Sécheresse en Seine-et-Marne : « Une souris s’est introduite par une des fissures de la maison»

La reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle pour la sécheresse de 2017 a été refusée à 25 des 26 communes du 77 qui en avaient fait la demande. Les dégâts causés sont pourtant bien réels.

 Villemareuil, fin septembre. Jonathan montre les nombreuses fissures qui lézardent sa maison. L’une d’elles est si béante que le trentenaire peut y glisser sa main (en bas à droite).
Villemareuil, fin septembre. Jonathan montre les nombreuses fissures qui lézardent sa maison. L’une d’elles est si béante que le trentenaire peut y glisser sa main (en bas à droite). LP/A.A.

    Alors que l'attention était concentrée sur des communes frappées par les inondations et les coulées de boue de mai et juin, un autre arrêté de catastrophe naturelle, bien moins médiatisé, a été publié au cœur de l'été.

    Il porte sur la sécheresse de 2017. Vingt-six communes de Seine-et-Marne ont déposé un dossier en lien avec cet épisode*. Seule Verdelot a vu sa démarche aboutir.

    Contrairement aux sinistrés des inondations, les victimes de la sécheresse ont du mal à faire valoir leur situation. Que pèsent quelques fissures face à un logement noyé sous les eaux?

    « L'impact est tout aussi énorme », souligne pourtant Karine. Depuis l'apparition des premières fissures dans leur maison à Villemareuil, au cours de l'été 2015, elle et son conjoint Jonathan se battent pour obtenir réparation.

    Sans succès pour l'heure : les dossiers de Villemareuil pour les sécheresses des années 2015 et 2016 ont été rejetés. Aucun dossier n'a été envoyé pour l'année 2017.

    « Les conditions météorologiques n'étaient pas réunies, justifie le maire Didier Tassin (SE). Mais nous allons déposer un dossier pour la sécheresse de cette année. »

    « La situation devient dangereuse »

    Le pavillon de Karine et Jonathan a été construit sur un sol argileux (lire ci-dessous), comme beaucoup d'habitations de la Brie. En trois ans, les mouvements de terrain liés à la sécheresse et à la réhydratation des sols ont lézardé toutes les pièces de leur habitation.

    A tel point que le trentenaire parvient à glisser sa main entre le carrelage et le mur du salon. « Notre maison est la plus touchée car elle ne possède pas de vide sanitaire, explique-t-il. Un jour, une souris s'est introduite chez nous ! »

    Villemareuil, fin septembre. En trois ans, les mouvements de terrain liés à la sécheresse et à la réhydratation des sols ont lézardé toutes les pièces de leur habitation.LP/A.A.
    Villemareuil, fin septembre. En trois ans, les mouvements de terrain liés à la sécheresse et à la réhydratation des sols ont lézardé toutes les pièces de leur habitation.LP/A.A. LP/A.A.

    Depuis 2015, un scénario se répète : les murs se recollent à mesure que les pluies reviennent, puis les fortes chaleurs de l'été font renaître les fissures. « Et ça ne fait qu'empirer d'année en année », souffle Karine.

    « Je comprends la colère des habitants, assure le maire. Je conseille aux futurs acheteurs de venir en mairie se renseigner, pour qu'ils aient toutes les informations avant d'acheter. »

    Au-delà de la question financière, le couple craint désormais pour sa sécurité et celle de ses deux enfants. « Les fissures attaquent la cage d'escalier et les chambres, note Karine. La situation devient dangereuse. »

    * Les dossiers d'Annet-sur-Marne, Champs-sur-Marne, Chelles, Claye-Souilly, Courtry, Crécy-la-Chapelle, Crégy-lès-Meaux, Croissy-Beaubourg, Esbly, Ferrières-en-Brie, Fontaine-le-Port, Lagny-sur-Marne, Lésigny, Livry-sur-Seine, Maison-Rouge, Le Mée-sur-Seine, Montévrain, Montry, Le Pin, Pontault-Combault, Saint-Thibault-des-Vignes, Savigny-le-Temple, Thorigny-sur-Marne, Torcy et Villevaudé ont été rejetés.

    COMMENT EST RECONNUE UNE CATASTROPHE NATURELLE

    A chaque épisode météorologique d'ampleur, la question de la reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle se pose aux municipalités sinistrées.

    La direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises (DGSCGC) y apporte des réponses. L'une d'elle en surprendra plus d'un : « Les dégâts et leur ampleur ne sont jamais pris en compte pour reconnaître une commune en état de catastrophe naturelle, et ce quel que soit le phénomène. »

    Pour les phénomènes de sécheresse et de réhydratation des sols, deux critères doivent être remplis.

    Le premier est « géotechnique », à savoir « un sol d'assise […] sensible aux phénomènes de retrait et/ou de gonflement », précise la DGSCGC. L'appréciation de cette condition repose sur une cartographie établie par le Bureau des recherches géologiques et minières.

    Le deuxième critère est « météorologique ». Chaque année, Météo France dresse un rapport à partir du bilan hydrique des sols. « Cette modélisation s'appuie sur une grille composée de mailles de 8 km de côté », ajoute la DGSCGC. Chaque commune est ainsi rattachée à une ou plusieurs maille(s).

    Or, si « la présence importante d'argiles sensibles au phénomène de sécheresse et de réhydratation des sols est avérée » pour de nombreuses communes en Seine-et-Marne, le niveau d'humidité des sols pour 2017 n'a permis de qualifier l'épisode de sécheresse d'anormal que pour Verdelot.