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Médicaments présentés comme des dispositifs médicaux

28 septembre 2019

Dans les rayonnages, il n’est pas rare de trouver des dispositifs médicaux dotés en réalité de toutes les caractéristiques d’un médicament. Et ce, tandis que la législation en la matière diffère fortement. Les dispositifs médicaux peuvent ainsi arriver sur le marché sans que leur efficacité et leur sécurité aient été contrôlées dans des études cliniques dignes de ce nom. Nous invitons l’Agence des Médicaments à prendre de toute urgence les mesures qui s’imposent.

Le terme "dispositif médical" n’est malheureusement pas simple à définir. Un simple pansement et des implants tels qu'un pacemaker ou une prothèse de hanche relèvent de cette appellation. Tous ont un dénominateur commun : ils ont une action mécanique ou physique. C’est donc clairement différent d’un médicament qui fonctionne par interaction chimique avec l’organisme.

Sur le plan légal, le statut de dispositif médical s’avère nettement plus attractif pour les firmes que celui de médicament. Les dispositifs médicaux peuvent être mis sur le marché sans que des études cliniques appropriées démontrent leur efficacité et leur sécurité. L’évaluation des dispositifs médicaux est d’ailleurs laissée à des entreprises privées, les "organismes notifiés" (notified bodies). Cette législation plus souple explique d’emblée pourquoi certaines firmes tentent de commercialiser leur produit en tant que dispositif médical, alors qu’en réalité, il n’en est rien. Et c’est vous, consommateur, qui en faites les frais. 

Choix de la firme

Les firmes peuvent choisir elles-mêmes le statut sous lequel elles commercialisent leur produit (p. ex., médicament ou dispositif médical). Bien sûr, elles sont tenues de respecter plusieurs dispositions légales lors du choix de ce statut. Toutefois, certaines firmes déploient des trésors d’imagination en la matière. Certaines d’entre elles affirment par exemple que leur produit a une action mécanique en déposant un film sur la paroi intestinale par exemple. Pour le reste, ces produits ressemblent fortement à un médicament : ils ont une indication médicale, comme le traitement de la diarrhée par exemple, il s’agit souvent de comprimés ou d’un sirop, et dans l’emballage, figure un papier aux allures de notice. Certaines firmes vont même jusqu’à baptiser leur produit d’un nom semblable aux médicaments de leur gamme. Pour ainsi profiter de cette notoriété et mieux les vendre.

Notre analyse

Nous avons analysé 33 produits pour déterminer s’il s’agissait véritablement de dispositifs médicaux. Ensuite, notre équipe santé a évalué l’efficacité et la sécurité. Une action mécanique a été considérée comme plausible pour sept produits destinés à humidifier les yeux secs et deux produits pour ingestion par la bouche, Dulcogas et Infacol. Tous se présentaient en tant que médicaments, surtout ceux qui se prennent par voie orale.

Selon nous, les 24 autres produits analysés avaient une interaction chimique avec l’organisme. Il s’agit donc de produits agissant comme un médicament et qui devraient suivre la procédure d’enregistrement en tant que tel. Dans quelques cas, le produit aurait éventuellement pu être commercialisé en tant que complément alimentaire ou cosmétique en raison de sa composition, mais dans ce cas, les allégations thérapeutiques doivent au moins disparaître. 

De nombreuses firmes n’ont pu présenter d’études cliniques démontrant l’efficacité et la sécurité de leur produit. Dans 26 des 33 produits, l’efficacité n’a pas pu être démontrée de manière probante. Selon nous, 13 produits ont une utilité contestable, et 13 sont à déconseiller. Vous trouverez ici une évaluation complète. 

Découvrez les évaluations

Mesures souhaitées

Nous avons demandé à la Commission Mixte de l’Agence des Médicaments (AFMPS) de bien vouloir analyser ces produits de manière approfondie et de prendre les mesures qui s’imposent. Il s’agit d’une commission qui livre des avis en cas de doute sur le statut d’un produit. Par ailleurs, nous exigeons des mesures structurelles pour éviter la commercialisation de produits médicaux sous le mauvais statut. À cet effet, nous avons adressé un courrier à Madame Maggie De Block, Ministre de la Santé Publique, ainsi qu’à l’AFMPS.