Paris : un projet de ferme aquaponique inquiète les riverains

«Le projet d’aquaculture a des aspects positifs, admet le maire du XVe arrondissement de Paris, mais le choix du site pose question».

 Rue de l’Abbé-Groult (XVe). Le réservoir de Grenelle, bassin à ciel ouvert de 6000 m3, sert de protecteur climatique et de réserve de biodiversité. La ferme urbaine qui doit y être aménagée inquiète les riverains.
Rue de l’Abbé-Groult (XVe). Le réservoir de Grenelle, bassin à ciel ouvert de 6000 m3, sert de protecteur climatique et de réserve de biodiversité. La ferme urbaine qui doit y être aménagée inquiète les riverains. (LP/E.S.)

    Le soulagement n'aura pas duré longtemps, rue de l'Abbé-Groult, dans le XVearrondissement de Paris, où les défenseurs du réservoir d'eau non potable de Grenelle, sortis victorieux de trois années de bras de fer avec la mairie de Paris, craignent désormais que le remède s'avère aussi néfaste que le mal qu'ils avaient écarté : une ferme urbaine aquaponique, combinant aquaculture et plantations hors-sol, doit s'y installer.

    Exit certes le projet de détruire le bassin à ciel ouvert de 6 000 m 3, construit au-dessus de galeries voûtées du XIX e siècle; exit aussi son remplacement par trois immeubles, dont une barre de logements de 30 m de long. Protégé par un amendement voté fin 2015 au Schéma directeur de l'eau non potable de Paris, et destiné à devenir dès cette année l'un des «lieux d'écologie urbaine» retenus dans le cadre de l'appel à projets « Parisculteurs », le réservoir haussmannien risque pourtant d'y perdre sa vocation de protecteur climatique et de réserve de biodiversité.

    2 000 m2 de galeries à voûtes en meulière et béton courent sous le réservoir

    (LP/E.S.)

    «Sans ce bassin, le secteur risque de devenir un îlot de chaleur insupportable»

    «Le réservoir de Grenelle est niché au milieu d'un quartier dense et l'un des plus construits de Paris», souligne Agnès Lozet, qui préside l'association Respiration Paris15 et dont le balcon donne sur le réservoir. «Sans ce bassin, le secteur risque de devenir un îlot de chaleur insupportable. Sans compter l'impact sonore des pompes et des installations techniques qui le recouvriront ! Dans la situation de "stress hydrique" décrété par la préfecture de Paris, qu'adviendra-t-il de toutes les surfaces qui ne résisteront pas à plusieurs jours de chaleur sans arrosage ?»

    La reconnection de plusieurs réservoirs aujourd'hui «neutralisés» est en effet envisagée de plus en plus sérieusement par les autorités, pour répondre aux besoins tels que les lavages des rues, des véhicules publics ou l'arrosage des parcs.

    Résultat, entre bétonisation et aquaculture, les riverains ne savent plus trop comment sauvegarder leur bassin, et repartent au front pour demander le gel du projet. «On parle de réchauffement climatique, de l'importance de la biodiversité… Ici, au moment des migrations, il nous arrive de voir un héron se poser sur le bassin, il y a de nombreuses espèces d'oiseaux, et les galeries sont des lieux de nidification reconnus par les ornithologues ! Nous ne comprenons vraiment pas cette décision», s'inquiète Agnès Lozet. Respiration Paris 15 demande également des études d'impact sonore et de chaleur sur le site.

    Une réunion consacrée à ce projet «Green'Elle» est prévue jeudi avec la mairie de Paris. Le maire du XVe, Philippe Goujon, devrait apporter de l'eau au moulin des protecteurs du réservoir : «Le projet d'aquaculture a des aspects positifs, admet-il, mais le choix du site pose question».

    Des légumes et des poissons d’eau douce