Travaux à l’Elysée : la salle des fêtes vire du rouge au gris

Des travaux vont débuter dans la prestigieuse salle des fêtes de la présidence. Un chantier hors norme pour rénover les sols et murs de ce salon d’apparat, qui va passer du rouge au gris.

 Fini le rouge Empire, place au gris XVIIIe : les 1 000 m2 de la salle des fêtes de l’Élysée vont être rénovés à partir du 14 novembre. Coût des travaux : 500 000 euros.
Fini le rouge Empire, place au gris XVIIIe : les 1 000 m2 de la salle des fêtes de l’Élysée vont être rénovés à partir du 14 novembre. Coût des travaux : 500 000 euros. LP/Olivier Corsan

    Conférence de presse théâtrale du Général de Gaulle, dîner fastueux avec la Reine Elisabeth II, réception en l'honneur de Jackie et John Kennedy, cérémonies d'investiture des présidents français… Que de moments historiques se sont déroulés entre les murs carmin de la majestueuse salle des fêtes de l'Élysée. Chaque année, entre 160 à 200 événements officiels sont organisés sur les 1 000 mètres carrés de ce salon d'apparat, emblématique de la présidence de la République.

    Mais au fil du temps, les semelles de cuir et talons aiguilles des innombrables visiteurs ont piqué les moquettes, et le soleil usé les tapisseries. « Il fallait rénover », explique un conseiller d'Emmanuel Macron, en écho aux préconisations de la Cour des comptes, selon lesquelles il faudrait dépenser 100 millions d'euros les sept prochaines années pour rénover le palais tout entier.

    Le 14 novembre, après une ultime soirée privée autour du ténor franco-italien Roberto Alagna, rendez-vous artistique mis en place par le couple présidentiel, des travaux vont débuter pour insuffler un peu de modernité à la prestigieuse pièce. Montant : pas moins de 500 000 euros. Ils doivent durer six semaines. C'est court. Une cinquantaine de « petites mains » vont œuvrer jour et nuit pour redonner tout son lustre à ces lieux dans les délais impartis. Un chantier hors normes pour une pièce de réception qui a, jusqu'ici, peu évolué.

    Adieu le rouge et or

    Inaugurée pour l'Exposition universelle de 1889, la salle des fêtes remonte à la présidence Sadi Carnot. Près d'un siècle plus tard, en 1972, Georges Pompidou a la mauvaise surprise de découvrir des fuites sur ces augustes moquettes. Le locataire de l'Élysée décide d'engager des travaux. Ils ne pourront être achevés en raison de sa disparition.

    Deux mandats plus tard, François Mitterrand s'en charge. En 1984, le premier socialiste à s'installer au 55, rue du Faubourg-Saint-Honoré fait percer dix portes-fenêtres et une verrière sur le Jardin d'hiver attenant pour laisser entrer la lumière. Depuis, aucun président ne s'était lancé dans la réfection de ces murs. Surtout, aucun n'avait osé en modifier les couleurs rouge et or d'origine.

    Elles vont, cette fois, résolument évoluer. Fini le « rouge empire », place au « gris XVIIIe ». C'est l'architecte d'intérieur Isabelle Stanislas qui a remporté l'appel à idées lancé par le Mobilier national (en charge du projet). « C'est une intervention chirurgicale qui va avoir un effet énorme. Le projet est très sobre, pour rendre l'ensemble plus lumineux. Il s'agit de mettre en exergue l'élégance à la française », assure la décoratrice.

    Différentes tonalités de gris

    Le projet consiste à relier visuellement la salle des fêtes, le Jardin d'hiver et le Salon Napoléon en changeant les « revêtements textiles », c'est-à-dire les moquettes, les tapisseries et trente paires de rideaux en différentes tonalités de gris. Plus claire et plus contemporaine, cette teinte n'est pourtant pas nouvelle. Elle s'inspire du ton caractéristique des murs au XVIIIe siècle, et a été puisée dans les armoires du Mobilier national, qui recèlent un nuancier de plus de 20 000 références, dont un millier de gris !

    Autre nouveauté : l'installation de crémaillères invisibles, savant système qui permettra d'accrocher aux murs tapisseries, tentures et toiles de maître issus du Mobilier national pour adapter le décor de la salle aux événements qui y seront abrités et valoriser le patrimoine français. Quant aux plafonds ornés de peintures qui représentent trois allégories de l'art, de la science et de la République dans un tourbillon de stuc doré, ils ne seront pas modifiés.

    « Les enjeux sont importants, résume Hervé Lemoine, directeur du Mobilier national qui assure la maîtrise d'œuvre du chantier présidentiel. C'est une salle prestigieuse, beaucoup de symboles républicains s'y trouvent. Elle est très vue et visible. » Avec tous les hôtes de marque qui y défilent, ce salon constitue un instrument diplomatique. C'est même « le premier showroom de France », ose un collaborateur élyséen. D'ici fin 2018, il se déclinera désormais en six nuances de gris.

    LE PRÉSIDENT N'Y EST QUE LOCATAIRE

    Emmanuel Macron coupant la galette des rois, en janvier 2018, à la salle des fêtes de l’Élysée./LP/Olivier Corsan
    Emmanuel Macron coupant la galette des rois, en janvier 2018, à la salle des fêtes de l’Élysée./LP/Olivier Corsan LP/Olivier Corsan

    C'est le ministère de la Culture qui est propriétaire de l'Élysée, via l'Oppic, l'opérateur chargé du patrimoine et des projets immobiliers. Dans son palais présidentiel, le chef de l'État n'est qu'un simple locataire. À ce titre, Emmanuel Macron doit s'assurer que l'hôtel particulier construit en 1720 ne se dégrade pas.

    Charge au premier locataire de France d'impulser toutes les rénovations nécessaires à la préservation de son logement. Pour financer une partie de ces coûteux travaux, la présidence a lancé une boutique en ligne. Tasses et t-shirts estampillés, drapeaux ou autres montres… L'intégralité des bénéfices sera affectée aux projets de restauration du palais.