Droits TV : l’heure est à la négociation entre la Ligue de football et Canal +

Un groupe de travail doit être mis en place pour négocier avec les diffuseurs de la Ligue et veiller à ce qu’ils paient les échéances dues.

 Pas un seul match de Ligue 1 n’a été diffusé en direct à la télévision depuis le dimanche 8 mars (illustration).
Pas un seul match de Ligue 1 n’a été diffusé en direct à la télévision depuis le dimanche 8 mars (illustration). LP/Arnaud Journois

    Dans le football français, il convient d'avoir une batterie de téléphone assez puissante en ce moment. En plein confinement, les échanges se multiplient entre la Ligue de football professionnel (LFP), la Fédération française (FFF), les clubs et les diffuseurs. En cause : le refus de Canal + de verser la prochaine échéance de 110 millions d'euros, prévue le 5 avril, à la Ligue. Il s'agit d'un montant lié à la notoriété des clubs.

    Les plus grosses écuries du Championnat de France (Paris, Marseille, Lyon) sont donc plus impactées que des équipes plus modestes, comme Brest ou Nîmes. Depuis ce week-end et encore hier, Vincent Bolloré (Vivendi, maison mère de Canal) et Noël Le Graët (FFF), ou Didier Quillot (LFP) et Maxime Saada (Canal +), n'ont cessé de converser avec les directeurs financiers des sociétés à chaque fois présents dans la conférence téléphonique.

    Ne pas jouer perso

    Les dirigeants les plus puissants de la L 1 sont les plus remontés contre la décision de la chaîne cryptée, qui prend le risque de se fâcher durablement avec des clubs qu'elle continuera de diffuser la saison prochaine, elle qui a racheté le lot 3 à BeIN (match du samedi 21 heures et du dimanche 17 heures).

    Pour continuer à négocier, un groupe de travail est mis en place par la Ligue, dont sa composition définitive sera validée vendredi par le bureau de l'instance. Il s'agit de ne pas reproduire les initiatives personnelles, comme celle de Bernard Caïazzo, le président du syndicat Première Ligue, qui avait eu l'idée d'un comité de pilotage sans la présidente de la Ligue, Nathalie Boy de la Tour. Forcément, il a dû abandonner ce projet très personnel.

    Le but est désormais de trouver un terrain d'entente sur les rencontres déjà retransmises par Canal + cette saison. « Rien dans le contrat ne dit que les échéances sont liées à des matchs diffusés. Il y a un calendrier de diffusion et un calendrier d'échéances de paiement qui n'ont rien à voir », stipule la chaîne cryptée, sous couvert d'anonymat, auprès de l'AFP.

    « Canal + n'est pas une banque »

    C'est le nerf de la guerre : pour la Ligue, Canal + doit au moins 42 millions d'euros sur les 110 prévus, au prorata des rencontres d'ores et déjà passées sur l'antenne. Elle dit que le droit est en sa faveur : tout produit consommé doit être réglé. Le 5 juin, Canal doit verser une dernière échéance à la LFP de 85 millions d'euros, cette fois au titre du classement final (peu de chance que le championnat soit terminé à cette date) et encore de la notoriété.

    « En cas de force majeure, lorsque les matchs ne sont plus livrés, les paiements sont suspendus. Là, on est en plein cas de force majeure », souligne encore la direction de la chaîne cryptée. « On applique strictement le contrat et on ne voit pas pourquoi on ferait autrement : Canal + n'est pas une banque. »

    Les diffuseurs pensent au coup d'après

    Face au déficit d'image et de manque de solidarité du groupe audiovisuel — sur les réseaux sociaux, les abonnés réclament le remboursement de leur quittance mensuelle —, Canal pourrait se retrouver prochainement dans l'obligation de régler au moins une partie de la note.

    De son côté, BeIN (201 millions d'euros par saison pour la L 1 et la L 2) n'a pas donné de réponse claire et tranchée sur sa volonté de s'acquitter de son dû alors que les championnats professionnels en France sont interrompus depuis le 13 mars. La chaîne du Qatar doit à la LFP 42 millions d'euros le 5 avril.

    Les diffuseurs pensent aussi à la suite : la Ligue 1 pourrait reprendre à huis clos et au pas de charge dans un calendrier ramassé. Les tribunes vides et les matchs en multiplex n'ont pas le même tarif. Ils veulent ainsi renégocier les sommes qu'il leur reste à débourser si un jour le foot reprend le chemin des terrains.