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Nicolas Hulot sèche les États généraux de l'alimentation : "Le compte n’y est pas"

Nicolas Hulot sèche les États généraux de l'alimentation : "Le compte n’y est pas"

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Ce jeudi 21 décembre, Nicolas Hulot, ministre de la Transition écologique, a ouvertement boycotté la journée de clôture des États généraux de l'alimentation. Une nouvelle contrariété pour Hulot qui affiche de plus en plus clairement sa différence.

C'est un marronnier dans les sphères macronistes. Une blague que l'on se refile sous le manteau. Manière aussi de dédramatiser le cas Nicolas Hulot. Un proche d'Emmanuel Macron confiait ainsi il y a quelque temps à Marianne lors d'une énième rumeur sur une démission imminente du ministre de la Transition écologique : "La question avec lui, ce n'est pas de savoir s'il va démissionner mais quand il va démissionner !"

Sauf que cette fois, les signes de mécontentement de l'ancien animateur d'Ushuaïa sont plus que sérieux. Et plus inédit, l'intéressé ne s'en cache plus.... Ce jeudi 21 décembre, alors que l'ensemble du secteur de l'alimentation, professionnels comme associatifs, s'est retrouvé pour clore les États généraux de l’alimentation (EGA), Nicolas Hulot a ostensiblement séché la partie. Le ministre de la Transition écologique devait s’exprimer à Bercy, aux côtés du ministre de l’Agriculture et de la ministre de la Santé.

Une absence particulièrement remarquée par les acteurs de terrain. Le site Reporterre s'est fait l'écho de ces inquiétudes dans un article publié dans la foulée. Et malgré les raisons officielles données par le service de communication du ministre (un problème d'agenda), les interprétations des associatifs sont toutes allées dans le même sens. "Les ONG disent qu’il est mécontent des arbitrages rendus", écrit Reporterre. Comme le relève le site d'information, en réaction et dans un mouvement de soutien, la Plateforme citoyenne pour une transition agricole et alimentaire, qui regroupe une cinquantaine d’associations, a dénoncé dans un communiqué les conclusions de l'EGA : "Sur l’agriculture biologique par exemple, aucun objectif ambitieux est posé, ni aucun soutien financier. De même sur la sortie des pesticides, ou la lutte contre les contaminants chimiques." Manière d'éviter à l'écolo d'avoir à se justifier lui-même.

"Ce n'était pas pour moi le temps de conclure"

Mais Hulot s'est bel et bien décidé à parler. Ce vendredi 22 décembre, au journal Le Monde il s'explique sur les raisons de cette absence : "Le compte n’y est pas, ce n’était pas suffisamment conclusif et, donc, ce n’était pas pour moi le temps de conclure". Une expression qui tranche avec la communication déployée depuis sa nomination. Comme le note le quotidien, c'est la première fois que Nicolas Hulot marque ouvertement son désaccord avec le gouvernement. Tout en essayant de minorer l'importance de cette différence, "ce n’est pas un psychodrame" précise-t-il au Monde. Il assume : "Je considère que les conclusions ne sont pas à la hauteur de la qualité du travail extraordinaire et des propositions qui ont été faites dans les ateliers. Je ne vais donc pas aller faire le beau ou aller dire dans un micro que le compte n’y est pas". Et de dénoncer, comme l'ont fait les associations avant lui, l'absence de réflexion sur le chapitre de "l'alimentation saine, sûre et durable". Un trou qui traduit, selon les associations, les arbitrages perdus de Hulot contre le ministre de l'Agriculture.

Des tensions avec l'ancien socialiste Stéphane Travert étaient déjà apparues au grand jour, notamment sur la question des pesticides. Peu après sa nomination, Stéphane Travert avait fait plancher son ministère sur une réintroduction des pesticides tueurs d'abeilles, les néonicotinoïdes, pourtant interdits par l'Assemblée nationale en 2016. Un document de travail interministériel daté du 21 juin et qui avait fuité dans la presse, avait valu au gouvernement une première zone de turbulence avec des débats par médias interposés entre le ministère de l'Agriculture et le ministère de la Transition écologique. Hulot avait finalement remporté cette première manche. Travert vient de remporter celle des États généraux de l'alimentation. Un partout, la balle au centre ?

Pas vraiment. Puisque Nicolas Hulot commence à accumuler dans sa hotte plusieurs sujets de mécontentement. Que ce soit sur le CETA, le traité de libre-échange entre l’Europe et le Canada, ou sur la fin du nucléaire. Et reste encore l'épineux dossier de l'aéroport de Notre-Dames-des-Landes. Hulot en a fait une ligne rouge. Il avait prévenu que "d''ici décembre, [il] prendrai[t] mes responsabilités, quand la décision sera prise".Emmanuel Macron, lui, a finalement repoussé sa prise de décision à fin janvier. Un moyen de gagner encore un peu de temps. Au risque que les sujets de discorde entre les objectifs de Hulot et ceux de ses petits camarades de gouvernement s'amoncellent d'ici là...

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Natacha Polony, directrice de la rédaction de Marianne