Boxe : Cissokho fait un crochet par la Sorbonne

Médaillé de bronze et capitaine de l'équipe de France aux Jeux olympiques de Rio, Souleymane Cissokho a effectué hier sa rentrée universitaire.

    Assis au fond de la salle, lunettes cerclées de noir sur le nez, rien ne le distingue de ses collègues. Attentif à son premiers cours, le jeune homme est un étudiant (presque) comme les autres. Sous les ors majestueux de la Sorbonne à Paris, Souleymane Cissokho effectue sa rentrée en master de droit et économie du sport. Il y a quelques semaines, aux Jeux olympiques de Rio, le boxeur et capitaine de l'équipe de France emmenait dans son sillage une équipe tricolore conquérante revenue du Brésil parée d'or, d'argent et de bronze.

    En ce jour de rentrée, tous les membres de la promotion se présentent à tour de rôle. Si Souleymane, 25 ans, licencié au club de Bagnolet (Seine-Saint-Denis), voulait passer incognito, c'est raté. Après une courte présentation, la professeur en charge du master le félicite pour son podium à Rio. Sa médaille de bronze chez les moins de 69 kg fut la première d'une moisson record pour la boxe tricolore. Il reçoit ensuite une salve d'applaudissements de ses camarades.

    « A l'époque, à Rio, je ne pensais pas à la Sorbonne, reconnaît Souleymane. C'est Brahim Asloum, champion olympique à Sydney (2000), qui a suivi cette formation il y a cinq ans qui m'en a parlé au retour. J'ai toujours eu besoin pour mon équilibre de ne pas faire que de la boxe. Pour ma stabilité, j'ai continué mes études en parallèle de l'entraînement », raconte celui qui sur son CV peut aligner d'autres mentions que ses médailles.

    Bachelier, licencié, diplômé en techniques commerciales, il répond à tous les critères d'excellence pour intégrer l'élite de l'enseignement à la française dans son cadre le plus prestigieux. Asloum, grand frère des Bleus à Rio et parrain de la promotion, souligne l'intérêt du master. « Ce que j'ai appris de cette formation en matière juridique et économique pour monter un club, le faire perdurer, gérer une carrière me sert tous les jours. A l'époque, ça m'a aussi permis de gérer la petite mort qu'est la fin d'une carrière. Grâce aux cours, j'ai ouvert d'autres perspectives pour la suite de ma vie. »

    De petite mort, pour Souleymane Cissokho, il n'en est pas encore question. Début 2017, une fois digéré son parcours olympique, il disputera son premier combat professionnel. Entre deux heures de cours et quelques devoirs à la maison, il frappe les sacs tous les jours. Simplement, au milieu du tourbillon post-Rio, il prépare son lointain avenir. « Plus tard, je monterai une académie pour les jeunes boxeurs. Il me faudra savoir comment procéder juridiquement et comment la faire grandir économiquement. Depuis Rio, j'ai aussi beaucoup de sollicitations, des propositions de contrat. J'ai besoin de bases solides pour ne pas faire n'importe quoi », confie le champion, dont les discours fédérateurs et républicains ont porté au-delà des limites du ring.

    « Un boxeur à la Sorbonne, c'est peut-être bizarre. Les autres étudiants m'ont parlé de lui et ils sont honorés de l'avoir avec eux en cours. C'est l'année de la boxe, et la Sorbonne grâce à lui y participe. Souleymane est notre fierté », se félicite Sophie Dion, députée (LR) de Haute-Savoie et directrice du master. « Si vous voulez une preuve supplémentaire que le cliché du boxeur limité intellectuellement est une légende, regardez Souleymane. Il est la preuve vivante du contraire », confirme Brahim Asloum.