Selon les militants anti-fessée, « un coup, ça empêche de grandir »

FAIT DU JOUR. Le Parlement vient d'interdire les châtiments corporels, auxquels ont recours 85 % des parents. Interview de Gilles Lazimi, médecin, coordinateur de la campagne contre les violences éducatives

 Gilles Lazimi est médecin, coordinateur de la campagne contre les violences éducatives
 Gilles Lazimi est médecin, coordinateur de la campagne contre les violences éducatives MAXPPP/IP3PRESS/VINCENT ISORE

    «Enfin!» C'est ainsi que le docteur Gilles Lazimi, coordinateur des campagnes contre les violences éducatives, salue la disparition du «droit de correction». Voilà plus de quinze ans qu'il se bat pour faire entendre «qu'il n'y a pas de petites violences». Il appelle notamment à l'inscrire sur le carnet de santé et à la réalisation de campagnes de sensibilisation.

    Quels impacts peuvent avoir une fessée ou une claque donnée à un enfant ?

    Gilles Lazimi. Cela peut occasionner des troubles dépressifs, de l'anxiété, des difficultés relationnelles et même amener à des conduites addictives et des tendances suicidaires. Bien sûr, tous ne vont pas vivre cela mais nous avons estimé que 10 % des enfants qui ont connu des violences éducatives sont concernés.

    Ces gestes sont pourtant encore très répandus...

    C'est en train de changer. Depuis dix ans, les parents les utilisent de moins en moins. Mais les chiffres sont là. 85 % des parents disent avoir frappé leur enfant avant l'âge de 5 ans, et plus de la moitié avant l'âge de 2 ans. Or, un petit ne peut rien comprendre aux coups et aux hurlements venant de personnes qui sont là pour le chérir. Ça n'a pas de sens.

    Que dire à ceux qui pensent que « ce n'est pas si grave » ?

    Etre parent est le métier le plus difficile et, le plus souvent, on fait à partir de ce qu'on a vécu. Si mes parents pensaient que c'était utile de frapper, je vais donc le faire à mon tour. On va taper parfois encore plus violemment, ce qui conduit à la maltraitance. Il a été démontré qu'un enfant qui n'a pas été frappé portera secours à quelqu'un qui a besoin d'aide, les autres laisseront faire.

    Ça ne sert donc à rien...

    Non. Que va retenir l'enfant ? Qu'on résout les problèmes avec la violence. Cela peut même entraîner un mode de relation pervers, l'amenant à recommencer. Lorsqu'un enfant est frappé, il est inondé par des hormones de stress qui sidèrent sa pensée, bloquant son fonctionnement cérébral et donc ses facultés d'apprentissage. Le développement des neurosciences l'a prouvé. Un coup, ça empêche de grandir.

    Que faire quand on se sent dépassé ?

    Il faut savoir passer la main. Solliciter son conjoint. Des structures existent, comme les écoles de parents, pour parler des difficultés qu'on rencontre. Parler avec les professionnels qui travaillent en crèche peut aussi aider. Il faut se mettre en retrait et donner du sens à ce que demande l'enfant. Il a peut-être faim, froid... Dans tous les cas, il ne le fait pas exprès.

    QUESTION DU JOUR. Comprenez-vous l'interdiction de la fessée?