L’hommage des plus grands sportifs français à Kylian Mbappé pour ses 20 ans

A l’occasion de l’anniversaire de la star du PSG, nous avons interrogé neuf monuments du sport tricolore. De Killy à Riner, en passant par Perec ou Deschamps, tous sont sous le charme du surdoué de Bondy.

    « Inédit dans l'histoire du sport français », un « véritable phénomène »… Admiré par ses fans, Kylian Mbappé est aussi encensé par les plus grands sportifs français. Pour son anniversaire, nous avons demandé à huit champions ce qu'ils pensaient du jeune prodige du football. L'occasion aussi pour eux de se remémorer leurs vingt ans.

    « Je suis époustouflé que Kylian existe »

    JEAN-CLAUDE KILLY, triple champion olympique de ski alpin

    Jean-Claude Killy, ici le 5 février 1967, lors de la Coupe du monde de ski alpin, à Kitzbühel (Autriche). AFP/UPI
    Jean-Claude Killy, ici le 5 février 1967, lors de la Coupe du monde de ski alpin, à Kitzbühel (Autriche). AFP/UPI Benoît Lallement, Sandrine Lefèvre, Julien Lesage, Christophe Bérard, Yves Leroy et S.B.

    « Alors, là, j'avoue que je me suis fait dribbler. Pour la première fois, je n'ai rien à dire, rien sauf toute mon admiration! D'ordinaire, il arrive régulièrement que des sportifs viennent me consulter, me demander des conseils. Mais, là, avec Kylian Mbappé, je suis étonné, étourdi, surpris par sa maturité. Ce n'est pas croyable d'être large d'épaules et de cœur comme il l'est à 20 ans. On a toujours peur de l'avenir pour les sportifs, mais pas pour lui. L'avenir lui appartient.

    Kylian a le regard d'un enfant dans un corps d'adulte, comme un homme de 30 ans alors qu'il n'en a que 20. L'avenir l'attend. Il a un immense respect pour le système, ce qui n'est pas toujours le cas en football. J'ai rencontré beaucoup de sportifs, certains étaient très, très bons à 20 ans. Mais des comme lui… Je ne me souviens pas d'avoir croisé un tel phénomène depuis… Depuis toujours. Je n'en ai jamais croisé en fait. Jamais.

    Jamais je n'ai ressenti cela, vu ou observé cela. Sauf peut-être avec Jesse Owens, ou Wilma Rudolph. Quand j'avais 20 ans, j'étais déjà champion du monde. Mais j'étais loin d'avoir cette maturité, ces certitudes, cette vision du monde proche et lointain. C'est magnifique. Je suis époustouflé, oui, époustouflé qu'il existe. Maintenant, j'espère de tout cœur, presque à genoux, que son physique va tenir. Je vais prier pour cela. Je suis très impatient et très curieux de voir jusqu'où Kylian peut aller. »

    « Qu'il conserve son enthousiasme et sa sincérité »

    MARIE-JOSÉ PEREC, 50 ans, triple championne olympique d'athlétisme

    Marie-José Perec, ici en août 1991, lors de la finale du 400 m aux Championnats du monde d’Athlétisme à Tokyo./AFP/Roméo Gacad
    Marie-José Perec, ici en août 1991, lors de la finale du 400 m aux Championnats du monde d’Athlétisme à Tokyo./AFP/Roméo Gacad Benoît Lallement, Sandrine Lefèvre, Julien Lesage, Christophe Bérard, Yves Leroy et S.B.

    « A 20 ans, je découvrais la magie des Jeux olympiques de Séoul. On ne me connaissait pas à l'époque ! C'était en 1988 et je n'imaginais pas vraiment que, quelques années plus tard, je deviendrais triple championne olympique ! Quand on se lance dans une carrière de haut niveau, on rêve bien sûr de gagner des médailles, mais ce n'est qu'un rêve. Trois ans avant Séoul, j'avais même arrêté l'athlétisme. Mais j'y suis heureusement revenue !

