Décollage imminent pour le premier équipage de la station spatiale chinoise

L’ESA espère y envoyer un jour des Européens, « mais les discussions n’ont pas encore été conclusives », explique un cadre de l’agence.

Les astronautes chinois Tang Hongbo, Nie Haisheng et Liu Boming, au centre de lancement de Jiuquan, le 16 juin 2021. AFP / GREG BAKER
Les astronautes chinois Tang Hongbo, Nie Haisheng et Liu Boming, au centre de lancement de Jiuquan, le 16 juin 2021. AFP / GREG BAKER

    On s’en souvient : il y a quelques semaines, le retour sur Terre de l’étage principal d’une fusée chinoise avait suscité un certain émoi... avant que l’on apprenne qu’il avait terminé sa chute dans l’Océan indien. Les conditions imprévisibles de cette rentrée atmosphérique avaient éclipsé l’objectif, réussi, du lancement : mettre en orbite Tianhe, la première « brique » de la CSS, la station spatiale chinoise ! Cette semaine, la Chine compte y envoyer ses trois premiers astronautes, pour un séjour de trois mois à bord. Une durée de vol inédite pour le pays qui lance là sa première mission habitée en cinq ans.

    Mercredi, la Chine a confirmé la date et l’heure du décollage depuis le désert de Gobi : jeudi matin, à 3h22, heure de Paris. D’abord planifié le 10 juin, le départ a été différé suite à l’amarrage tardif, fin mai, d’un vaisseau cargo ayant livré, selon l’agence de presse d’Etat Chine nouvelle, « des fournitures, des équipements et du propergol » à la station. Mercredi dernier, l’agence a annoncé que Shenzhou-12, le vaisseau des trois passagers, et la fusée Longue Marche étaient arrivés sur la zone de lancement. L’annonce de la composition de l’équipage n’a été faite officiellement que mercredi, confirmant le nom de Nie Haisheng, un astronaute de 56 ans ayant déjà pris part à deux missions, dans le rôle de commandant. Il sera accompagné de Liu Boming et Tang Hongbo.

    Les trois astronautes devront tester les équipements de la station, réaliser des expériences scientifiques, sensibiliser le public et assurer un suivi de leur santé, selon Chine Nouvelle. Deux sorties extravéhiculaires sont également prévues. « Leur travail sera plus compliqué et plus difficile que lors des précédentes missions en équipage », a prévenu Hao Chun, directeur de China Manned Space Agency (CMSA).

    Une présence continue en 2022

    Jusqu’à présent, onze Chinois, hommes et femmes, sont partis pour l’espace. Une majorité d’entre eux ont volé au sein de deux prototypes de la station spatiale lancés au cours de la dernière décennie. Aujourd’hui, l’heure n’est plus aux petits pas : à bord de la station définitive, également appelée Tiangong, la présence de taïkonautes devrait être continue à partir du printemps 2022. C’est également l’année prochaine que la CSS doit être achevée, après l’envoi de deux laboratoires.

    Le module principal de la station, Tianhe, ressemble à s’y méprendre à Mir, la station spatiale qui a orbité autour de la Terre entre 1986 et 2001. « Comme d’habitude, ils ont fait de la réinnovation à la chinoise, en regardant les fonctionnalités qui ont prouvé leur fiabilité, en faisant quelque chose qui répond plus à l’état de l’art du moment et à leurs besoins », a analysé Philippe Coué, chercheur et auteur indépendant, pour Le Parisien.

    L’Agence spatiale européenne (ESA) espère un jour envoyer dans la CSS ses propres astronautes. « Nous avons signé en 2015 un accord, accepté à l’unanimité des Etats membres, pour faire voler des astronautes européens dans la station, mais les discussions n’ont pas encore été conclusives », explique Karl Bergquist, responsable des relations extérieures de l’agence. Plusieurs Européens avaient commencé à apprendre le mandarin en intensif. Des exercices conjoints avaient eu lieu dans des grottes en Italie et en Chine. Mais dans un secteur très multilatéral, les tensions grandissantes entre la Chine et les Etats-Unis semblent avoir mis le projet en suspens.

    Pour le pays asiatique, le décollage de jeudi s’inscrit dans une séquence faste, qui coïncide avec les cent ans du Parti communiste chinois : retour d’échantillons lunaires en décembre, atterrissage du robot Zhurong sur Mars en mai... Une série d’événements que salue Karl Bergquist : « C’est très impressionnant ! »