Vendée Globe : Yannick Bestaven officiellement déclaré vainqueur

Charlie Dalin le premier arrivé, Yannick Bestaven, le 3e, devenu vainqueur et Boris Herrmann le naufragé. Récit d’une drôle de nuit aux Sables-d’Olonne, où rien ne s’est déroulé comme prévu.

    Cette édition 2020 du Vendée Globe ne ressemble décidément à aucune autre. Le dénouement s'est joué en plusieurs actes la nuit dernière et a scellé le destin de Yannick Bestaven, qui bien qu'il soit arrivé en 3e position aux Sables-d'Olonne, remporte le 9e tour du monde en solitaire.

    Les yeux pétillants, une fusée de détresse dans chaque matin, le skipper de Maître Coq remonte le chenal. Il est 5h45 ce jeudi, un feu d'artifice illumine le ciel. Bestaven se pincerait presque pour y croire. « J'avais imaginé plein de choses, c'est au-delà de mes espérances, finir en apothéose, c'est un rêve, un rêve d'enfant, sourit Yannick Bestaven. J'ai l'impression de vivre un rêve. » Il embrasse ses filles, n'en finit plus d'exulter. « On passe de la solitude à cette fête, à ces lumières, je ne réalise pas ce qui se passe… »

    Lorsque à 20h35, mercredi, Charlie Dalin a été le premier à couper la ligne d'arrivée, on sait que la nuit sera particulière. « J'ai franchi la ligne d'arrivée en premier, les honneurs de la ligne sont pour moi, ça, on ne pourra pas me le retirer », souligne le skipper d'Apivia. La situation est inédite. Le concurrent premier aux Sables, n'est pas forcément celui dont le nom s'inscrira au palmarès de la mythique épreuve. La faute aux fameuses « bonifications », ces heures de compensation dont bénéficient les concurrents qui le 30 novembre dernier se sont déroutés pour porter assistance à Kevin Escoffier.

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    Les images du skipper sur son maigre radeau de survie sont encore dans toutes les têtes, mais les crédits temps récupérés par Boris Herrmann (6 heures) et Yannick Bestaven (10h15) peuvent décider du vainqueur. Il est 20h50, et alors que Perrine se hisse sur le bateau de son compagnon Charlie Dalin, à 180 km de là, l'Allemand Boris Herrmann heurte un bateau de pêche. « Tout d'un coup, j'ai vu un mur à côté de moi, les bateaux se sont emmêlés, j'ai entendu des hommes crier », racontera plus tard celui qui aurait pu être le premier étranger à remporter la course.

    Dalin 2e, Burton, 3e

    A bord d'un semi-rigide (en raison de la marée, Apivia ne peut rejoindre le port), Charlie Darlin remonte le chenal, sous les fumigènes puis pose un pied à terre. Ses parents l'enlacent. « C'est cool que vous êtes venus », lâche Charlie, déphasé après 80 jours en solitaire. Son regard se tourne vers le trophée trônant sur le ponton. Un trophée, l'imagine-t-il déjà sans doute, qu'il ne brandira pas.

    Au large, Boris Herrmann est contraint de réparer le hauban tribord, rompu lors de la collision, afin d'éviter que son mât ne tombe. A minuit trente, Charlie Dalin n'en finit plus de raconter son tour du monde. Quatre heures et 9 minutes après son arrivée, il évoque la « pizza tiède » qu'il vient d'avaler, Louis Burton, lui, coupe la ligne à son tour. La joie est à la hauteur de la performance du Parisien d'origine : immense. Tel un cabri, le skipper de Bureau Vallée, rejoint par des copains déguisés en pingouin, bondit sur son bateau. Son moteur étant abîmé, la marée le permettant désormais, Louis est le premier des concurrents à remonter le chenal à bord de son Imoca. Sur le ponton, il retrouve ses deux enfants Lino et Edith.

    A quelques mètres de là, Mona et Loïse Bestaven se préparent à embarquer dans le semi-rigide qui part à la rencontre de Yannick, leur papa. « Je suis heureux, fier », lâche Louis qui, comme Dalin quelques heures plus tôt, essaie, dans une situation particulière, de trouver les mots pour expliquer le bonheur de « terminer le Vendée en coupant la ligne en 2e position »…là où, à l'issue d'une course « normale », il aurait simplement dit « de terminer 2e ».

    Météo dégradée, pas de bateaux accompagnateurs

    Au final, Burton finira 3e. Ses enfants ne le lâchent pas d'un pouce. « J'ai le mal de terre qui commence à arriver, je parle beaucoup, beaucoup, beaucoup, c'est un truc bizarre. » Il revient sur ces derniers jours de folie, où cinq concurrents se sont disputé la victoire. « C'était passionnant à suivre, à vivre, c'était passionnant d'être acteur, de scruter les vitesses des autres. » A 3h15, en conférence de presse, il s'excuse auprès de son sponsor d'avoir « bien abîmé le bateau ».

    Yannick Bestaven, contraint d'arriver avant 6h50 s'il souhaite l'emporter est à moins de 25 km. A 4h19, le voilà qui coupe à son tour la ligne. Sans grande monde autour de lui, et sans image. La météo s'est dégradée, les mauvaises conditions ont empêché les bateaux accompagnateurs de partir en mer. Aucun photographe n'a ainsi pu immortaliser l'arrivée de celui qui remporte le Vendée Globe 2020.

    Avec seulement 2 heures et 31 minutes d'avance, après plus de 80 jours en mer. La nuit avance, et on n'en a pas fini avec les imprévus. C'est désormais le passage d'un bateau sablier qui contraint les organisateurs à décaler d'une heure la parade, prévue à 4h30, pour les bateaux arrivés dans la nuit. Une heure plus tard, même avec un public réduit, la remontée du chenal est à la hauteur de l'événement. Avec un Yannick Bestaven aux anges.

    Le 8 novembre, 33 skippers avaient pris le départ. Huit ont abandonné durant cette course marquée par une météo difficile qui n'a pas permis de battre le record de 74 jours et 3 heures établi en 2017 par Armel Le Cléac'h.