Vincent Collet, l'homme qui ne décompresse jamais

EUROSPORT ET MCS, 21 HEURES

« J’étais un petit joueur mais j’ai toujours eu cette passion d’entraîner », confie Vincent Collet, le coach de Strasbourg, premier club français à jouer la finale de l’Eurocoupe depuis 15 ans.
« J’étais un petit joueur mais j’ai toujours eu cette passion d’entraîner », confie Vincent Collet, le coach de Strasbourg, premier club français à jouer la finale de l’Eurocoupe depuis 15 ans. (PhotoPQR/« L’Alsace »/Dominique Gutekunst.)

    Il n'arrête jamais et collectionne les casquettes. Entraîneur de Strasbourg, première équipe française depuis quinze ans à disputer la finale de l'Eurocoupe, Vincent Collet est aussi sélectionneur des Bleus depuis 2009. Depuis l'été dernier, le Normand a dirigé 73 matchs*. Cumuler les deux fonctions, c'est comme si Didier Deschamps ou Claude Onesta étaient aussi sur les bancs du PSG au foot et au hand. « Je ne sais pas comment Vincent fait : c'est surréaliste et surhumain. Il ne décompresse jamais. C'est fou ! S'il y avait un syndicat des sélectionneurs, il dirait non à un emploi du temps aussi surchargé », raconte son ami Onesta, le patron des handballeurs champions olympiques.

    Depuis un an, cet homme de 52 ans n'a pris qu'une semaine de vacances. Cet automne, il est passé près du burn-out. Etre régulièrement absent lors des anniversaires de sa fille Manon -- née en septembre, une période où Collet est toujours en rassemblement avec les Bleus -- le ronge de plus en plus. Sa vie de famille en a souffert... Il n'est pas facile de partager la vie d'un homme entré en basket comme on entre au couvent. « Il n'y a pas un jour de l'année où je ne pense pas au basket. Tu as beau adorer ça, ça finit pas peser, confie ce père de trois enfants. Quand tu perds, c'est pire. Tu te dis  : Tout ça, pour ça... »

    « On l'a toujours connu comme ça. Il rentrait tard et regardait des vidéos à la maison, confie l'un de ses jumeaux, Florian. Tous les coachs font des sacrifices mais peu ont des résultats. Il a travaillé très dur pour être là où il est. Je ne pense pas qu'il ait des regrets. Je n'espère pas. »

    Vincent Collet est né avec un ballon entre les mains. « Mon papa était secrétaire du club de Montivilliers (Seine-Maritime), raconte-t-il. Il ouvrait la salle à 7 heures et s'occupait de tout. Il arbitrait, entraînait l'équipe en N 2. Je crois qu'il est fier de moi. » Ses parents l'ont vu quitter le foyer au début des années 1980 pour vivre sa passion. « A 16 ans, Jean Galle, alors entraîneur de Caen, était venu voir mes parents pour me faire signer. Ils ne me l'ont jamais dit de peur que je dise oui. Deux ans plus tard, mon bac C en poche, je suis parti. En ce temps-là, le basket pro n'avait aucune garantie d'avenir. »

    De 1981 à 1998, Collet a vécu une première carrière, devenant champion de France en 1982 avec Le Mans. « J'étais un petit joueur mais j'ai toujours eu cette passion d'entraîner. A Caen à 22-23 ans, même pro, je m'occupais des benjamins. » « Lorsqu'il a passé son BE2 (brevet d'éducateur sportif), il a réalisé un exposé parfait, se souvient l'ancien sélectionneur Alain Weisz. C'est le seul 20/20 que j'ai mis. »

    Longtemps sous-estimé en raison de sa nonchalance, Collet a décroché ses galons et le respect après la médaille d'or à l'Euro 2013, mais surtout celle en argent au Mondial 2014. « Il a fallu attendre la Coupe du monde et battre l'Espagne chez elle sans Tony (Parker) pour se rendre compte qu'il y avait un coach, poursuit Weisz. Mais il ne cherche pas la lumière. »

    « J'ai une image austère qui est fausse. On pense de moi que je suis le gars sympa qui manque d'autorité. J'en ai souffert. Gueuler n'est pas important : je préfère l'échange. Je suis plutôt convivial même si je ne suis pas un fêtard. J'aime les bonnes tables et je suis un passionné de vin. Ce qui me redonne la pêche, c'est une bonne bouteille à partager avec mon staff, mes amis, la famille. Il y a quelques mois, à la veille d'un match à Chalon, je suis allé visiter la cave du domaine Ramonet. Le lendemain, on a pris 20 points. Il faut savoir assumer ses péchés. » Vincent Collet les assume tellement qu'il devrait prolonger son bail avec l'équipe de France au-delà de l'été.

    * 19 en 2015 avec l'équipe de France ; 54 avec Strasbourg.