« Une offensive calibrée pour durer jusqu'à la mi-janvier »

YVONNICK DENOÃ?L, spécialiste du renseignement

« Une offensive calibrée pour durer jusqu'à la mi-janvier »

    Historien et spécialiste du renseignement, Yvonnick Denoël vient d'achever « Guerres secrètes au Moyen-Orient » (Nouveau Monde Editions, 260 pages, 19 â?¬) qui sortira en librairie le 8 janvier.

    Quel est le but de cette offensive israélienne sans précédent depuis l'évacuation de Gaza ?

    Yvonnick Denoël. Il est à la fois politique et militaire. Le but initial est de casser le Hamas et donc de frapper très fort pour gagner et avoir la tranquillité pendant au moins deux ou trois ans sur ce front. Cette opération répond à une triple motivation d'Israël : 1. l'envie d'y aller pour en découdre avec le Hamas et prendre sa revanche sur la guerre ratée contre le Hezbollah en août 2006 ; 2. l'opportunité politique, car nous sommes dans une phase d'interrègne aux Etats-Unis comme au sein de l'Union européenne ; 3. la nécessité militaire, car les services de renseignement israéliens ont acquis la certitude que le Hamas était en train de reconstruire à Gaza un réseau de bunkers enterrés (comme le Hezbollah l'avait fait au Sud-Liban) et de nombreux tunnels à la frontière égyptienne lui permettant de s'armer malgré le blocus. Dans quelques mois, il sera beaucoup plus difficile pour Israël de s'en prendre au Hamas.

    Cette opération est-elle liée aux élections prévues en Israël le 10 février?

    Bien évidemment, car Tzipi Livni, le leader de Kadima qui lorgne le poste de Premier ministre, comme les travaillistes du ministre de la Défense, Ehoud Barak, sont largement distancés dans les sondages par le Likoud (NDLR : droite) de l'ancien Premier ministre Benyamin Netanyahou, qui a promis de frapper dur Gaza s'il revenait au pouvoir. Ils ne veulent donc pas apparaître comme des mous face au Hamas.

    Ces bombardements vont-ils durer encore longtemps?

    Cette opération a été prévue et calibrée pour durer jusqu'à la mi-janvier, c'est-à-dire pratiquement jusqu'à l'investiture de Barack Obama, le 20 janvier, car les Israéliens savent qu'ils n'auront plus jamais d'occasion aussi favorable. L'administration Obama sera beaucoup moins pro-israélienne que l'administration Bush. Les Israéliens ont donc pesé le pour et le contre d'une telle offensive, mais ils ont jugé que c'était pour eux la dernière chance de faire le nettoyage avant de devoir, un jour, s'asseoir à une table de négociations, où ils préfèrent bien sûr arriver en position de force.

    N'y a-t-il pas un risque d'embrasement de toute la région et, notamment, du Liban?

    C'est un risque modéré, mais je n'en suis pas sûr, car le Hezbollah qui connaît actuellement des dissensions internes est encore très désorganisé. Il n'a donc d'intérêt ni politique ni militaire à entrer dans la guerre, même s'il y aura peut-être quelques actions terroristes comme des tirs de katiouchas sur Israël.