    1988, c'est l'année de mes premiers Jeux olympiques, j'ai participé aux quarts de finale du 200 m, mais c'est aussi l'année de mon premier titre de championne de France du 400 m. C'est la saison suivante que tout a vraiment commencé pour moi avec un premier titre de championne d'Europe en salle. Un an plus tard, à Split, je décrochais la médaille de bronze des Championnats d'Europe. Le début de l'histoire. »

    Ce qu'elle souhaite à Mbappé, c'est qu'il conserve « son enthousiasme, sa sincérité et son franc-parler pour montrer la voie à tous les jeunes ! Et bien sûr, un joyeux anniversaire ! »

    « Ce qu'il réalise est inédit dans l'histoire du sport français »

    NICOLAS BATUM, champion d'Europe avec l'équipe de France de basket

    Nicolas Batum, ici en 2008./LP/Icon Sport/CSM
    Nicolas Batum, ici en 2008./LP/Icon Sport/CSM Benoît Lallement, Sandrine Lefèvre, Julien Lesage, Christophe Bérard, Yves Leroy et S.B.

    « Je suis né le 14 décembre, on a presque dix ans d'écart jour pour jour. J'avais été drafté à 19 ans et, à 20 ans, je faisais mes premiers pas en NBA à Portland. Je découvrais ce nouveau monde, le grand monde. J'avais beau avoir commencé ma carrière pro à 17 ans au Mans, ce changement de décennie a été un cap important pour moi. Je n'étais plus un espoir. C'est l'âge où on peut tout se permettre, on devient un adulte, tu ne te fixes pas de limites. J'avais la pression d'une carrière débutante en NBA mais la sienne doit être plus importante encore.

    Le foot est le sport le plus médiatisé au monde et, pourtant, il donne l'impression de vivre ça avec beaucoup de sérénité. Ce qu'il réalise, ce qu'il vit, est inédit dans l'histoire du sport français. A 19 ans, il est déjà champion du monde et dans le top 10 du Ballon d'or depuis deux ans. Il fait oublier son âge et ce n'est que le début. Selon moi, il y a lui, Tony (Parker) et Teddy (Riner).

    J'aime beaucoup son discours. Je sais que ça peut être mal interprété en France mais ce n'est pas de l'arrogance, c'est juste une incroyable confiance en soi. Je côtoie Michael Jordan et c'était sa force. C'est ce qui fera de lui l'un des plus grands. Mais ça ne sert à rien de le comparer à d'autres, il va écrire sa propre histoire. C'est Mbappé. Point. »

    « Il est aussi admiré pour les valeurs qu'il véhicule »

    FRANÇOIS GABART, 35 ans, détenteur du record autour du monde en solitaire à la voile

    François Gabart, ici en octobre 2018, juste avant le départ de la Route du Rhum./AFP/Damien Meyer
    François Gabart, ici en octobre 2018, juste avant le départ de la Route du Rhum./AFP/Damien Meyer Benoît Lallement, Sandrine Lefèvre, Julien Lesage, Christophe Bérard, Yves Leroy et S.B.

    « En 2003, j'étais en école d'ingénieur et faisais de la voile olympique, j'étais devenu champion du monde jeune en Tornado. On n'était pas nombreux car ce support était réservé aux plus vieux. A l'époque, les champions olympiques avaient bien 35 ans… mon âge aujourd'hui (rires). Je n'étais donc pas champion du monde des grands, comme peut l'être déjà Kylian Mbappé.

    Je ne suis pas spécialiste de football, mais, comme tous les Français, j'ai rêvé cet été devant ses chevauchées folles ! Moi, à 20 ans, je rêvais de Jeux olympiques. Je savais que ce serait compliqué pour Athènes mais j'étais dans ce projet d'aller à Pékin en 2008. Déjà, la course au large me fascinait, c'était inconsciemment dans un coin de ma tête mais je n'imaginais pas que j'en ferais un jour, encore moins sur des bateaux aussi fabuleux que les ultimes.

