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Qualité de l'air dans les hôpitaux belges

23 janvier 2024
qualité de l'air dans les hôpitaux

La qualité de l’air intérieur est un enjeu majeur pour la santé publique, en particulier dans les établissements de santé. Nos enquêteurs sont allés visiter 25 grands hôpitaux belges pour la tester et leur conclusion est sans appel : par manque d’aération ou de présence d’une ventilation efficace, il y a un réel problème de renouvellement de l’air intérieur dans la plupart des hôpitaux visités. Découvrez les résultats de notre enquête.

Qu’est-ce qu’une bonne qualité de l’air dans les hôpitaux ?

Une bonne qualité de l’air intérieur dans un établissement de santé peut être définie comme celle qui n’occasionne pas de problèmes de santé supplémentaires chez toute personne qui y séjourne ou qui le visite, notamment les patients ainsi que les visiteurs, les intervenants et le personnel.  

C’est l’objectif que devraient avoir tous les hôpitaux et ils devraient prendre toutes les mesures nécessaires pour atteindre un air intérieur de bonne qualité afin de prévenir l'apparition de problèmes de santé, notamment certaines infections transmises par voie aérienne.

Qu’est-ce qui contamine l’air intérieur des hôpitaux ?

L’air des établissements de soin est chargé de toutes sortes de microbes et de substances chimiques, mais aussi organiques.

  • Ils sont fréquentés par des personnes malades qui, sans le vouloir, émettent des contaminants dans l’air en éternuant, en parlant et en respirant. Or, certaines maladies se propagent par voie aérienne, comme la grippe, la tuberculose, le rhume ou la covid.   
  • Des produits chimiques spécifiques aux activités médicales sont utilisés et peuvent émettre des substances dans l’air.  
  • L’air contient aussi des substances organiques et minérales comme des moisissures et des poussières fines pouvant provenir du bâtiment. 

Cette pollution de l'air intérieur a une incidence directe sur la santé des personnes (malades ou visiteurs ou personnel soignant et d’entretien) qui fréquentent et travaillent dans ces endroits fermés.  

Qu'est-ce qui contamine l’air intérieur ?

L’impact de l’âge et de l’état des bâtiments sur la qualité de l’air intérieur

La qualité de l’air intérieur dans les établissements de santé est une problématique fort complexe. Celle-ci pouvant être fortement impactée par l’âge et l’état des bâtiments, ainsi que la manière dont ils sont conçus et gérés, on observe des réalités très différentes. Ainsi, alors que plusieurs de ces établissements sont situés dans des édifices vieillissants, il existe à l’opposé de nombreux projets de constructions neuves

L’état du bâtiment peut effectivement être une source de problèmes liés à la qualité de l’air : 

  • Infiltrations d’eau causant une contamination fongique ; 
  • Présence d’amiante dans certains matériaux
  • Niveau de chaleur élevé dans une chambre d’hôpital non-climatisée. 

La conception des bâtiments et de leurs systèmes de ventilation doit pouvoir assurer une bonne qualité de l’air intérieur.

Pourquoi la qualité de l’air dans les hôpitaux est-elle importante ?

La crise covid nous a fait réaliser que des microbes et des polluants contaminent l’air que nous respirons et que ceux-ci peuvent avoir un impact négatif sur notre santé. La qualité de l’air est dès lors devenue une question importante de santé publique. Il est apparu essentiel de la contrôler et de l’améliorer, notamment et surtout dans les établissements de soins comme les hôpitaux. 

Les enquêteurs de Testachats se sont donc rendus discrètement dans 25 grands hôpitaux belges afin d’y mesurer la qualité de l’air : ils y ont découvert des concentrations souvent élevées de CO2, ce qui indique un manque de ventilation et d’aération, et donc un plus grand risque d’être contaminé par des microbes et autres polluants

C’est malheureux, car on se rend à l’hôpital pour se faire soigner, pas pour y tomber malade. Une attention toute particulière devrait donc être apportée par les établissements de soins à la qualité de l’air intérieur.

Découvrez les résultats de notre enquête

Test de la qualité de l'air dans les hôpitaux : notre méthodologie

En novembre 2023, nous avons envoyé des enquêteurs dans les 25 plus grands hôpitaux belges avec un appareil portable pour enregistrer, en toute discrétion, les niveaux de CO2 pendant une période déterminée. 

L’objectif ? Vérifier si l’aération et les systèmes de ventilation de ces hôpitaux permettent un renouvellement efficace de l’air afin de réduire le risque de contamination des personnes par des microbes et polluants potentiellement présents dans l’air qu’elles respirent. 

La sélection des hôpitaux et les espaces visités

Nous avons sélectionné 25 hôpitaux en fonction du nombre de lits (le plus grand nombre) : 

  • 10 en Région flamande 
  • 10 en Région wallonne 
  • 5 dans la Région de Bruxelles-Capitale

Dans chaque établissement, les mesures ont été effectuées : 

  • À la réception
  • Dans 3 salles d’attente
  • À la cafétéria
  • Dans les couloirs, les ascenseurs et les toilettes

Les parties des hôpitaux destinées à la chirurgie et aux chambres des patients n’ont pas été visitées.

