Epinay-sur-Seine : mobilisation de soutien à deux lycéens sans-papiers

Un rassemblement a eu lieu ce jeudi midi devant le lycée Feyder, en soutien à deux élèves de terminale sans-papiers. Faute de régularisation, ils ne pourront pas poursuivre leurs études.

 Epinay-sur-Seine, ce jeudi 7 juin 2018. Une soixantaine de personnes étaient rassemblées à midi devant le lycée Feyder, en soutien aux deux élèves sans-papiers.
Epinay-sur-Seine, ce jeudi 7 juin 2018. Une soixantaine de personnes étaient rassemblées à midi devant le lycée Feyder, en soutien aux deux élèves sans-papiers. LP/A.L.

    « Des papiers pour étudier », « Régularisation pour le bac et pour la fac », « Etudier, c'est leur liberté »… ce sont les slogans brandis par la soixantaine d'enseignants et d'étudiants en colère du lycée Feyder, ce jeudi midi, lors d'un rassemblement de soutien à deux élèves de terminale sans-papiers. Ils risquent de devoir renoncer à des études supérieures.

    Elsa*, venue du Congo, passe un baccalauréat « Sciences et technologies de la santé et du social » (ST2S), et vit en France depuis trois ans. Elouan*, lui, passe un baccalauréat S, et est installé en Seine-Saint-Denis depuis quatre ans, après avoir quitté l'Algérie.

    Des élèves motivés et impliqués

    Les deux élèves ont visiblement un parcours exemplaire. Steve Larranaga, le professeur principal d'Elsa témoigne : « Elle est consciencieuse, sérieuse, travaille beaucoup et n'est jamais absente. Elle adhère parfaitement aux valeurs de la République. Elle veut devenir infirmière, mais n'a pas pu s'inscrire aux concours. Son projet est donc reporté, elle se trouve bloquée dans son parcours. » Idem pour Elouan, que son professeur principal Sylvain Martins qualifie d'« exemple d'assiduité, d'engagement et de réussite ». Lui, veut être ingénieur. Et ne lâche rien : « Il vient très souvent au lycée pour réviser le bac, il s'assoit tout seul à une table de la bibliothèque. Il s'accroche, il travaille beaucoup », témoigne Inès, déléguée de la classe.

    Dans une impasse administrative

    Seulement tous deux ont vu leur dossier de demande de régularisation rejeté d'office par la préfecture. Motif : ils n'entrent pas dans « le cadre ». Pour être régularisés, les jeunes majeurs « doivent être entrés en France avant l'âge de 16 ans et justifier d'au moins 2 ans de présence à la date de leur 18e anniversaire », explique la préfecture. Les deux élèves de 20 ans, qui ne sont pas dans ce cas, ne sont donc pas en droit de s'inscrire dans l'enseignement supérieur, bien que leurs vœux sur la plateforme d'inscription Parcoursup aient été acceptés. Plus grave encore : ils sont menacés d'expulsion. « J'ai du mal à concevoir comment des élèves intégrés peuvent se retrouver dans cette impasse administrative, avec un risque de ne pas pouvoir poursuivre leurs études et d'être expulsés, s'insurge Éric Coquerel, député de la circonscription (FI). On ne peut pas considérer qu'il faut monter quatre étages et sauver un enfant pour pouvoir être régularisé. Ces deux jeunes, brillants, apportent de la richesse à notre pays. »

    Des recours envisagés

    L'espoir est encore permis. Le préfet, grâce à son pouvoir discrétionnaire, peut accorder des régularisations même si les demandes ont été rejetées. « Qu'il utilise ce pouvoir, c'est notre objectif », ont affirmé les enseignants lors de la mobilisation. Le Réseau éducation sans frontières (RESF), qui accompagne les deux élèves dans leurs démarches, va utiliser le référé liberté, une procédure utilisée en cas d'atteinte aux libertés fondamentales. Le droit à l'éducation en fait partie. Mais « si on va au tribunal administratif, ça va être long. La première année post-bac des élèves sera compromise », regrette Gérald Ascargorta, bénévole à RESF.

    Pour ces deux procédures, les enseignants vont faire une lettre ouverte, en expliquant à quel point ces deux élèves sont brillants et méritent de continuer leurs études. Une donnée qui peut jouer en leur faveur. Éric Coquerel, qui soutient la mobilisation, a quant à lui affirmé qu'il parlerait au recteur pour qu'il fasse son possible auprès du préfet.

    * Les prénoms ont été modifiés