Adolescent tué à Nanterre par un tir policier : « On veut la vérité et on la veut vite », réagit le maire  

Patrick Jarry, le maire (DVG) de la ville des Hauts-de-Seine, veut des réponses après qu’un fonctionnaire de police a mortellement touché par un tir un automobiliste de 17 ans, ce mardi matin, après un refus d’obtempérer. Les circonstances du drame sont encore floues alors qu’une vidéo contredit la première version des policiers.

    Le périmètre de sécurité a été levé à 13 heures. Toute la matinée, un important dispositif policier a été déployé sur les lieux du drame, avenue Frédéric-et-Irène-Joliot-Curie, à Nanterre, tandis que des rubalises entouraient une voiture jaune empêchant jusqu’à l’accès au bureau de poste et aux escaliers de l’esplanade de la préfecture des Hauts-de-Seine. Les policiers ont été remplacés par quatre fourgons de gendarmes mobiles, qui restent stationnés sur la place Nelson-Mandela, où l’émotion reste vive.

    Riverains et connaissances de la victime sont sous le choc. « Ils m’ont pris mon petit-fils », hurle, désespérée, la grand-mère de Nahel, un adolescent de 17 ans, qui a été mortellement touché par le tir d’un policier, ce mardi matin, après qu’il a refusé d’obtempérer aux injonctions des forces de l’ordre.

    Selon la police, le jeune automobiliste aurait foncé sur un agent

    Le drame s’est noué ce mardi matin, vers 8h15, à hauteur de la place Mandela, près de la station de RER Nanterre-Préfecture. Des policiers à moto de la Direction de l’ordre public et de la circulation (DOPC) de la préfecture de police de Paris somment le conducteur d’une Mercedes de couleur jaune de s’arrêter pour un contrôle. Le garçon aurait d’abord arrêté son véhicule, avant de redémarrer brutalement.

    Selon la version policière, un agent aurait fait feu alors que le jeune automobiliste lui aurait foncé dessus. « Il a été abattu à bout portant, alors qu’il n’y avait aucune mise en danger pour les policiers. C’est scandaleux ! », s’emporte « un ami d’enfance » de la victime, en regardant les images d’une vidéo largement diffusée sur les réseaux sociaux, en fin de matinée.

    « On ne tire pas sur un mineur comme cela »

    Elle montre que le policier qui a ouvert le feu n’était pas positionné devant le véhicule récalcitrant, comme initialement rapporté par la police, mais au niveau de la portière avant gauche. Sur ces images, on peut voir le fonctionnaire braquer le conducteur avec son arme de service, avant de faire feu à bout portant quand le véhicule redémarre en trombe.

    « Une balle dans la tête pour un permis, ce n’est pas normal », abonde Omar, père d’un ami de la victime et habitant du quartier des Provinces-Françaises, près de la place Nelson-Mandela. « C’était une crème, un garçon adorable. On ne tire pas sur un mineur comme cela, dénonce une voisine de la victime, habitante du quartier Salvador-Allende. Je n’ai qu’un fils, comme la maman du jeune homme. Aujourd’hui, elle n’a plus rien. » La mère de la victime s’est également rendue sur place, très choquée mais surtout très en colère.



    Selon une source policière, la victime, qui était livreur, a été touchée par balle à hauteur de la poitrine, du côté gauche. La Mercedes qu’il conduisait s’est ensuite encastrée dans un poteau. Un massage cardiaque a été pratiqué sur le conducteur pour tenter de le réanimer. En vain.

    « On veut la vérité et on la veut vite », demande le maire

    « Le décès (de la victime), âgée de 17 ans et connue des services de la justice, notamment pour refus d’obtempérer, a été constaté à 9h15, suite à au moins une blessure par arme à feu », précise le parquet de Nanterre, qui relève la présence de trois personnes à l’intérieur de la Mercedes AMG, « selon les premiers éléments de l’enquête ». Un passager arrière, « également mineur », a été interpellé et placé en garde à vue. Le troisième passager est parvenu à prendre la fuite.

    Lors d’un point presse organisé à l’hôtel de ville, ce mardi après-midi, le maire (DVG) de Nanterre Patrick Jarry a fait part de son émotion et s’est dit « bouleversé » par le drame. « On pense évidemment à la maman et aux proches de la victime. C’est toute une ville qui est endeuillée par ce qui vient de se passer. »

    « Les images qui tournent en boucle sur les réseaux sociaux sont accablantes », a-t-il ajouté, au sujet de la vidéo partagée en ligne ce matin. « Nous espérons que des éléments de l’enquête seront communiqués le plus rapidement possible. Je crois qu’il y a un immense cri de la ville de Nanterre : On veut la vérité, et on la veut vite. »

    La municipalité de Nanterre a indiqué avoir mis à disposition de la police les images capturées par les caméras de vidéosurveillance implantées autour de la place Nelson-Mandela. Patrick Jarry a également appelé « chacun et chacune à la retenue et à la dignité malgré l’émotion légitime suscitée par ce drame. Pour l’heure, le temps est au deuil, avec la famille. »

    13 décès en 2022, un record

    Le parquet de Nanterre indique avoir ouvert deux enquêtes en flagrance, l’une pour refus d’obtempérer et tentative d’homicide volontaire sur personne dépositaire de l’autorité publique, confiée au commissariat de Nanterre et à la sûreté territoriale du 92, l’autre pour homicide volontaire par personne dépositaire de l’autorité publique confiée à l’IGPN (Inspection générale de la police nationale). Des agents de la police des polices sont d’ailleurs sur place en ce milieu de matinée.

    Nanterre, ce mardi matin. Des agents de l'IGPN, la police des polices, se sont rendus sur place.
    Nanterre, ce mardi matin. Des agents de l'IGPN, la police des polices, se sont rendus sur place.

    En 2022, pas moins de 13 personnes sont décédées après des refus d’obtempérer lors de contrôles routiers, un record. Cinq policiers ont été mis en examen dans le cadre de ces enquêtes. Les autres fonctionnaires mis en cause ont été libérés sans poursuite à ce stade.

    Pour les syndicats de police et les autorités, cette explosion du nombre de refus d’obtempérer mortels serait lié aux comportements au volant de plus en plus dangereux. Mais certains chercheurs et avocats dénoncent pour leur part la loi de 2017, qui a assoupli l’usage de leur arme par les forces de l’ordre.