Champagne pour les otages

Champagne pour les otages

    « Tout s'est très bien passé ! » « Ils n'ont pas été violents, ils étaient polis et même agréables. » Les uns après les autres hier, cinq des sept victimes de la prise d'otages d'une banque du MIN de Rungis, le 19 juin 2007, sont venus témoigner devant la cour d'assises de Créteil. Des récits déconcertants.

    « On pouvait circuler librement dans la banque, raconte Christian, un client. D'ailleurs, je suis descendu avec une employée dans une salle pour prendre un café. Je lui ai demandé pour rigoler s'ils avaient du champagne. Il y en avait au réfrigérateur. On a ouvert la bouteille en se disant si on doit mourir aujourd'hui, autant boire du champagne avant. » Dans la salle de la cour d'assises, si peu habituée aux fantaisies, c'est l'hilarité.

    Dans le box, Christopher L. et Loïc P., qui n'en demandaient pas tant, sourient. Les deux hommes de bientôt 29 ans pour le premier et de 24 ans sont jugés depuis lundi pour séquestration et attaques de banques. Pour Christopher L., ce ne sont pas moins de douze braquages, à Paris, en banlieue et en province qui lui sont reprochés.

    Syndrome de Stockholm

    « Ils étaient très corrects, se souvient Marie-France, une employée de la LCL. Ils nous disaient de ne pas nous inquiéter, qu'on était là pour travailler, pas pour se faire blesser. » Les cheveux grisonnants, le regard fuyant, Jean-Luc, caissier à la LCL, fait son entrée. En trente-deux ans de carrière, il a connu cinq braquages. C'est lui qui a ouvert la porte à Loïc P. « Quand je l'ai vu, il ne m'a pas paru inquiétant. J'ai pas vraiment eu l'impression d'être menacéâ?¦ Tout s'est passé calmement. S'il n'y avait pas eu des policiers, arme au poing dehors, ils seraient sortis et puis c'est tout. »

    Une remarque pleine de sous-entendus qui agace le président de la cour d'assises. « Pour moi, magistrat, quand on demande de l'argent avec une arme, c'est une violence physique. » Visiblement rompu à l'exercice, le caissier hausse les épaules. Quelques instants plus tôt, à la barre, un policier de la PJ de Créteil avait souligné « la sympathie » des otages pour leurs tortionnaires, proche du « syndrome de Stockholm ». « Ils ont même proposé de l'argent aux otages, relate le policier. L'un d'eux est parti avec trois billets de 50 â?¬ avant de restituer l'argent plusieurs mois après, pris de remords. Pourtant, dans ces moments-là, avec le stress, la peur d'être arrêtéâ?¦ tout peut arriver. »