La concentration en CO2 : le critère pour mesurer la qualité de l’air dans les hôpitaux

Nous avons utilisé la mesure de la concentration en dioxyde de carbone (CO2) comme indicateur de la qualité de l’air. 

En effet, lorsque nous respirons, parlons, toussons, nous émettons du CO2 et des aérosols potentiellement contaminés par des micro-organismes, des bactéries ou des virus. Une concentration élevée de CO2 indique que l’air n’est pas assez renouvelé et qu’il y a plus de risque de transmission de maladies et de contamination par d’autres polluants par l’air.
Mesurer le niveau de CO2 permet donc de détecter des seuils de référence à partir desquels il est recommandé de renouveler l’air de la pièce en aérant, en mettant en route la ventilation ou d’activer un dispositif de purification de l’air.

Comment mesure-t-on la qualité de l’air ?

Seuil de concentration en CO2 : à partir de 800 ppm, il est temps de renouveler l’air !

Comme le montre la législation actuelle, le ministère de la Santé publique et le Code du Bien-être au travail belge (Codex) estiment acceptable d’avoir un seuil de concentration CO2 de 900 ppm (qui correspond à 500 ppm au-dessus de la concentration extérieure souvent évaluée aux environs de 400 ppm). 

Nous avons cependant établi à 800 ppm le seuil de concentration à partir duquel nous estimons qu’il est recommandé de renouveler l’air de la pièce, ou d’activer un appareil de purification, car il peut y avoir un risque de contamination trop élevé s’il est chargé de microbes et polluants.

Pour établir ce seuil, nous nous sommes basés sur les recommandations du Conseil Supérieur de la santé (CSS) et celles des Centers for Disease Control and Prevention (CDC) américains.

Il est cependant important de noter que la transmission de virus aériens peut se produire même dans les zones des établissements de soins de santé ayant une ventilation adéquate et une concentration CO2 inférieure à 800 ppm. Ainsi, une ventilation adéquate basée sur des mesures de dioxyde de carbone ne fournit pas une assurance complète que la transmission par voie aérienne de certains virus respiratoires ne se produira pas.

Un appareil professionnel pour prendre les mesures de la concentration de CO2 lors du test 

L’appareil utilisé pour les mesures est un appareil professionnel portatif appelé Testo 315-3. Très facile d’utilisation, il affiche la concentration en ppm de CO2 en continu sur un écran. 

Nos enquêteurs se sont donc promenés dans les hôpitaux le plus discrètement possible avec cet appareil à la main.

Les recommandations aux enquêteurs qui ont mené le test dans les hôpitaux

Le défi étant de ne pas se faire repérer et de veiller à ne pas influencer les mesures, les enquêteurs ont reçu les consignes suivantes :  

  • Porter un masque FFP2.
  • Ne pas expirer ou parler à proximité du capteur : cela peut influencer la mesure. Ne pas le tenir trop près du visage.
  • Porter l’appareil à la main à hauteur de la taille en marchant, sur les genoux quand ils étaient assis dans les salles d’attende ou déposé sur la table quand ils étaient à la cafétéria.
  • Ne pas mettre le capteur près d'une porte ou d'une fenêtre ouverte, près de l’amenée d’air du système de ventilation ou encore à proximité directe de personnes qui pourraient expirer directement dans l’appareil et fausser la mesure. Prévoir au moins 1,5 m de distance. 
  • Prévoir une période de stabilisation de la mesure, en ne les relevant qu’après 5 minutes et faire des relevés toutes les 2 minutes.

Le processus de test de la qualité de l’air dans les hôpitaux

Pour chaque hôpital, la première mesure a été prise en dehors de l’hôpital pour connaître la concentration de CO2 à l’extérieur. Ensuite plusieurs séries de mesures ont été effectuées : à la réception, dans 3 salles d’attente, à la cafétéria, dans les couloirs, ascenseurs et toilettes. 

Cinq mesures ont été effectuées dans les salles d’attente, la réception et la cafétéria toutes les 2 minutes durant 10 minutes. Le nombre de personnes présentes dans les endroits étudiés a été relevé ainsi que la capacité d’accueil (nombres de chaises).

Les normes en matière de qualité de l’air intérieur

La règlementation actuelle en matière de qualité de l’air intérieur dans les espaces accessibles au public s’appuie essentiellement sur le Code du bien-être au travail (ou Codex) et la loi QAI de 2022. Celle-ci établit des niveaux de référence indicatifs de la qualité de l’air intérieur, mais il n’est malheureusement pas obligatoire de les respecter.

Législation sur la qualité de l’air intérieur

Dans la suite de cet article : 

La qualité de l’air dans les hôpitaux est d’autant plus importante qu’ils sont fréquentés par des personnes vulnérables. Découvrez les conséquences qu’une mauvaise qualité de l’air peut avoir sur la santé

Notre enquête a montré que la qualité de l’air pouvait fortement varier d’un établissement de soin à l’autre et, au sein de ceux-ci, d’une pièce à l’autre. Découvrez les résultats de notre enquête dans 25 grands hôpitaux belges.

Que peuvent faire les hôpitaux pour améliorer la situation au sein de leur établissement ? Découvrez nos 4 recommandations pour améliorer la qualité de l’air intérieur.