles fréquentes ?

Si les erreurs médicamenteuses sont fréquentes, leurs nombres sont difficiles à déterminer pour plusieurs raisons. Tout d'abord, elles ne sont pas systématiquement notifiées : le personnel de santé préfère ne pas communiquer de tels incidents, et les patients ne sont pas toujours conscients qu'une erreur a été commise. Les études menées sur le sujet aboutissent souvent à des résultats très différents, par exemple parce que l'échantillon de patients est différent, ou parce que la définition retenue pour l'erreur médicamenteuse n'est pas la même.

Ainsi, l'AFMPS n'a reçu que... 112 signalements entre 2016 et 2020. Le Centre Antipoisons (qui encore une fois reçoit les notifications liées aux erreurs des patients) donne une idée plus précise du nombre d'incidents, mais aussi de leur nature. Pour l'année 2021, il totalise 10 900 signalements, dont : 

 

Ces chiffres ne donnent toutefois qu'un aperçu du phénomène, et non une image complète.

Que risque le patient à la suite d'une erreur médicamenteuse ?

Une erreur médicamenteuse n'implique pas forcément des conséquences pour le patient. Dans la majorité des cas, ce dernier ne connaitra aucune complication grave, voire aucune complication tout court. L'ampleur dépend de multiples facteurs comme le médicament, le type d'erreur, la durée, le profil du patient, etc.

Elle peut affecter plus sévèrement des patients très jeunes, mais aussi âgés. Cette dernière catégorie de patients ayant souvent recours à davantage de médicaments, elle est par ailleurs plus exposée. 

Complications médicales sévères

Dans certains cas, l'erreur pourra en revanche provoquer des dommages sérieux, voire le décès du patient. C'est par exemple le cas lors de la prise de doses trop élevées de paracétamol. Les cas graves peuvent infliger des dommages irréversibles au foie, ce qui nécessite alors une transplantation. Fait marquant : dans son rapport 2021, le Centre Antipoisons note une très nette hausse des incidents liés au paracétamol (+ 17 %). L'une des raisons est l'omniprésence de ce principe actif dans de nombreux médicaments destinés tant aux adultes qu'aux enfants, sans que les patients soient pour autant au courant de sa présence : Dafalgan, Perdolan, Algostase, Zaldiar, Panadol, Sinutab,...

Lorsqu'elles surviennent dans les hôpitaux, les erreurs médicamenteuses provoquent généralement des dommages plus importants. D'abord parce que les patients souffrent d'affections plus sévères. Ensuite parce que les médicaments prescrits sont plus complexes que pour une utilisation domestique.

Certains médicaments sont considérés comme étant à haut risque. C'est notamment le cas pour les anticoagulants, les médicaments utilisés contre les infections, l'insuline, les opioïdes ou encore les anticancéreux. Certains de ces médicaments n'offrent qu'une très petite marge de manœuvre, et la frontière entre leurs effets thérapeutiques et toxiques est fine.

Les médicaments dits LASA (look-alike en sound-alike) sont également à risque. Il s'agit de médicaments partageant un nom ou un emballage similaire, ce qui peut créer de la confusion et donc des erreurs tant chez les professionnels que chez patients. Cela étant, ils ne sont pas forcément à haut risque au niveau de la gravité des complications pour la santé.

 

Enfin, les périodes de transition sont également propices aux erreurs médicamenteuses. Il peut s'agir d'un patient qui passe d'un service à l'autre à l'hôpital, d'une maison de repos à un hôpital (ou inversement), d'un médecin généraliste vers un spécialiste, etc.

Combien de patients décèdent des suites d'une erreur médicamenteuse ?

Nombre de décès liés à une erreur médicamenteuse

Dans les cas les plus graves, les erreurs médicamenteuses peuvent causer ou contribuer au décès d'un patient. Si nous ne disposons d'aucun chiffre en Belgique, une étude sur le sujet publiée en 2020 au Royaume-Uni, pays dont la population est six fois plus grande, permet d'avoir une idée de l'ampleur du phénomène. Selon le rapport, pour un total estimé de 237 millions d'erreurs médicamenteuses annuelles, un peu plus de 2 400 personnes décèdent chaque année (712 décès directement liés et 1 708 contributions à un décès).

Quels symptômes permettent de déceler une erreur médicamenteuse ?

Les symptômes les plus courants lors d'une erreur médicamenteuse

Une erreur médicamenteuse peut avoir des conséquences de natures très diverses, pouvant aller d'une absence totale de symptômes au décès du patient. Il n'est pas possible de dresser une liste de symptômes récurrents puisqu'ils dépendent du médicament administré et du type d'erreur.

Comment reconnaitre une erreur médicamenteuse ?

