«Le sport est un outil indispensable pour la santé», confie le boxeur Yazid Amghar

Le poids super-léger du BCO Pont a ouvert il y a quatre ans un établissement dédié à la pratique de la boxe et du fitness. Frappé de plein fouet par la crise sanitaire, il raconte comment il traverse cette période très compliquée.

 Boxeur professionnel au club de Pont-Sainte-Maxence, Yazid Amghar est également le gérant d’une salle de sport dans le XXe arrondissement de Paris.
Boxeur professionnel au club de Pont-Sainte-Maxence, Yazid Amghar est également le gérant d’une salle de sport dans le XXe arrondissement de Paris. DR

    Cela faisait près d'un an qu'il attendait ce moment. Le 17 octobre dernier, Yazid Amghar est remonté sur un ring lors d'un succès par KO devant le Nicaraguayen Daniel Mendoza, au palais des sports Marcel-Cerdan de Levallois-Perret (Hauts-de-Seine). Mais, depuis plusieurs mois, le super-léger du Boxing Club Olympique de Pont-Sainte-Maxence mène de front un tout autre combat.

    Il est en effet le gérant d'une salle de boxe et de fitness, le Hall Boxing, qu'il a ouverte il y a quatre ans dans le XXe arrondissement de Paris. Une structure qu'il a été contraint de fermer comme tous ses homologues, le 15 mars, sur décision gouvernementale en raison de la pandémie de Covid-19. Dès la veille, l'homme de 31 ans avait préféré anticiper la décision du Premier ministre pour parer à toute éventualité.

    « J'avais décidé de fermer car il y avait trop d'inconnues, souffle Yazid Amghar. J'étais inquiet et j'ai tout de même une responsabilité vis-à-vis de mes élèves. » Comme sur le ring, le Pontois décide de s'adapter rapidement à ce nouvel adversaire, inconnu et imprévisible. Moins d'une semaine plus tard, il lance des cours en ligne sur le réseau social Instagram, avec ses quatre coachs. Les séances sont gratuites et ouvertes à tous.

    « Nous voulions absolument garder un lien social avec nos adhérents, indique le boxeur. On a mis un planning en place, avec environ 4 heures de cours par jour, y compris des cours débutants pour que les gens puissent en profiter en famille. Et ça a très bien marché, on a eu des retours hyper-positifs et valorisants. Parfois, entre 300 et 400 personnes étaient derrière leur écran. On s'est aperçus qu'à travers les cours en ligne, il y avait un réel potentiel, même si c'est presque un autre métier. »

    Pour saluer l'initiative, certains élèves proposent alors aux professeurs de payer leurs séances. Le Hall Boxing bascule alors sur un autre réseau social, Zoom, en proposant des packs de cours pour environ six euros l'unité. « Ils ont souhaité être solidaires, ils ont compris que la période était très compliquée pour nous, souffle le coach, reconnaissant. On a quand même continué sur Instagram, pour ceux qui n'avaient pas les moyens. Financièrement et psychologiquement, ça a été une bouffée d'oxygène. Finalement, le confinement nous a permis de développer une nouvelle activité. »

    La salle est à nouveau fermée depuis le 30 septembre

    À partir du 1er juin, les séances en extérieur en extérieur sont autorisées, sans opposition et à dix personnes maximum. Et trois semaines plus tard, la salle est enfin à nouveau accessible. « On était heureux de revoir nos élèves, le contact physique nous avait tellement manqué, sourit Yazid Amghar. On est restés ouvert en juillet et en août, et on fait un super mois de septembre. Les gens avaient très envie de revenir, on a été agréablement surpris. On a tout de même continué à donner nos cours en ligne, car cela avantageait certains en termes de budget ou d'amplitude horaire. On a même aménagé un de nos bureaux pour ça. »

    Mais le 30 septembre, c'est la douche froide : les salles de sport doivent à nouveau fermer dans la capitale face au regain du virus. « Là, ça a été très dur à accepter, plus que la première fois », reconnaît le Champion de l'Union Européenne des super-légers, qui parvient à maintenir une trentaine d'heures de cours entre ceux en extérieur et ceux via le Web, contre 70 en temps normal. « Cela reste du bricolage, poursuit-il. Le manque à gagner est énorme. Il y a quand même des gens qui ne sont pas revenus, dont certains qui ont tout simplement peur de la maladie… »

    À ce ralentissement de l'activité s'ajoute une certaine incompréhension. Si son entreprise a effectivement touché la prime de 1 500 € promise par l'Etat, Yazid Amghar a du mal à saisir le traitement infligé aux salles de sport. « J'ai envie de faire confiance à ceux qui nous dirigent, mais il y a beaucoup d'incohérences, regrette le trentenaire. Dans ma salle, on est maximum 10 par heures de cours, on peut trouver plein de solutions pour que les élèves ne soient pas en contact. Et on voit les centres commerciaux, le métro, avec les gens collés les uns aux autres. Pourquoi les salles de danse restent ouvertes, mais pas les salles de sport ? Ils ne se rendent pas compte que c'est l'investissement de toute une vie. D'autant que le sport est un outil indispensable pour la santé. Pendant le confinement, certaines personnes m'ont dit qu'on les avait sauvées… »

    S'il ne craint pas de devoir définitivement fermer boutique, l'entrepreneur porte un regard très prudent sur les prochains mois. « Heureusement, j'ai toujours eu une gestion de bon père de famille, se félicite l'intéressé. Et mon banquier m'a toujours conseillé de garder une trésorerie qui me permettait d'assumer une fermeture d'un an. Je l'ai écouté mot pour mot et je l'ai même appelé pour le remercier. On est dans une situation où on n'a pas de visibilité, on s'imagine énormément de scénarios. Chaque jour qui passe est difficile. On est obligés de refaire des business plans chaque semaine, chaque mois, pour s'adapter à la situation. Mais je reste positif : je m'efforce de me dire que, quoi qu'il se passe, on trouvera des solutions… »