VIDÉO. Non, la pluie ne vide pas les pistes cyclables

Biclou, épisode 31. Aux premiers jours de l’automne, quelques internautes ont affirmé que les cyclistes disparaissaient à l’aune des premières gouttes de pluie. Pourtant, ce n’est pas ce que les chiffres nous disent.

    Les cyclistes fondraient-ils avec le mauvais temps ? Fin septembre et début octobre à Paris, alors que de grandes journées chaudes et ensoleillées laissaient place à des semaines plus mornes et pluvieuses, quelques internautes se sont inquiétés de pistes cyclables désespérément vides.

    Comme le Délégué Général de l'association 40 Millions d'automobilistes Pierre Chasseray dans un tweet assez pessimiste :

    Des rues cyclables désertes les jours de mauvais temps ?

    D'autres ont relayé des photos et vidéos d'une rue de Rivoli désespérément grise et vide :

    La rue de Rivoli, artère emblématique de la capitale, autrefois temple de la voiture et désormais largement consacrée au vélo, se serait drastiquement vidée de ses cyclistes. Ne resteraient qu'une triste rue vide et des commerçants lésés par le virage pro vélo de la municipalité.

    « J'invite ces personnes à filmer des routes où il n'y a pas de voitures. Ou mieux, des rails de train, qui sont vides presque tout le temps. Mais est-ce qu'on les supprime pour autant ? Non, s'agace Stein van Oosteren, porte-parole du Collectif Vélo Île-de-France, et regardez, là il pleut, il n'y a pas de piétons sur le trottoir, est-ce qu'on va l'enlever ?

    D'autant que ces quelques séquences et clichés capturés sur le vif par des internautes ne disent pas grand-chose de l'ampleur de la baisse de pratique cyclable par temps de pluie.

    Une baisse de fréquentation de l'ordre de 20 à 35 % quand il pleut

    Alors que disent les chiffres? Pour s'en faire une meilleure idée, nous avons collecté et analysé les données de fréquentation de 3 pistes cyclables parisiennes : le boulevard de Magenta, la rue de Rivoli et la voie Georges-Pompidou. Ces chiffres ont été rassemblés les matins de septembre 2020, de 8 heures à midi, à partir des données enregistrées par les compteurs vélo de la Mairie de Paris.

    - 1er lieu étudié : l'axe nord-sud du boulevard Magenta. Là, on observe 28 % de cyclistes en moins quand il pleut

    - 2e point de mesure : sur la rue de Rivoli, là quand il pleut, on enregistre -34 % de cyclistes sur l'axe est-ouest. Dans le sens inverse, cette baisse s'élève à -20 %.

    - 3e lieu, la voie Georges-Pompidou, où on observe une baisse d'environ 29 % dans le sens nord-sud et 31 % dans le sens inverse

    Cet échantillon de données nous indique ainsi que la baisse de fréquentation des pistes cyclables par temps de pluie serait plutôt de l'ordre de 20 à 35 %, loin de la désertion massive redoutée par certains.

    Cette légère baisse s'inscrit néanmoins dans un contexte de forte hausse de la pratique cyclable dans la capitale. Les compteurs parisiens ont enregistré une hausse de 120 % de la fréquentation des pistes entre septembre et mars 2020. Une pratique facilitée par le déploiement de 170 km de « coronapistes » en Île-de-France après le 1 er déconfinement.

    « Il n'y a pas de mauvais temps, que des mauvais vêtements »

    Une publication scientifique récente permet aussi de relativiser l'impact de la pluie sur les habitudes des adeptes de la pédale à Paris. L'étude décortique les données météorologiques de plusieurs villes françaises afin de comprendre combien de fois nous sommes réellement mouillés en nous rendant au travail à vélo.

    Verdict : à Paris, pour un trajet maison bureau d'environ 30 minutes, soit 9 km, 5 jours par semaine, les cyclistes sont mouillés seulement 27 fois dans l'année. C'est moins que les 35 trajets trempés des Lillois (59), un peu plus que les 15 petits jours mouillés des vélotafeurs de Marignane (13). Et c'est très loin des Brestois, détrempés 51 fois dans l'année.

    Pour le porte-parole du Collectif Vélo Île-de-France, pluie ou pas, tout est une question de bonnes habitudes. « On s'équipe. Il n'y a pas de mauvais temps, que des mauvais vêtements. Quand vous partez au ski vous ne vous plaignez pas de la neige. Non, parce que vous êtes équipés », sourit Stein van Oosteren.

    Retrouvez chaque semaine un nouvel épisode de notre série Biclou sur la page Facebook du Parisien.