Pour les mêmes raisons, déceler une erreur médicamenteuse n'est pas évident. Il convient d'être attentif aux symptômes qui peuvent survenir si vous prenez un nouveau médicament, avec ou sans ordonnance, voire d'autres produits de santé comme des compléments alimentaires. En cas de doute, consultez la notice et prenez contact avec votre pharmacien ou médecin.

Que faire en cas d'erreur médicamenteuse ?

Notifier l'erreur

Si vous prenez conscience d'une erreur médicamenteuse, prenez contact avec votre médecin ou avec le Centre Antipoisons. Ils pourront répondre à vos questions, vous informer des complications fréquentes liées à votre cas, et des étapes à suivre. Le Centre Antipoisons est joignable en permanence au 070/245.245 (numéro gratuit) ou au 02/264.96.30 (numéro payant au tarif normal). En cas d'urgence, préférez le numéro d'appel d'urgence européen 112.

Il est également utile d'informer l'AFMPS de l'erreur médicamenteuse, même si celle-ci n'engendre aucun problème de santé. Elle pourra permettre à l'agence de comprendre les éléments qui ont contribué à l'erreur, ce qui pourra contribuer à éviter qu'elle ne se reproduise à l'avenir : par exemple, en adaptant l'emballage du médicament.

Si l'erreur médicamenteuse ne provoque pas d'effet secondaire, ou s'il s'agit simplement d'une suspicion, elle peut être signalée à l'adresse medication-errors@afmps.be. Si l'erreur médicamenteuse provoque des effets secondaires, elle doit être signalée via le site web de l'AFMPS.

Comment empêcher les erreurs médicamenteuses ?

Améliorer la communication et la coopération

L'utilisation des médicaments est un processus complexe qui met à contribution plusieurs professions au sein du monde médical. Les erreurs peuvent survenir à toutes les étapes du processus, de la prescription, à la délivrance en passant par l'administration ou l'évaluation de l'utilité pour les patients. Une communication claire et régulière entre ces différents acteurs, mais aussi avec les patients, est donc capitale

Mise en place de processus de médication sûrs

Qui plus est, le vieillissement de la population et l'utilisation de plus en plus régulière des médicaments augmentent encore l'importance de la question des erreurs médicales et des mesures à déployer pour les éviter. Tous les acteurs - industrie pharmaceutique, médecins, pharmaciens, hôpitaux, maisons de repos mais aussi patients - devront jouer leur rôle.

Dans le cadre d'une campagne pour lutter contre les erreurs médicamenteuses, l'OMS a développé un outil baptisé START (Starting - Taking - Adding - Reviewing - Stopping). Il passe en revue les grandes étapes d'un traitement (Début du traitement - Prise du médicament - Ajout d'un médicament - Evaluation du médicament et Arrêt) et la manière dont la sécurité peut être améliorée ou garantie. A chacune de ces cinq étapes, ce protocole fournit une série de questions que le patient doit se poser pour éviter de commettre une erreur :

 

Conseils pratiques pour éviter les erreurs médicamenteuses 

  • Lire attentivement la notice et vérifier l'emballage du médicament : si ce conseil peut sembler évident, il est important de rappeler que l'emballage des médicaments et la notice contiennent quantité d'informations sur l'utilisation et la composition des médicaments. Sur la boîte, sous le nom commercial du médicament généralement écrit en grand, vous trouvez le nom du principe actif qui le compose. En le consultant, vous éviterez de possibles erreurs ou surdosages d'un même principe actif.
  • Attention aux marques ombrelles : il s'agit de produits différents vendus sous un nom quasiment identique. Muco Rhinatiol, Nasa Rhinatiol et Rhinatiol Antirhinitis sont par exemple autant de médicaments actuellement disponibles pour les consommateurs. Ces dénominations semblables augmentent le risque d'erreur.
  • Dosages différents pour un même médicament : attention certains médicaments sont vendus avec un emballage quasiment identique alors que le dosage est différent. 
  • Conserver correctement ses médicaments : les médicaments doivent être conservés au frais, au sec et en sécurité hors de portée des enfants. Evitez par exemple de les conserver à la salle de bain (chaleur et humidité). Certains médicaments doivent être conservés au frigo, n'hésitez pas à demander conseil à votre pharmacien. Veillez également à les conserver dans leur emballage d'origine sans perdre la notice d'utilisation.
  • Être attentif lors des périodes de transition : comme expliqué auparavant, soyez particulièrement attentifs lors des périodes de transition. La communication est capitale.
  • Faire une liste des traitements : conserver une liste de l'ensemble des produits de santé que vous utilisez (médicaments, mais aussi vitamines, compléments alimentaires, etc.). L'INAMI a par ailleurs lancé une initiative appelée "pharmacien de référence". Elle vise à venir en aide à des personnes prenant quotidiennement plusieurs médicaments. Le pharmacien peut alors "tenir à jour le schéma de médication [du] patient et le rendre accessible aux autres dispensateurs de soins ayant avec lui une relation thérapeutique".