    Mbappé, j'ai cette impression qu'il a la tête sur les épaules. C'est chouette car, à cet âge-là, dans la folie de ce sport-là, c'est loin d'être évident. Je lui souhaite de garder cette fraîcheur, de garder ces valeurs dont on a tant besoin. Au-delà de l'extraordinaire footballeur qu'il est, il est aussi admiré pour les valeurs qu'il véhicule. »

    « Qu'il continue à prendre du plaisir »

    BERNARD HINAULT, 64 ans, cinq fois vainqueur du Tour de France

    Bernard Hinault, ici en 1975./PRESSE SPORTS
    Bernard Hinault, ici en 1975./PRESSE SPORTS Benoît Lallement, Sandrine Lefèvre, Julien Lesage, Christophe Bérard, Yves Leroy et S.B.

    « A 20 ans, j'étais encore amateur et licencié au CO Briochin (NDLR : dans les Côtes-d'Armor). Je savais déjà que l'année suivante, je serais professionnel. Mon ambition à ce moment-là était juste de faire une carrière professionnelle et d'être un honnête équipier… Au niveau du palmarès, je m'étais fait remarquer par une deuxième place sur la Route de France et j'avais aussi gagné des courses en Bretagne et sur les pistes. Ce que je voulais avant tout, c'était vivre du cyclisme, car auparavant, je travaillais chez un grossiste en chaufferie pour gagner ma vie. C'était très physique et j'allais à l'entraînement une fois par semaine, le jeudi. »

    Ce qu'il souhaite à Kylian Mbappé, « même s'il a déjà gagné le plus gros à moins de 20 ans, c'est de continuer à faire comme s'il n'avait rien remporté et surtout, surtout, de continuer à prendre du plaisir. Ce sera le secret pour durer. »

    « On parle d'une personne hors-norme »

    DIDIER DESCHAMPS, 50 ans, champion du monde de football comme joueur et entraîneur

    A 20 ans, Didier Deschamps, qui jouait à Nantes, allait bientôt devenir international./PRESSE SPORTS/Clément
    A 20 ans, Didier Deschamps, qui jouait à Nantes, allait bientôt devenir international./PRESSE SPORTS/Clément Benoît Lallement, Sandrine Lefèvre, Julien Lesage, Christophe Bérard, Yves Leroy et S.B.

    « Mes 20 ans, c'était il y a bien longtemps. J'étais à Nantes, j'avais commencé à jouer en équipe première à 16 ans et demi, mais j'en étais au tout début. 20 ans, c'est une barrière symbolique, le basculement dans le monde adulte. Je n'ai jamais beaucoup apprécié le jour de mon anniversaire. Je n'ai jamais voulu faire de grande fête et l'âge avançant encore moins.

    J'espérais faire une belle carrière, j'avais effectué un premier pas important en signant mon premier contrat pro. J'étais le petit jeune, même si j'étais déjà capitaine. A mes 20 ans, je rêvais de faire une belle carrière, mais je ne pensais pas devenir international quelques mois après. Ça allait, mais il y avait de la route à faire ! »

    Ce qu'il souhaite à Mbappé, même si selon Didier Deschamps « c'est dur de comparer où en est Kylian par rapport aux autres à 20 ans. On parle d'une personne hors-norme. J'utilise ce qualificatif, parce qu'il est comme ça. Ce qu'il est capable de faire, malgré sa jeunesse… Il est déjà très performant et il a encore une belle marge de progression, donc je suis très heureux qu'il soit Français. »

    « Ce qu'il vit est tellement exceptionnel ! »

    RICHARD DACOURY, 59 ans, champion d'Europe de basket et 9 fois champion de France

    Richard Dacoury (au centre), ici en 1984./PRESSE SPORTS
    Richard Dacoury (au centre), ici en 1984./PRESSE SPORTS Benoît Lallement, Sandrine Lefèvre, Julien Lesage, Christophe Bérard, Yves Leroy et S.B.

    « A 20 ans, je signais mon premier contrat - on ne parlait pas de contrat pro à l'époque - à Limoges pour 2 300 francs plus 600 francs d'aide au logement. 2 900 francs, c'était un petit contrat pour l'époque. C'est amusant quand on y pense et ça montre la dimension qu'a pris le sport dans notre société aujourd'hui. Si désormais les jeunes sportifs rêvent d'être pros et de gagner de l'argent et des titres, moi, à 20 ans, je ne pensais absolument pas faire carrière dans le basket.

    Gagner un peu d'argent, ça me permettait de m'émanciper, de quitter ma famille et de poursuivre mes études tout en jouant au basket. Adolescent, ma mère me répétait fais des études et, pour le reste, on verra après ! Je suis finalement resté 20 ans à Limoges ! »

    Ce qu'il souhaite à Mbappé : « Ce qu'il vit actuellement est tellement exceptionnel ! J'adore l'entendre parler de sa passion, du plaisir monstrueux qu'il prend, c'est unique dans un sport où il y a tant d'argent et tellement rafraîchissant ! Je lui souhaite de garder cette envie. Je ne peux rien lui offrir d'autre, il peut tout s'acheter (rires) ! »

    « Qu'il savoure pleinement chaque seconde »

    TEDDY RINER, 29 ans, double champion olympique de judo

    Teddy Riner, ici en 2012, médaillé d’or aux JO de Londres./LP/Humberto de Oliveira
    Teddy Riner, ici en 2012, médaillé d’or aux JO de Londres./LP/Humberto de Oliveira Benoît Lallement, Sandrine Lefèvre, Julien Lesage, Christophe Bérard, Yves Leroy et S.B.

    « Moi à 20 ans ? C'était en 2009, ça fait un petit peu de temps maintenant… J'étais à l'Insep et j'étais triple champion du monde, ça fait bizarre quand j'y repense. Je venais de participer à mes premiers JO, ceux de Pékin, où j'ai décroché la médaille de bronze. En 2009, j'étais donc reparti à l'entraînement, bien décidé à tout faire pour, cette fois, aller chercher la médaille d'or olympique à Londres, en 2012, ce que j'ai finalement réussi à faire. Comme encore aujourd'hui, j'avais cette fougue. J'étais jeune dans ma tête, bon je le suis encore (rires). A 20 ans, on rêve de plein de choses, de cumuler les titres de champion du monde, de gagner encore et toujours. A 20 ans, le sport, ce n'est que du plaisir. »

    Ce qu'il souhaite à Mbappé, c'est « d'en profiter. Une carrière sportive, ça passe tellement vite que je veux lui dire de savourer pleinement chaque seconde, chaque minute. »

    « Un diamant qui reste encore à façonner »

    FLORENT MANAUDOU, champion olympique de natation à Londres

    Florent Manaudou, médaillé olympique à Londres en 2012 au 50 m nage libre./AFP/Christophe Simon
    Florent Manaudou, médaillé olympique à Londres en 2012 au 50 m nage libre./AFP/Christophe Simon Benoît Lallement, Sandrine Lefèvre, Julien Lesage, Christophe Bérard, Yves Leroy et S.B.

    « 20 ans, c'est l'âge où tout basculé pour moi. J'ai quitté mon club formateur d'Ambérieu dans l'Ain pour rejoindre le cercle des nageurs de Marseille. C'est l'année charnière. C'est là que ma carrière a pris un tournant positif. Pour ses 20 ans, je souhaite à Kylian Mbappé de progresser encore. Je ne suis pas un expert en football, mais j'adore le sport. Il est un diamant qui reste encore à façonner. Tous les sportifs de haut niveau ont des objectifs, mais, lui, j'ai l'impression qu'il en a plein la tête. Je lui souhaite de continuer sur sa lancée pour pouvoir les atteindre tous. »

    MBAPPE A 20 ANS, NOTRE DOSSIER SPÉCIAL